Avertissement sur le chiffre d’affaires 2023 inférieur de moitié aux prévisions, procédure de sauvegarde pour la filiale Metalliance à Saint-Vallier (Saône-et-Loire) dont il assure n'avoir été informé qu'au dernier moment : le spécialiste des engins de manutention courbe l’échine en ce début 2024. Il paie les conséquences des retards de livraison dans sa commande pour Amazon, la faute aux fournisseurs, selon lui.


Gaussin est entré en zone de turbulence. Le groupe franc-comtois de matériels de transport traverse une passe difficile, pour lui-même et plus encore pour Metalliance, la société de matériels pour travaux souterrains dont il avait pris le contrôle complet en 2020. Basée à Saint-Vallier (Saône-et-Loire), cette filiale a été placée en procédure de sauvegarde, le 23 janvier dernier, par le tribunal de commerce de Chalon-sur-Saône qui a confié le dossier à l’administrateur judiciaire parisien Nicolas Gricourt.

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Depuis Héricourt (Haute-Saône), Gaussin est devenu un acteur de référence des matériels de manutention pour le transport et logistique. © Gaussin


Employant 130 salariés sur les 400 du groupe, elle avait connu une croissance significative au fil de l’enchaînement des contrats, notamment en dernier lieu pour le métro de Singapour et celui de Sydney et fin 2023 pour des tunnels ferroviaires en Italie. Le chiffre d'affaires a grimpé, de 32 millions d'€ en 2020 à 44 millions en 2022. Mais les marges auraient eu du mal à suivre, selon un proche du dossier, et des cas de retards de paiement avaient été rapportés par des fournisseurs. 

La procédure de sauvegarde préserve l’emploi, elle a justement pour objectif de donner du temps à son bénéficiaire pour rétablir sa situation économique et financière et éviter le dépôt de bilan et le redressement judiciaire qui s’en suivrait.

 

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Elle vient faire souffler un vent contraire de plus à sa maison-mère qui lui avait consacré deux augmentations de capital d'un total de 10 millions d'€. Car elle-même est confrontée à ses propres difficultés, à savoir une concrétisation des commandes en chiffre d’affaires loin d’être à la hauteur des prévisions. Gaussin a lancé, vendredi 26 janvier, un avertissement sur son chiffre d’affaires à venir, ainsi qu’elle le doit à ses actionnaires en tant que société cotée (sur Euronext Growth Paris). Car entre l’attendu et le réalisé, l’écart lors de l’annonce officielle le 14 février prochain sera « substantiel », reconnaît le groupe : au lieu des 100 millions d’€ prévus, il devra se contenter de 40 millions d’€ pour 2023. 

 

Des retards chez les fournisseurs du contrat Amazon

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Le groupe emploie aujourd'hui 400 salariés toutes filiales confondues, dont 130 au sein de Metalliance. © Gaussin


Gaussin fournit une information détaillée dans sa « mise à jour des prévisions ». Il met en avant les « retards persistants de livraison de composants par les fournisseurs » pour le contrat qui devait apporter la contribution principale au bilan 2023, les véhicules ATM Full Elec pour « notre client majeur », entendez par-là Amazon. Ces décalages ont « exacerbé » la situation déjà tendue de mise au point des premiers exemplaires. Dès lors, Gaussin sera encore loin du compte des 355 livraisons annoncées de ces véhicules électriques logistiques, essentiellement pour le géant de l’e-commerce : il en est à 40 à fin 2023 dont 14 seront inscrits dans ses comptes 2023.

 

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Par ailleurs, le groupe familial basé à Héricourt (Haute-Saône) indique avoir fait chou blanc en terme de signature de nouvelles licences, « or une seule d’entre elles permet en général de comptabiliser jusqu’à 15 millions d’€ de chiffre d’affaires. »
 

Reprise en main par Christophe Gaussin

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Le constructeur s'est lancé dans la fabrication de véhicules à propulsion électrique, la solution pour laquelle il a décroché son gros contrat d'"ATM Full Elec" auprès d'Amazon. © Gaussin


Il justifie enfin la situation par des problèmes de gouvernance. La charge est sévère contre le directeur général délégué Dmytro Khoruzhyi, nommé en octobre « à la demande de CSG Group » (le client et actionnaire tchèque du groupe à hauteur de 20 %) et révoqué deux mois plus tard. Il annonce la reprise en main du volant par Christophe Gaussin. Le court intermède aurait suffi à « désorganiser totalement » l’entreprise, du fait de « décisions irrationnelles » de l'éphèmère directeur et de la survenance de « conflits internes ».

 

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Ambiance…Celle qui règne avec Metalliance ne semble pas davantage au beau fixe. De façon assez inédite, la direction de Gaussin écrit dans son communiqué avoir été « informée du placement en procédure de sauvegarde », sans « disposer à ce stade de plus d’informations à ce sujet » ! Décryptage donné par un porte-parole que nous avons contacté : Patrick Dubreuille, le directeur général de Métalliance, disposant d’un mandat social lui donnant large latitude, il aurait pris la décision « sans concertation avec la maison-mère, ni avoir fait état d’une telle perspective en amont lors des derniers conseils d’administration, se contentant d’un courriel jeudi dernier pour nous en informer. » L’intéressé n’avait pas donné suite ce lundi soir à notre sollicitation.

Le propriétaire de la PME de Saint-Vallier souhaite pour autant assurer la pérennité de sa filiale, dont il étend les capacités en lui dédiant 8.000 m2 en sus des 20.000 m2 actuels pour ses activités, dans les ex-locaux Konecranes. « L’objectif est bien de garder Metalliance dans notre giron », déclare le porte-parole de Gaussin.

Selon le même interlocuteur, les différentes évolutions des derniers jours restent sans impact sur Navya, le fabricant de véhicules autonomes repris en avril 2023 par Gaussin en association avec le Japonais Macnica.

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