VINS/CÔTE-D'OR. Alors que Bordeaux vient d’inaugurer une cité des vins de 81 millions d’€ ouverte sur le monde, que Dijon veut aller vite pour sa cité de la gastronomie et du vin, Beaune peine au consensus pour la sienne, uniquement axée sur ses terroirs.
Le projet public d’Alain Suguenot, le député-maire de Beaune, ne remporte ni l’adhésion de la Confédération des Appellations et des Vignerons de Bourgogne (CAVB) ni celle du Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne (BIVB) où siègent à parité les maisons de négoce et les viticulteurs.
Le point de vue des deux parties.
Dire qu’il y a quelques crispations entre la mairie de Beaune et les professionnels de la vigne et du vin relève de l’euphémisme. En cause : le projet de cité des vins inséré dans un projet d’urbanisme plus global défendu par Alain Suguenot, le député-maire, sur un terrain d’une dizaine d’hectares à la sortie sud de l’autoroute A6.
En témoigne la conférence de presse du vendredi 1er juillet, organisée sans le moindre représentant des viticulteurs comme des négociants qui n’étaient d’ailleurs même pas informés.
« J’ai repris les choses en main, car le classement des Climats, de Dijon à Beaune, au patrimoine de l’Unesco nous oblige à avancer vite sur la création d’un centre d’interprétation avant décembre 2017 sous risque de perdre ce label qui devrait nous permettre d’accueillir 400.000 visiteurs de plus », argumente l’élu.
Alain Suguenot a donc mobilisé les institutions publiques pour financer ce centre, qui dans son esprit correspond à la future la cité des vins de Bourgogne, d’un coût de 12 à 14 millions d’€.
Outre la mairie beaunoise et sa communauté d’agglomération (3 millions d’€), la région Bourgogne Franche-Comté et le Conseil départemental de la Côte-d’Or - François Sauvadet, son président était d’ailleurs présent à la conférence de presse - apporteront chacun la même somme.
Les fonds européens comme l’Etat pourraient, de leur côté, verser un million chacun. Reste la participation du Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne (BIVB), arrêtée à l’origine à 2 millions d’€ pour agencer l’intérieur du centre d’interprétation.
Une architecture contemporaine
« Nous n’en sommes plus là, car il s’agit maintenant d’un projet d’aménagement de quartier avec un espace réservé au vin et ce n’est en rien ce que nous défendions, c’est-à-dire un fil rouge qui invite à apprécier toutes les appellations bourguignonnes », argument André Ségala, directeur du BIVB.

Même son de cloche chez Jean-Michel Aubinel, président de la Confédération des Appellations et des Vignerons de Bourgogne (CAVB). « Nous voulons une authentique cité des vins qui ne se limite pas à faire connaître ceux de Dijon à Beaune par un tourisme captif, mais destinée à faire à découvrir toute la Bourgogne viticole, en liaison avec des cités dites filles, à Mâcon, Chablis et Chalon ».
Cette opposition s’inscrit de surcroît dans un climat, sans mauvais jeu de mot, qui n’est favorable économiquement à de nombreux viticulteurs éprouvés par un épisode de gel assassin, alors qu’il manque cruellement de vins à vendre et les esprits s’échauffent.
L’autre volet de l’opération défendue par Alain Suguenot relève de la promotion privée à hauteur d’une quarantaine de millions d’€ avec un potentiel de 300 créations d'emplois.
Elle prévoit la réalisation d’un hôtel 5 étoiles (sans doute aussi un second dans la catégorie quatre étoiles), d’une grande halle baptisée Rabelais, de 1800 m2 et 1200 places, faite de bandes de verre et d’acier entrelacées, pour des événements comme de grands banquets, expositions temporaires ou autres grosses manifestations.

On trouvera aussi des restaurants, dont un éphémère pour accueillir de grands chefs en résidence, et une galerie commerciale en anneau autour du centre d’interprétation.
« Avouez que cela s’annonce pertinent dans la première ville touristique de l’Est, en dehors de Strasbourg, pour drainer une clientèle étrangère à fort pouvoir d’achat sur un site résolument écologique : pas de voiture, coulée verte en bordure de la rivière Bouzaise et doté d’une architecture très contemporaine dont le concours devrait être lancé début 2017 », argumente Alain Suguenot.
L’ensemble s’il n’est pas remis en cause, notamment par des recours administratifs, devrait ouvrir fin 2018.
Autre illustration et photo fournies par la mairie de Beaune.