
VIN. La 100ième appellation d’origine des vins de Bourgogne rompt l’orthodoxie du mono-cépage sans assemblage et s’étend jusqu’au Beaujolais.
Produit d’entrée de gamme, Coteaux Bourguignons répond à la forte demande d’un vin de marque autour de 8 euros.
Les plus grands négociants misent sur ce nouveau produit pour doper leurs ventes et attirer une nouvelle clientèle plus jeune ou moins initiée.
Enfin, un bourgogne pas cher ! Coteaux Bourguignons, l’une des 100 appellations d’origine régionale ne devrait pas être vendue plus de 8 €. « C’est un produit d’avenir, et pas seulement en raison de son prix, mais aussi par l’image qu’on veut lui donner pour séduire une clientèle plus jeune ou moins initiée », déclare Frédéric Drouhin, président de l’Union des maisons de vins de Bourgogne, qui fédère la plupart des négociants, et dirigeant à Beaune (Côte-d’Or) de la société Joseph Drouhin (34,5 millions d’€ de chiffre d’affaires, 100 salariés).
Atypique aussi, ce vin rompt avec l’orthodoxie séculaire du mono-cépage : pinot noir uniquement pour les rouges, aligoté ou chardonnay pour les blancs, doublée d’une interdiction de tout assemblage. Son cahier des charges assez souple prévoit que les rouges peuvent être élaborés, suivant un dosage libre, à partir du pinot noir et du gamay, le cépage traditionnel des beaujolais, et qu’en blanc, le mariage aligoté, chardonnay, voire melon est autorisé.
« Nous reconstituons ainsi la grande Bourgogne viticole avec l’autorisation d’en faire dans le département du Rhône, terroir des beaujolais », s’enthousiasme le Beaunois Pierre-Henry Gagey, P-DG de Louis Jadot (63 millions d’€ de chiffre d’affaires, 150 personnes).
2014, année test
Créée en 2011 pour remplacer l’AOC Bourgogne Grand Ordinaire au nom peu porteur, Coteaux Bourguignons est restée confidentielle faute de vendanges suffisantes en raison de conditions météorologiques dévastatrices. Elle trouvera cette année une conjoncture plus favorable grâce à une récolte quasi normale.
« Ce millésime sera un test grandeur nature car nous pourrons le proposer comme vin d’entrée de gamme avec un accompagnement marketing fort », indique Louis Fabrice Latour, président délégué du Bureau Interprofessionnel des vins de Bourgogne (BIVB) et patron du négociant de Beaune Louis Latour (60 millions d’€ de chiffre d’affaires, 200 salariés).
Pas moins de 300 hectares sont déjà mis en exploitation. La superficie ne devrait cesser d’augmenter d’autant que cette nouvelle appellation peut s’avérer une aide précieuse pour le Beaujolais en grande difficulté. « C’est une des solutions pour sortir ce vignoble d’une très mauvaise passe », confirme Pierre-Henry-Gagey. « Et aussi certains viticulteurs du Mâconnais », ajoute Frédéric Drouhin.

Un vin d'export
Beaucoup de professionnels pensent également que Coteaux Bourguignons correspond bien aux attentes de certains marchés étrangers. C’est le cas de Nicolas Potel, président de la maison beaunoise Roche de Bellene (près de 8 millions d’€ de chiffre d’affaires).
« Ce vin obéit au cœur du marché américain avec un prix autour des 10 $ et on me le demande dans des pays à monopole d’Etat, comme au Québec et en Scandinavie », indique ce dernier.
« Je commence à en commercialiser même au Japon », assure de son côté Pierre-Henry Gagey. Tout récemment, des œnologues britanniques le plébiscitaient comme l’innovation attendue dans une région ancrée sur des traditions tenaces.
« Attention toutefois à la qualité pour ne pas retomber dans nos erreurs passées de bourgognes génériques indignes de nos terroirs », tempère le patron de Louis Jadot.
« Les négociants demandent à être impliqués dans les organismes de pilotage et de contrôle de l’AOC, car ils ont une parfaite vision aval des marchés ce qui, malheureusement, n’est pas le cas aujourd’hui », amplifie Frédéric Drouhin, par ailleurs vice-président de l’INAO pour les vins.
Retrouver aussi cet article du même auteur dans le journal Les Echos de ce vendredi 14 novembre.