À 30 ans, qu’il fêtera le 21 novembre, après une petite baisse de forme en 2008 due à la crise des télécoms, le spécialiste des résonateurs à quartz, oscillateurs et autres filtres piézoélectriques est en plein boum. Le savoir-faire d’AR Electronique s’exporte dans l’aéronautique et la défense mondiales, et son équipe R&D planche sur la technologie de demain : les dispositifs à ondes de surface.
C’est le quartz, ce minéral transparent et incolore, qui donne la stabilité de fréquence à un système qui oscille. Utilisé dans l’horlogerie, « il permet aussi de synchroniser des systèmes radios et télécommunications qui vont vibrer d’une même fréquence », explique Emmanuel Girardet, le président et l’un des deux fondateurs de AR Electronique, avec Philippe de Joffrey, directeur administrateur et financier.
AR Electronique, c’est l’une des trois entreprises issues du savoir-faire microtechnique local qui fêteront ensemble leurs 30 ans, le 21 novembre, à ENSMM (École Nationale supérieure de Mécanique et des Microtechniques) à Besançon. Dans Traces Ecrites News, nous vous avons déjà parlé dernièrement d’Imasonic, spécialiste des transducteurs et sondes ultrasonores puis de Digital Surf, qui s’est fait un nom dans l’analyse de surfaces microscopiques.
Chez AR Electronique, produits et savoir-faire relèvent tout autant de la science-fiction : des alignements de quartz dans tous leurs états, des étuves, des équipements de tests, de mesure, d’usinage ionique, d’électrolyse, et une salle grise dans laquelle œuvrent d’indispensables petites mains au savoir-faire unique.
Spin-off du LPMO, Laboratoire de Physique et Métrologie des Oscillateurs (*) qui fait référence dans le temps-fréquence, AR Electronique avait démarré en concevant et fabriquant des équipements de tests et de mesure pour le CNES et d’autres gros laboratoires. « Mais nous nous sommes vite orientés vers des modules de fabrication autour du quartz, et notamment des oscillateurs », explique Emmanuel Girardet.
Très vite aussi, l’entreprise avait compris qu’elle aurait intérêt à fabriquer elle-même ses quartz. Un métier que maîtrisait une petite société parisienne à laquelle AR Electronique s’était associée quelques années plus tôt, et qui avait fini par fermer. L’équipe fut reprise par la société bisontine, en 1996, qui créa une filiale de fabrication de quartz à Sartrouville, « dans une ex-pizzeria », se souvient Emmanuel Girardet. Mais au déménagement dans les nouveaux locaux, en 2008, l’activité avait été rapatriée à Besançon. « Fabriquer nos quartz nous avait permis d’aborder de nouveaux marchés, de passer de l’électronique professionnelle à l’aéronautique et à la défense. »
L’aéronautique, la défense et des débuts dans le spatial

Aujourd’hui, les oscillateurs pour les secteurs aéronautique et de la défense représentent 80% de l’activité d’AR Electronique. Ses clients s’appellent Thalès, Safran, Leonardo, Airbus, Hensoldt, BAE System ou Honeywell, et l’export atteint 80% d’un chiffre d’affaires de 3,5 millions d’€ en 2018. Le secteur spatial, abordé il y a une dizaine d’années, représente déjà 5%. « Un pari un peu fou », avoue le dirigeant, mais Airbus a fait confiance à la petite entreprise et ses oscillateurs sont maintenant en cours d’intégration dans ses satellites.
Dans le cadre des applications « new space », AR Electronique a aussi des projets avec le Centre national d'études spatiales et l’Agence spatiale européenne pour ses produits dérivés de l’aéronautique « que nous avons spatialisés en les protégeant des radiations. »
Trente ans après sa création à École-Valentin, dans l’agglomération de Besançon, ils sont aujourd’hui 43 salariés dans les vastes locaux de la rue La Fayette, sur le parc d’activité bisontin éponyme. Entre-temps, la PME, toujours indépendante, avait déménagé deux fois, pour suivre un développement régulier jusqu’en 2008. Cette année-là, alors qu’elle s’installait dans ce bâtiment flambant neuf, l’activité avait connu un trou d’air provoqué par la crise des télécoms. De 45 personnes, l’équipe était retombée à 35. Ce qui n’avait pas empêché AR Electronique et ses 15 ingénieurs et docteurs de poursuivre leurs travaux de recherche.
Le redémarrage est venu en 2018, et l’entreprise est « à fond » depuis début 2019. Le chiffre d’affaires devrait atteindre 5 millions d’€ cette année, avec une belle visibilité pour la suite. Prochaines étapes : un premier pied sur le marché nord-américain et, côté technologie, la poursuite de travaux avec les laboratoires de Femto-ST, l’ENSMM (École Nationale supérieure de Mécanique et des Microtechniques) et la start-up Frec[n]sys sur des dispositifs à ondes de surface (SAW), dans le cadre d’un projet soutenu par l’Europe et la Direction Générale de l’Armement (DGA). Une rupture technologique sur laquelle la société bisontine travaille depuis 5 ans.

(*) Le LPMO, Laboratoire de Physique et Métrologie des Oscillateurs dirigé il y a trente ans, par Jean-Jacques Gagnepain est une composante majeure de Femto-ST créé en 2004.

© Laurent Cheviet
