Le département Temps-Fréquence de l’Institut Femto-ST a mis au point un oscillateur « ultra-stable » que la société d’ingénierie qui lui est liée, Femto Engineering, a vendu en six exemplaires à ce jour. L’association d’un cristal de saphir d’une très grande pureté et d’un environnement contrôlé à très basse température rend l'appareil insensible aux perturbations extérieures.
Avec nos portables, montres et horloges qui se remettent à l’heure tous seuls, on croyait que la mesure du temps était une affaire bien réglée. L’Institut Femto-ST (Franche-Comté électronique mécanique thermique optique- sciences et technologies) à Besançon (Doubs) en apporte le démenti.
Son département Temps-Fréquence, associé au CNRS, a mis au point un oscillateur « ultra-stable », explique Christophe Fluhr, ingénieur qui a fait sa thèse sur les oscillateurs cryogéniques, une spécialité du laboratoire bisontin depuis 20 ans, aujourd’hui reconnue dans le monde entier. Depuis, il est chargé de développer le projet baptisé ULISS Cryogenic Sapphire Oscillator (CSO), au sein de Femto Engineering, un centre de développement technologique créée en 2013 pour valoriser les travaux de recherche de l’institut.
Avec l’oscillateur CSO, Femto Engineering revendique l’un de ses deux records mondiaux, le second portant sur le nano-usinage par laser. La performance de l'appareil repose sur une double caractéristique : un cristal de saphir d’une très grande pureté et un environnement contrôlé à très basse température (moins 269°C). Les deux conjugués le rendent insensible aux perturbations extérieures. « C’est l’horloge la plus stable du monde : elle perd une seconde...toutes les 10 milliards d’années », se félicite Christophe Fluhr.
Le premier prototype a été testé en 2012 par l’Agence spatiale européenne pour le suivi des sondes spatiales. Depuis sa commercialisation en 2017, six exemplaires ont été vendus. « Les applications possibles se nichent partout où des stabilités extrêmes sont nécessaires », précise Christophe Fluhr : en particulier l’aérospatiale, la métrologie et la qualification des oscillateurs industriels. Pour l’heure, elles restent cantonnées aux laboratoires de recherche en raison de la taille de l’appareil et du temps de fabrication. Huit mois sont nécessaires à l’assemblage de l’oscillateur, puis deux autres pour le caractériser.
Rapprocher les mondes de la recherche et de l’entreprise

Le projet CSO illustre une méthode désormais bien rôdée pour faire sortir les innovations des laboratoires universitaires. Associée à l’Institut Carnot, Femto Engineering est l’une des « business unit » de l’Université de Franche-Comté avec Bionoveao dans le domaine de la santé.
L’équipe de 12 personnes directement intégrées à des équipes de recherche, à Belfort pour l’énergie, à Besançon pour le temps fréquence, la micro-fabrication et le micro et nano-usinage, fait avancer ses propres travaux vers des applications de marché. Elle propose également aux entreprises, PME et grands groupes, des services d’ingénierie qui découlent des travaux de recherche de l’Institut.
La société d’ingénierie est gérée par la SAS FC’Innov, une fondation ayant comme membres fondateurs l’Université de Franche-Comté et l’Établissement français du sang.
Toujours pour valoriser ses travaux de recherche, Femto-ST encourage la création de start-up, « une par an », précise Daniel Hissel, vice-président en charge du partenariat socio-économique et de l’innovation à l’Université de Franche-Comté, et chercheur spécialiste de l’hydrogène. Utinam, il y a une dizaine d’années et plus récemment AFULudine sont sorties de son giron.
« L’esprit de collaboration pour rapprocher les mondes de la recherche et de l’entreprise » fait aussi entrer dans le cercle la Société d’accélération du transfert de technologie (Satt) Sayens qui détecte des innovations dans les laboratoires et finance leur « maturation ».
Daniel Hissel cite également le Service activités industrielles et commerciales (SIAC) de l’Université qui gère des contrats de recherche. « Nous préparons aussi de plus en plus de diplômes en alternance et souhaitons aller encore plus loin », assure-t-il. Le réseau Alumni des anciens étudiants de l’Université de Franche-Comté et de sa voisine de Bourgogne, constitué sous forme d’une plateforme logicielle, constitue une piste sérieuse pour susciter l’intérêt de potentiels entrepreneurs aux travaux des laboratoires universitaires.

