
INNOVATION. Entre le monde de la recherche et celui de l’entreprise, il y a Semia Alsace. Entre autres bien sûr.
Cette structure forme l’incubateur régional, qui va accompagner quelque temps l’entreprise naissante pour l’aider à devenir déjà moyenne, puis, si possible, grande.
Mode d'emploi et bilan avec son directeur Gilles Grand.
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Pour convaincre Semia, il faut des preuves de viabilité, résume en substance son directeur Gilles Grand.
Mais heureusement, l’incubateur est ouvert aux signes les plus divers de ce critère.
« La preuve du concept est faite ou en passe de l’être : la jeune entreprise recherche ses premiers utilisateurs, elle présente une dimension technologique sans nécessairement avoir déposé de brevet, offre des perspectives financières suffisantes en sachant pertinemment que ce type de sociétés ne dégage pas de chiffre d’affaires à court terme », énumère Gilles Grand.
L’éligibilité au statut de JEI (Jeune entreprise innovante) ou au crédit impôt-recherche fait partie des « faisceaux d’indices favorables », selon l’expression du directeur de Semia. « Mais ce qu’il faut surtout, c’est une équipe, des personnes qui incarnent l’entreprise et son projet ».
Accompagnement au-delà de l'incubation
Contrairement à une idée répandue, il n’est pas nécessaire d’être lauréat du concours national des jeunes entreprises à technologie innovante pour être incubé. Ni d’être adossé à un laboratoire public.

Le terme d’incubateur est souvent associé au fait d’héberger un temps donné une entreprise naissante dans ses locaux. "Ce n’est pas une situation systématique. Et ce serait trop réducteur", estime Gilles Grand.
« La phase d’incubation, une année et demie en général, est relativement courte par rapport à l’ensemble de notre intervention, qui se prolonge après ».
Cette prestation englobe la détection de projets, leur pré-sélection, le soutien à l’élaboration du plan d’affaires et à la recherche de financements, la mise en relation éventuelle avec d’autres partenaires, etc.
« Nous pouvons orienter le porteur vers un accompagnement préalable par les structures de soutien général à la création (comme le Réseau Entreprendre Alsace) et les experts techniques, dont les pôles de compétitivité ».
Autres relais, l’agence régionale Alsace Innovation, les Critt ainsi que Conectus Alsace, la société d’accélération du transfert de technologie (Satt) qui a signé une convention de partenariat avec Semia dès sa constitution en 2012.
Basée à Strasbourg et dotée d’une antenne à Mulhouse, Semia fait partie de la famille de la trentaine d’incubateurs dits Allègre, car créés en 1999 à l’initiative du dit ministre de la Recherche. Elle n’est donc pas plus pionnière que les autres.
115 créations d'entreprises
« Ce qui nous distingue, c’est le fait d’avoir pris très tôt notre autonomie d’organisation par rapport au monde universitaire », relate Gilles Grand.

Depuis 2004, Semia est structurée en une association regroupant le conseil régional d’Alsace, le CNRS, l’Inserm, l’école d’ingénieurs Insa et les universités de Strasbourg et de Haute-Alsace.
Si l’université de Strasbourg abrite son siège, l’incubateur est présidé par la conseillère régionale Sophie Rohfritsch et le budget de 900 000 € se répartit entre la Région, le ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, l’Union européenne et la Communauté urbaine de Strasbourg.
Gilles Grand, quant à lui, n’est pas un universitaire non plus : sa carrière professionnelle s’est déroulée pour l’essentiel à la tête de l’usine alsacienne d’un groupe.
Et le bilan de tout cela ? Depuis 2000, Semia a incubé 144 projets. Pour 115 d’entre eux, ils ont abouti à une création d’entreprise, dont quelque 80 sont toujours en activité.
Une part importance de biotechs
A fin 2012, les entreprises actives représentaient un cumul de 419 emplois et 22,5 millions d’€ de chiffre d’affaires.
Dans les fleurons, et par ordre alphabétique, on peut relever : Alsachim (marquage aux isotopes), Axilum Robotics (robot d’assistance à la stimulation magnétique transcrânienne), Cellprothera (régénération cardiaque), Cooltech (froid magnétique), Defymed (développement d’un pancréas artificiel), Firalis (biomarqueurs), Hakisa (services par Internet aux seniors), Novalix (criblage de molécules pharma), Rhenovia Pharma (recherche contre les maladies neurologiques).

Cette liste suggère la part importante du secteur des biotechs/sciences de la vie dans le portefeuille. Il pèse effectivement 38 % du total des projets, devant les logiciels TIC (20 %), la chimie, l’électronique…
« Ce qu’on peut retenir, c’est que les technologies de l’information et de la communication (TIC) jouent un rôle structurant dans 60 % des projets », commente le directeur de Semia.
Trois catégories principales sont à l’origine des projets soutenus : les chercheurs à 40 %, les ex-salariés d’entreprises privées (45 %) qui l’ont voulu… ou pas, les étudiants et jeunes diplômés à 15 %.
« C’est dans cette dernière famille que nous avons des marges de progrès indéniables », reconnaît Gilles Grand. Pour susciter l’envie, Semia s’est associé à la Fondation de l’université de Strasbourg et à Etena, un groupement régional d’acteurs de soutien aux étudiants, pour organiser un « concours de l’étudiant entrepreneur innovant ».
La première édition a suscité 16 dossiers et désigné trois lauréats qui ont reçu chacun fin janvier un chèque de 10 000 € de la Société générale. Semia les accompagnera pendant un an.
Photos : Christian Robischn et Cellprothera.