EVASION/VIN. Pour seulement 39 € par personne, pourquoi se priver d’une enrichissante balade, doublée d’une savoureuse dégustation, dans les vignes près de Beaune, capitale des vins de Bourgogne ?
Un œnologue de l’École des vins de Bourgogne explique pourquoi ces vins sont uniques au monde et prospèrent dans un paysage si particulier, avec une triple preuve dans le verre en fin de circuit.

Ils sont deux couples en ce jour de juillet à être réunis à l’entrée du parc de la Bouzaize à Beaune (Côte-d'Or) auprès de Nicolas Tacquart, guide œnologue à l’École des vins de Bourgogne.
Isabelle et Hervé, Lyonnais d’adoption mais Vosgiens d’origine, bénéficient d’un cadeau de leur enfants. Ce couple aime le vin, notamment ceux du Beaujolais et de la vallée du Rhône, et veut en découvrir d’autres, tout spécialement ceux de Bourgogne.
Lucas et Jade vivent à Thionville (Moselle) et travaillent au Grand-Duché du Luxembourg. Ils aimeraient tous les deux apprécier le vin en mettant d’autres mots que : j’aime ou je n’aime pas. Savoir comment éveiller les sens, trouver une senteur, apprécier un arôme…, bref se faire plaisir.
L’ombre rafraîchissante des grands arbres centenaires de ce magnifique espace public beaunois de 5 hectares où la rivière Bouzaize, qui traverse en souterrain les célèbres Hospices, prend sa source, fait du bien.

Le début de la balade laisse très vite place à un plein soleil et ses rayons qui dardent, mais le paysage est grandiose et se situe, au sein des premiers crus entre Les beaune-Teurons et les beaune-Les-Grèves, avec en fond de décor la colline de Corton et ses grands crus.
Nicolas Tacquart, aussi convivial que volubile, commence ses explications par l’histoire et la géologie qui donnent des bourgognes si particuliers : les Romains inventeurs du précieux nectar - mais aux antipodes de ce que l’on boit aujourd'hui -, les Gaulois qui ont imaginé le tonneau, la poussée des Alpes, la création des failles et l’émergence des coteaux de Nuits et de Beaune, les fameuses Côtes.
Un résumé de 2000 ans d’histoire
Le guide oenologue enchaîne, appréciant un public encore captif, par l’épopée monastique et la querelle entre la fastueuse Cluny et l’ascétique Cîteaux, la saga des Ducs de Bourgogne, dont Philippe II, dit le Hardi, qui fit interdire la culture viticole du « déloyal » gamay par une ordonnance de 1395 et de tous les cépages autres que le pinot (ndlr : pour les rouges).
Personne n’ose encore questionner notre accompagnateur si savant, tant il maîtrise son sujet chemin faisant. Et puis, on entre dans le concret, le cycle de la vigne en plein cœur d’une ancienne carrière où prospère une parcelle.
Nicolas explique la taille Guyot, le pliage, l’ébourgeonnage, le relevage, le rognage, l’effeuillage, la vendange en vert et ce, au cœur même des rangs de vignes. A une question sur le traitement phytosanitaire, il digresse habilement sur la culture raisonnée, le bio et la biodynamie.

Il montre surtout le savoir-faire des vigneron(nes) qui, avec l’alchimie du terroir, donne 1247 Climats de Bourgogne, inscrits depuis juillet 2015 au patrimoine mondial de L’Unesco.
Nous en sommes à déjà plus de deux heures, les langues se délient, les questions fusent. Jade interroge : « On m’a toujours dit qu’un très bon vin était issu d’assemblage. »
Un partage bachique
Au lieu de pousser des cris d’orfraie sur pareil anathème en Bourgogne, Nicolas Tabard reconnaît la qualité de nombreux vins partout dans le monde. Sommelier de formation, avec une expérience dans de très grandes maisons, il précise la spécificité des vins régionaux avec ses deux cépages : le chardonnay pour les blancs, le pinot noir pour les rouges, la hiérarchisation des vins jusqu’aux grands crus, l’interdiction d’assembler sous peine de déclassement, la notion de millésime, les 84 appellations d’origine protégée ou controlée... On boit ses propos, tant il est didactique.
Arrive enfin le moment très attendu, la dégustation de trois vins. Il s’agira d’un côte d’Auxerre (blanc), d’un mâcon-uchizy (blanc) et d’un beaune 1er cru Clos du Roi (rouge), tout droit sortis de la cave du Bureau Interprofessionnel des Vins de bourgogne (BIVB), dont l’école des vins est une filiale.
Nicolas donne les repères pour bien déguster, déjà avec l’œil : la brillance, la limpidité ; puis de manière olfactive : le premier nez qui livre la famille aromatique dominante, florale, fruits rouges, épices…, et le second nez, après aération du vin en le faisant tourner dans le verre, qui lui exhale les arômes issus de la fermentation.
En dernier lieu, la mise en bouche où après avoir grumé le vin (faire entrer de l’air dans la bouche), toute la magie d’un vrai nectar se révèle au palais en une mosaïque de sensations. Ici les mots sont simples et expressifs, aux antipodes de tous ces pseudo-professionnels qui font du vin un amphigouri pour masquer bien des fois un manque crucial de compétence.
L’œnologue est resté pas moins de trois heures avec ses participants qui l’applaudissent et le félicitent chaleureusement après un clap de fin si heureux. Quand on aime, on ne compte pas...


Bel article... A sa lecture j'étais replongé dans cette très belle et très intéressante balade. J'espère que votre article suscitera des envies. Cordialement Herve