Les effectifs, en recul continu, de l’usine Stellantis de Sochaux, principal donneur d’ordre de la filière automobile en Bourgogne-Franche-Comté, se retrouvent en partie chez ses sous-traitants. L’électrification des véhicules remet toutefois en question l’activité des fournisseurs de pièces liées aux moteurs thermiques.

 

L’étude sur la filière automobile en Bourgogne-Franche-Comté où se situe l’usine historique du groupe Stellantis (ex-PSA) à Sochaux (Doubs), que vient de publier l’Insee (*) se situe à une période charnière. Elle analyse des données de 2018, mises à jour en 2020 (provisoires) par la Dreets qui incluent la crise sanitaire, mais ni la pénurie des semi-conducteurs intervenue en 2021 ni le démarrage commercial du véhicule électrique. Elle constate cependant les prémices de la mutation du secteur. En 2020, la baisse des immatriculations s’accélère sous l’évolution des normes de rejet de CO2 alors qu’en 2017, la vente des véhicules repartait à la hausse.

Le contexte explique que l’emploi dans la filière automobile est relativement stable. La précédente étude de l’Insee publiée en 2018, sur des données de 2015, comptabilisait 45.000 emplois salariés hors intérim, soit un tiers de l’emploi industriel de Bourgogne-Franche-Comté. L’étude réactualisée révèle le chiffre de 44.700 salariés hors intérim. Peu de pertes d’emploi donc.


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Ceci s’explique par le fait que, pendant la crise sanitaire, les entreprises ont pu sauvegarder leurs emplois grâce à un recours massif aux dispositifs d’activité partielle. Au deuxième trimestre 2020, plus de 6 salariés sur 10 en ont bénéficié. « Sans ce dispositif, environ 5.000 emplois en équivalents temps plein auraient été supprimés », commente Florent Ovieve, responsable de l’étude de l'Insee.

Dans le détail, on constate que l’emploi a quand même souffert. Conjugaison de l’arrêt de l’activité pendant la crise sanitaire et du recul des ventes, l’intérim a servi de variable d’ajustement. De 9.300 entre 2015 et 2018, le nombre d’intérimaires est tombé fin 2020, à 5.900, un niveau nettement inférieur à la période d’avant-crise (- 30,8 % par rapport à fin 2018).

Le chiffre relativement stable des effectifs ne doit pas cependant cacher que l’industrie automobile n’est plus aussi créatrice d’emplois qu'il y a une décennie. Hors intérim, le nombre d’embauches a été divisé par deux, 3.300 CDD/CDI en 2020 contre 6.700 en 2018.


Rencontrer tous les sous-traitants et fournisseurs dans les 18 mois

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Un équipementier automobile sur deux est implanté sur les bassins d’emplois de Montbéliard, Besançon et Belfort, autour de l’usine Stellantis de Sochaux (Doubs). © Insee


L'usine de Sochaux autour de laquelle gravitent de nombreuses activités concentrées dans le nord Franche-Comté – fabricants d’échappements, de pare-chocs, de pièces de fonderie, de fixation ainsi que des machines-outils et des outillages – employait 11.950 salariés en 2018, un effectif en baisse de 18% depuis 2015. Le niveau a encore reculé entre 2018 et 2020 de 12,3% pour se situer aujourd’hui à environ 6.800.

Ces pertes d’emplois résultent d’un plan de départ volontaire mis en place avec les congés seniors, les congés mobilité ou encore les congés de reconversion/création d’entreprise. Elles sont aussi la conséquence d’une forte robotisation obtenue par un plan d’investissement de 200 millions d’€. À preuve, selon l’étude, malgré une baisse de ses effectifs, Stellantis a produit en 2018 à Sochaux, plus de voitures qu’en 2016 (500.000 véhicules contre 350.000).

Mais tous ces emplois ne sont pas perdus. Beaucoup se retrouvent chez les équipementiers par le simple mécanisme de la politique d’externalisation de Stellantis dans son projet Sochaux 2022, lancé en février 2017. Le recentrage du constructeur sur la seule activité d’assemblage de voitures a conduit à une « zone d’implantation fournisseurs », un parc d’entreprises localisé en proche périphérie des lignes de production de Stellantis.



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L’électrification des véhicules va accélérer le mouvement sans qu’il soit possible de le chiffrer. Mais la Bourgogne-Franche-Comté va en souffrir moins que sa voisine Grand Est, analyse l’Insee, car il n’y a pas d’usine de moteurs dans la région. Les conséquences restent significatives. « Dans une voiture électrique, il y a 4 fois moins de pièces en acier (pièces moteurs et boîtes de vitesse) que dans une voiture à moteur thermique », précise Emilie Vivas de la Dreets (Direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités). Cela présage de grosses difficultés chez les fabricants d’échappement, les emboutisseurs, dans les fonderies aussi qui pourront toutefois saisir l’opportunité de passer de l’acier à l’aluminium.

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L’évolution de l’emploi de la filière automobile en Bourgogne-Franche-Comté, par métiers. © Insee


« C’est la raison pour laquelle l’Etat et la Région ont bâti un Plan Automobile », explique Julie Roussoulières, chargée de mission à la Préfecture. « Nous allons rencontrer tous les sous-traitants et fournisseurs dans les 18 mois pour les aider à adapter leur outil de production à de nouveaux débouchés, avec du conseil ou des aides financières ». De nombreuses entreprises ont déjà opéré une polyvalence. Elles travaillent désormais pour d’autres secteurs d’activités tels que l’aéronautique, le médical ou la défense, de façon à être moins dépendantes des constructeurs automobiles.

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Forges et emboutisseurs font face à des difficultés structurelles, en plus de la crise sanitaire, à l’exemple de MBF, dans le Jura, qui a fermé fin 2021. Ces entreprises sont concurrencées par des établissements situés au Portugal, en Espagne, en Turquie et en Europe de l’Est, où le coût de la main d’œuvre est moins élevé. © MBF

 
- L’étude complète est téléchargeable sur le site de l’Insee ici

- Les données sont accessibles librement sur Decidata, nouvel outil numérique réalisé par la CCI Bourgogne-Franche-Comté avec un outil de recherche par territoire, activités et emplois.

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