Interview

Pouvez-vous nous raconter l’histoire de Cristel?

Pour comprendre l’entreprise, il faut parler de Japy, l’importante société du XIXè siècle qui industrialisait des pièces mécaniques de montres à Fesches-le-Chatel dans le Doubs. Ce grand groupe industriel a été à l’origine de la première casserole emboutie dans les années 1830. Mais Japy a dû fermer ses portes en 1979 suite à des difficultés économiques. Quelques ouvriers ont par la suite fondé une société coopérative de production (Scop) en 1983, dans le but de continuer à fabriquer des casseroles en Inox.

Un jour, ma maman, qui avait accompagné la Scop dans son activité, a fait visiter les ateliers à mon papa. C’était un peu fou, à l’époque, il y avait des trous dans la toiture, des arbres qui poussaient à l’intérieur des locaux… Là, très vite, mon père a compris l’impasse dans laquelle se trouvait l’entreprise : elle avait des coûts de production élevés pour des produits dépourvus à l’époque de valeur ajoutée. Il fallait donc élever cette valeur, ce qu’il s’est employé à faire. Mes parents ont repris l’entreprise avec leurs faibles économies et ils ont créé Cristel SA en 1986.

 

Quelles activités développez-vous aujourd’hui?

Cristel est le premier fabricant français d’articles culinaires inox haut de gamme, avec un marché situé tant du côté des particuliers que des professionnels. Nous comptons 105 salariés et venons de réaliser un chiffre d’affaires de 24 millions d’euros en 2024. Nous fabriquons 25 % de nos volumes à destination de l’international, avec des produits distribués dans 50 pays. Nous avons travaillé avec le Japon à partir de 1991, un marché très exigeant en matière de qualité qui nous a permis de nous hisser au meilleur niveau. Nous avons obtenu le label Entreprise du patrimoine vivant en 2012, ainsi que le label « Origine France garantie ». Nous fabriquons nous-mêmes plus de 92 % de la matière que nous utilisons.

 

En quoi votre histoire familiale transparait-t-elle dans votre management ?

L’entreprise a été créée par mes parents. Nous représentons aujourd’hui la troisième génération avec mon neveux et mon fils. Ce sont les jeunes qui nous ont fait remarquer que nos valeurs revêtaient un intérêt pour l’entreprise. « C’est bien de partager des valeurs, mais c’est encore mieux de les transmettre, notamment à ses collaborateurs et à ses partenaires » nous ont-il fait remarquer. Grâce à eux, nous sommes devenus une « entreprise à mission » avec des objectifs annuels.

 

Quelle serait une valeur-clé de l’entreprise ? 

Le respect de l’environnement constitue un engagement historique. Nos actions à ce sujet ont commencé en 1983 par la suppression d’une installation utilisant des solvants alors que l’interdiction légale n’est intervenue qu’en 1996. Depuis, 38 autres actions se sont enchaînées dans ce domaine, parmi lesquelles le recyclage intégral des eaux du process qui fonctionne en circuit fermé, la récupération des calories des compresseurs pour chauffer les ateliers, l’installation de panneaux photovoltaïques qui fournissent 20 % de l’énergie de la production (l'intégralité de notre électricité étant issue de sources renouvelables), la revalorisation de nos déchets tant sur la matière que sur l’énergie à plus de 97 %… Bref, c’est une réflexion permanente.

En outre, nos produits sont garantis à vie et nous avons mis en place depuis 1992 un service de rechapage qui permet de remplacer le revêtement anti-adhérence d’une poêle. Cette prestation permet une économie de matière et d’énergie ainsi que la suppression de rejets de CO2 causés par l’extraction de minerais. Toutes ces actions donnent du sens à ce que l’on fait, on ne jette pas un produit Cristel, on le garde toute sa vie, on le répare ! Aujourd’hui, avec la règlementation sur les PFAS (communément appelés « polluants éternels », Ndlr), notre marché évolue encore plus vers le 100 % inox. Nous avons dernièrement doublé les ventes de poêles dans cette matière.