L’Institut Européen des Antioxydants mesure l’activité antioxydante de l’épiderme pour dépister le coronavirus. RD-Biotech fournit la matière première d’un test belge et participe à un vaccin allemand. Les salariés de Thurmelec reprennent et emmènent des pièces à la maison. Domain Therapeutics ouvre au nancéien Harmonic Pharma, la librairie de molécules de sa nouvelle filiale Prestwick Chemical pour un traitement contre le Covid-19. Archeon adapte sa solution d’intelligence artificielle aux besoins des services de réanimation. Les assurances Crédit Mutuel et Crédit Agricole compensent les pertes d’exploitation liées au Covid-19.
Tests de dépistage, traitements, vaccins, respirateurs : la mobilisation des entreprises de l’Est monte en puissance sur tous les fronts.
• La biotech nancéienne IEA identifie un nouveau facteur de dépistage du Covid-19
Le nancéien IEA (Institut Européen des Antioxydants) promeut une technologie de dépistage du coronavirus complémentaire aux deux méthodes existantes : le test nasal qui identifie la présence du virus et le test sanguin qui détecte les anticorps produits par une personne infectée.
Les technologies mise au point par la start-up de 10 personnes avec le CHU de Liège (Belgique) mesurent l’activité antioxydante au niveau de la peau et dans les tissus biologiques. Jusqu’à présent employées par les industries cosmétique, pharmaceutique et agro-alimentaire, elles pourraient avoir des applications dans le cas du Covid-19, car « selon des études récentes, le stress oxydant jouerait un rôle important dans les dysfonctionnements respiratoires qui entraînent le décès du patient », note Smail Meziane, président et cofondateur d’IEA.
La confirmation de ces constatations permettrait d’utiliser ces procédés sur deux plans : un premier tri permettant d’identifier les personnes porteuses du virus, ainsi qu’une prédiction de l’évolution positive ou négative de la maladie. La société a toutefois besoin d'échantillons d'urine, de salive ou sang de patients Covid-19, en vue de qualifier ses algorithmes. A noter que sa filiale Oxystress Technologies à Vierzon (Cher) dispose d'une technologie non invasive, sous forme de patchs cutanés, permettant de mettre en œuvre des tests. Philippe Bohlinger.
• RD-Biotech fournit la matière première d’un test belge et participe à un vaccin allemand

RD-Biotech
Créée en 2002 à Besançon par Philippe Dulieu, Jean-François Musard et Jean-Luc Schlick, trois chercheurs du laboratoire de biochimie de l’Université de Franche-Comté, la société RD-Biotech, 28 salariés, est engagée dans deux projets qui pourraient bien faire avancer la prévention du Covid-19.
Le premier en tant que fournisseur de la matière première d’un test de diagnostic rapide de la maladie, pour l’un de ses clients historiques, la société belge Coris BioConcept. Spécialisée dans l’ingénierie des anticorps, RD-Biotech a designé et produit ceux qui permettront à ce test de type « test de grossesse » mis au point par son partenaire belge et déjà commercialisé en Belgique.
L’entreprise bisontine, qui a déjà fourni la matière première critique nécessaire à un million de ces tests, travaille par ailleurs au développement d’un vaccin de nouvelle génération, dit « à ARN » (*), avec un autre partenaire industriel historique, cette fois une entreprise allemande. « Une dizaine de personnes sont mobilisées pour produire l’ADN nécessaire aux molécules qui serviront à élaborer le futur vaccin », indique Philippe Dulieu. Monique Clémens
(*) qui stimule les défenses immunitaires de l’organisme vis-à-vis des cellules malades.
L’interruption pour cause de Covid-19 n’aura duré que deux semaines et demi chez Thurmelec. « La production que nous avions arrêté le 19 mars a repris dès le 7 avril », relate Guillaume Maurer, directeur de la PME électronique familiale de Pulversheim (Haut-Rhin). L’aléa imprévu a privé l’entreprise de 400.000 € de chiffre d’affaires, qu’elle rattrapera, assure le dirigeant : « C’est un décalé dans le temps, nous n’avons pas subi d’annulations de commandes, seulement des reports ».
Dans un secteur qui a été sensible aux ruptures d’approvisionnement, l’entreprise d’électronique indique avoir traversé cette vague – qu’elle espère unique – sans trop de heurts, grâce à sa politique de forte diversification des fournisseurs, qui a été stimulée par des tensions passées en la matière.
Sur les 47 salariés de Thurmelec, deux restent au chômage partiel, 18 collaborateurs des bureaux d’études et services support sont en télétravail. Les autres employés, de production, ont repris le chemin des ateliers, « selon des règles de grande souplesse dans les horaires » souligne Guillaume Maurer, pour limiter les contacts et concilier avec les impératifs personnels.
Certains emmènent même à la maison des composants et sous-ensembles pour les fabriquer de chez eux… comme d’autres embarqueraient leur ordinateur.
Mathieu Noyer
• Domain Therapeutics participe à la recherche de traitements contre le Covid-19 avec sa nouvelle filiale Prestwick Chemical
La biotech strasbourgeoise spécialisée dans le développement et la découverte de nouvelles molécules thérapeutiques, a donné accès à la librairie de molécules de sa filiale Prestwick Chemical à Harmonic Pharma, une société nancéenne spécialisée dans le repositionnement de molécules thérapeutiques pour trouver de nouveaux traitements contre le Covid-19.
Domain Therapeutics avait acquis en février dernier Prestwick Chemical et Neurofit (deux ex-filiales de la société australienne Bionomics). En absorbant leurs passifs, cette acquisition constitue une opération comptable neutre sans investissement initial de la part de Domain Therapeutics. L’arrivée de Prestwick Chemical au sein du groupe double ses capacités en chimie médicinale ; l'intégration de Neurofit, lui permet de développer de nouvelles approches pharmacologiques in vivo.
« L’ajout de ces nouvelles capacités optimisera significativement l’expansion de notre portefeuille de projets et renforcera notre capacité de partenariat », déclare Pascal Neuville, directeur général de Domain Therapeutics. Ainsi, la société sera en mesure de nouer des collaborations plus importantes avec des partenaires pharmaceutiques.
Ces opérations de croissance externe valorisent aussi la biotech alsacienne auprès de futurs investisseurs. En janvier dernier, elle avait lancé une levée de fonds d’une trentaine de millions d’€ pour réaliser de nouveaux programmes de recherche et financer de nouvelles start-up. L’objectif était de finaliser cette levée de fonds en juin, mais les circonstances actuelles feront sûrement repousser l’échéance en septembre ou octobre.
L’acquisition de Prestwick Chemical et Neurofit a fait passer l’effectif de Domain Therapeutics de 57 à 100 salariés (filiales comprises). Mais avec la crise du covid 19, depuis le 17 mars, tous les techniciens et ingénieurs du groupe sont au chômage partiel et les chefs de projet sont en télétravail. « Nous organisons des formations et nous préparons le redémarrage », affirme Pascal Neuville. Julie Giorgi
• Archeon adapte sa solution d’intelligence artificielle aux besoins des services de réanimation

La pandémie de Covid-19 a réorienté le plan de commercialisation du dispositif médical EOlife, conçu au départ par la start-up bisontine Archeon pour guider les premiers secours dans le dosage de la ventilation lors de la réanimation cardiaque. Désormais à la tête d’une équipe de 9 salariés, ses fondateurs, Alban de Luca et Pierre-Edouard Saillard, qui préparaient la sortie de leur produit pour septembre 2020, ont planché sur une version adaptée à la ventilation de patients en réanimation.
« Nous avons démarré ces travaux le 10 mars, à la demande du Pr L’Her, du CHU de Brest, qui nous suivait sur les réseaux sociaux. Nous lui avions envoyé un prototype à tester, il nous a demandé des modifications, notamment concernant des informations chiffrées sur l’écran, et nous lui avons fourni une nouvelle version logicielle en une semaine, avant d’affiner le produit », explique Alban de Luca. EOlife, qui s’adapte à n’importe quel respirateur, vient dans ce cas en complément de l’utilisation de ventilateurs de premiers secours afin d’effectuer un monitoring précis.
Sa solution d’intelligence artificielle permet d’auto-adapter la dose d’oxygène à envoyer, pour une réponse plus efficace, et dans le cadre de la crise a bénéficié d’une dérogation d’autorisation de mise sur le marché anticipée par l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé). Monique Clémens
Les assurances Crédit Mutuel et Crédit Agricole compensent les pertes d’exploitation liées au Covid-19
Alors que le risque de pandémie n’est pas couvert par les garanties pertes d’exploitation des assurances, les groupes du Crédit Mutuel et Crédit Agricole ont tout de même choisi de compenser une partie de ces pertes à leurs clients ayant souscrit une assurance multirisque professionnelle avec perte d'exploitation. Les deux assureurs mobilisent chacun près de 200 millions d’€.
L’aide sera versée dès début mai et prendra la forme d'un versement correspondant à une estimation forfaitaire de perte de revenus de chaque secteur économique pendant cette période.
« On ne va pas ergoter sur le droit, on agit (…) Si on discute pendant six mois, les clients auront disparu et à la fin, tout le monde sera perdant. Le commerce de proximité, les artisans, tout ce tissu économique fondamental, on doit le préserver », avait affirmé Nicolas Théry, le président du groupe Crédit Mutuel sur France Inter le 22 avril. Dans la soirée, le Crédit Agricole s’était aligné sur cette décision. Julie Giorgi