Au terme d’un appel à concurrence, l’exploitation de onze ports en bordure de la Moselle vient d’être confiée à un groupement composé de la CCI du Grand Nancy, de la Compagnie Française de Navigation Rhénane (CFNR Transport) et d’ArcelorMittal. Le consortium a annoncé, ce 6 juillet, son intention d’investir 30 millions d’€ principalement dans la remise à niveau des infrastructures du nord lorrain.
La rivière Moselle forme un corridor majeur connectant les bassins économiques de Thionville, Metz et Nancy aux grands ports de la mer du Nord. Pas moins de 4,2 millions de tonnes de marchandises y transitent chaque année. Cet affluent du Rhin ouvre un nouveau chapitre de son histoire dans sa partie française, 158 km de voie d’eau canalisée entre la frontière luxembourgeoise et le sud de Nancy.
A partir du 1er janvier 2021, onze ports publics et privés en bordure de la Moselle confieront leur exploitation à un opérateur privé composé de la CCI du Grand Nancy, du sidérurgiste ArcelorMittal et du transporteur fluvial CFNR (Compagnie Française de Navigation Rhénane) Transport (groupe Rhenus).
Le 6 juillet dernier, à l’occasion de la présentation de ce groupement, François Pélissier, président de la CCI du Grand Nancy, a souligné la portée « historique » de l’évènement qui s’accompagne d’un investissement de 30 millions d’€. « Cette opportunité nous permettra d’instaurer une offre de services unifiée sur l’ensemble de la Moselle, de générer de l’attractivité et des possibilités d’implantation d’activités économiques sur les emprises foncières des ports. »
Au terme d’un marathon de deux ans, les trois acteurs ont remporté l’avis d’appel public à concurrence lancé par la Région Grand Est et Voies navigables de France (VNF) regroupés au sein du Syndicat Mixte Ouvert des ports lorrains (SMO). « Ce projet s’inscrit dans le temps long, afin de renforcer la compétitivité de nos entreprises sur ce corridor européen de transport », a souligné Rémy Sadocco, président du SMO.
« La Moselle est l'une des rares infrastructures en France permettant la navigation à grand gabarit au même titre que le Rhin et la Seine, mais ses capacités demeurent largement sous utilisées », a rappelé Pascal Gauthier, directeur territorial de VNF Nord-Est.
Pour sa part, le préfet de Meurthe-et-Moselle, Eric Freysselinard, a fait référence à la rivalité légendaire entre Nancy et Metz, pour souligner que le projet réalisait « l’union de la Lorraine sous les auspices de la région Grand Est. »
Des investissements concentrés sur le Nouveau port de Metz et le port de Thionville-Illange

En effet, les plus importantes infrastructures portuaires se situent dans le nord lorrain, avec le Nouveau port de Metz, premier port fluvial céréalier de France, ainsi que le port de Thionville-Illange, spécialisé dans les produits métallurgiques. « L’essentiel du budget d’investissement de 30 millions d’€ va porter sur la remise à niveau de ces deux navires amiraux », a précisé François Pélissier. Les deux tiers de cette enveloppe devraient être mobilisés les deux premières années.
Pour ce faire, la CCI du Grand-Nancy entend notamment capitaliser sur l’expérience acquise dans la relance du terminal rail-route de Champigneulles (Meurthe-et-Moselle). Jean-Marc Thomas, directeur-général de CNFR Transport a d’ailleurs rappelé l’importance d’une offre de transport multimodale, « un industriel devant répartir ses risques entre les modes routier, ferroviaire et fluvial ». CFNR exploitera les terminaux de vracs (céréales, produits métallurgiques, etc.) et SE3M, filiale de la CCI, les terminaux à conteneurs maritimes.
Le premier sidérurgiste mondial, ArcelorMittal apporte quant à lui, ses deux ports privés ainsi que 20 hectares de foncier et une réserve de 70 hectares. « Notre potentiel foncier peut contribuer au développement économique de la région », a noté Antoine Solimine, directeur des relations institutionnelles d’ArcelorMittal-Grand Est.
De quoi prolonger l’histoire du transport de marchandises sur la Moselle dont la canalisation, achevée en 1964 entre Coblence (Allemagne) et Neuves-Maisons (Meurthe-et-Moselle), constitue une des réalisations phares de feu la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), l’ancêtre de notre Union européenne.
neuf ports publics et deux privés
L’opération a été conduite sous l’égide de la Région Grand Est et de VNF, selon le même modus operandi que pour les ports de Colmar et de Mulhouse, dans le Haut-Rhin. Le Syndicat Mixte Ouvert des Ports lorrains (SMO) constitué de la Région et de VNF a confié dans le cadre d’une délégation de service public de trente ans la gestion des concessions de onze ports lorrains à une société d’économique mixte à opération unique (SemOp), une nouvelle forme d’entreprise publique locale créée par la loi du 1er juillet 2014. Cette instance de gouvernance est détenue à 15% par la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), à 34% par la SMO et 51% par la SAS des Ports de Lorraine, son opérateur économique. Cette SAS est, elle, détenue par la CCI Grand Nancy (55%), CFNR (30%) et ArcelorMittal (15%).

L’opération s’est faite en deux temps. En janvier 2019, le SMO avait confié à CFNR la concession des ports de Thionville-Illange, Nouveau Port de Metz et Metz-Mazerolle pour deux ans, la CCI de Moselle ne souhaitant pas se réengager. Cette option a permis de préparer la nouvelle gouvernance au sein de la SemOp où ces trois ports publics rejoignent Nancy-Frouard, Toul-Valcourt, Belleville, Maxéville, Cattenom et Kœnigsmacker, ainsi que les deux ports privés d’ArcelorMittal (Mondelange et Illange).