Depuis la crise du Covid, de nombreuses pénuries sont apparues sur le marché des matières premières : le bois, l’acier, les semi-conducteurs… aggravées par le Brexit, un défaut de chauffeurs routiers, le blocage de bateaux dans le canal de Suez… Si la situation tend à s’améliorer, l’incertitude n’a jamais été aussi palpable. Témoignages d’entreprises de Bourgogne-Franche-Comté.


Pénurie de matières premières… Le sujet préoccupe les chefs d’entreprises depuis l’été dernier. Quasi tous les secteurs d’activités sont touchés par l’effet d’une reprise dynamique après la mise à l’arrêt, en 2020, de l’activité industrielle aux quatre coins du monde en raisonde la crise sanitaire.

En Bourgogne-Franche-Comté, le voyageur sur l’A36 ne pouvait pas, ces derniers mois, faire autrement que constater l’immense parking, vide ou presque, de Stellantis (ex-PSA) Sochaux, dans le Doubs. L'usine où l’on fabrique les 2008 a connu une pénurie sans précédent de semi-conducteurs mais aussi de caoutchoucs, plastiques, acier… En conséquence, en septembre, le constructeur avait interrompu le travail de nuit, essentiellement réalisé par des intérimaires. Aujourd'hui, les nuits ont repris, mais la prudence règne.

 

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À l’heure des transformations du secteur de l’automobile allant vers plus d’électronique et de normes C02, il conviendrait d’analyser finement la situation, estime le syndicaliste Laurent Oechsel (CFE-CGC) : « Il faudrait que la France reprenne la main sur la fabrication de composants pour que les entreprises ne soient plus aussi dépendantes des marchés externes ». Stellantis s’approvisionne, comme beaucoup d’industriels, à Taïwan.

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En pleine pandémie, le groupement d’entreprises du BTP du Pays de Montbéliard, CRRI 2000, a construit Middle Tech à Brognard pour la Société d’économie mixte PMIE, un hôtel d’entreprises où sont hébergés entre autres, le fabricant de tissu pour masques Meltblo et la société de métrologie Trescal. © CRRI 2000


L’approvisionnement en bois est également tendu, et préoccupe depuis un an les entrepreneurs du BTP. Tout comme bien d’autres matières premières qu'ils utilisent pour la construction. L’acier en particulier. Bruno Selli, président de CRRI 2000 à Montbéliard (Doubs), s’étonne encore de cette période hors du commun. A cause de la crise sanitaire, « lorsque les fenêtres arrivaient au bout de nombreux mois, les entreprises étaient à cours de charnières »…
Et en parallèle en raison du Brexit, poursuit-il, la fourniture de papier nécessaire à la fabrication de plaques de plâtre est restée bloquée plusieurs semaines. Difficile dans cette situation d’honorer les commandes et les délais. CRRI 2000 a du décaler son planning à trois reprises, engendrant des retards de livraisons pouvant atteindre 6 mois.


Le prix du bois recyclé a triplé

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CF2P (ex Meubles Parisot) en Haute-Saône, subit la hausse des prix du bois recyclé qui entre en partie dans la composition des panneaux de particules qu’il fabrique pour les industriels du meuble. © P3G Industries

 

Conséquence inévitable de la pénurie, le coût des matières premières a augmenté de façon drastique. La Compagnie Française du Panneau (CF2P) à Lure (Haute-Saône) avait heureusement su faire des stocks de bois au moment des premières difficultés. Le fournisseur de l’industrie du meuble (chiffre d’affaires de 75 millions d’€, 160 salariés) a cependant souffert de l'inflation sur le bois recyclé qu’il intègre dans sa production de panneaux de particules : son prix a été multiplié par trois !
Les produits intermédiaires ont également se sont également envolés, comme la colle dont le prix a augmenté de 60%, témoigne l’entreprise. Le transport a également renchéri les coûts de production, par une conjugaison d’une forte demande et de la rareté des candidats au métier qui conduit à une forte tension sur les salaires.

 

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Des directeurs d’achats qui se transforment en traders

Depuis le début de la crise, les directeurs d’achats des entreprises deviennent des négociateurs en puissance accrochés à leur téléphone et à leur écran d’ordinateur pour repérer les coûts fluctuants des matières premières. Ils ont un oeil aiguisé sur la géopolitique qui peut faire vaciller à tout moment le coût des matières premières et/ou de l’énergie nécessaire à leur acheminement, cherchant en permanence les meilleurs tarifs.
« On négocie en permanence », témoigne Virginie Galland, directrice des achats chez CF2P. « On vérifie les prix grâce à notre suivi des cours des matières premières et nos calculs de coûts. »

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