
Photo : Christian Robischon.
TEXTILE. Lancé jeudi dernier à Mulhouse (Haut-Rhin) par le Pôle Textile Alsace, le label Alsace terre textile garantit l’origine régionale des principales étapes de fabrication.
Ses initiateurs l'assimilent à « une AOC industrielle ».
Seize fabricants l’ont décroché au démarrage pour tout ou partie de leurs produits.
Célèbre spécialiste du fil à broder, DMC est sans doute le plus emblématique de ces pionniers.
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Le retour il y a quelques années entre les mains d’investisseurs alsaciens pour la majorité du capital a procuré une cure de Jouvence à la très vieille institution DMC, née en 1746 et devenue l’icône du capitalisme familial de Mulhouse, lorsque deux de ses représentants les plus marquants, les Dollfus et les Mieg, se sont alliés pour lui donner en 1800 son nom actuel, contraction de Dollfus, Mieg & Compagnie.
Après quantité de changement d’actionnaires, le retour dans le giron local a stoppé l’hémorragie des effectifs, relancé l’offensive commerciale et remis en route un programme d’investissements réguliers.

« Nous injectons chaque année 500 000 à 600 000 € dans l’équipement de production », indique Michel George, directeur des opérations.
Cette année, l’enveloppe s’est très largement concentrée sur l’acquisition d’une nouvelle merceriseuse. L’an dernier, elle a été dominée par les 350 000 € d’une machine de teinturerie, l’étape qui suit le mercerisage - technique qui confère au fil sa résistance et son aspect soyeux - et précède le séchage.
« Nous disposons d’une palette de 570 coloris et envoyons 1 million d’échevettes chaque jour partout dans le monde vers 40 000 points de vente : grossistes à 40 %, détaillants et chaînes spécialisées pour 30 % chacun », souligne Michel George, sachant que les magasins au nom de DMC ont été cédés.
C’est dire qu’autant que la production, la logistique obéit à un processus rigoureux et complexe. Centralisée à Illzach en périphérie de Mulhouse, cette fonction emploie une centaine de personnes, tandis que l’usine en cœur de ville compte 140 salariés pour la production de fils à broder, mais aussi de fils pour le crochet et le tricot, ou encore de toiles à broder …
Au total, les effectifs de DMC se montent à 320 salariés pour un chiffre d’affaires de 60 millions d’€ en 2012.
Si la matière première coton vient d’Egypte, les principales étapes de fabrication se concentrent à Mulhouse. DMC satisfait ainsi aux critères du nouveau label Alsace terre textile.
Sa force, selon les initiateurs, vient de la précision de ses critères, de sa focalisation sur la fabrication et de son processus de contrôle.
Le label bénéficiera non aux entreprises de façon générale mais à leurs produits respectant les conditions.

Fabriqué localement à plus des 3/4
Le principe : les différentes étapes de fabrication sont cotées pour aboutir à un total de 100 points.
Un produit doit obtenir au moins 75 points pour être labellisé, c’est-à-dire être fabriqué localement à plus des trois-quarts. Le local se confond avec le massif vosgien : élargir le périmètre aux départements limitrophes s’est imposé, compte tenu surtout du rôle des industriels textiles des Vosges dans les phases amont.
« Cette méthode de calcul implique de réaliser localement au moins deux des trois opérations-clés de filature-tissage, ennoblissement (ou impression) et confection », souligne Gianni Pavan, dirigeant de la PME haut-rhinoise d’Alsatextiles et président du comité de pilotage d’Alsace terre textile.
Elle rend la labellisation "impossible" pour un produit qui serait fabriqué en partie dans un pays à bas coûts, estime-t-il.
Les entreprises candidates se soumettront à un audit de l’IFTH (Institut français du textile et de l’habillement) de Mulhouse et à un autocontrôle de leurs pairs.
De quoi, selon le Pôle Textile, se montrer plus crédible et plus fiable que le Made in France. « On peut assimiler Alsace terre textile à une AOC industrielle », conclut Gianni Pavan.
Le pôle Textile Alsace ne cache pas qu’il n’a pas réinventé la poudre. Il a reproduit la méthodologie mise au point par les voisins des Vosges depuis deux ans. Leur représentation patronale, le Syndicat textile de l’Est, a d’ailleurs déposé la marque Terre textile.
« L’Etat, par le biais de la DGCIS (*), encourage à décliner dans les régions. Après l’Alsace, ce pourrait être le tour du Nord-Pas-de-Calais, de Midi-Pyrénées et de Rhône-Alpes », appuie Catherine Aubertin, directrice du pôle alsacien de compétences entre entreprises et organismes de recherche-formation.
La filière textile en Alsace emploie 8500 salariés dans 250 entreprises. Elle a bien changé : elle se compose aujourd'hui de PME.
Son débouché traditionnel de l’habillement ne représente plus que 20 à 25 % de son activité. Loin derrière les produits techniques pour des secteurs variés : bâtiment, hygiène-santé, décoration, automobile, aéronautique…
(*) Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services.

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Photos : Christian Robischon et Pôle Textile Alsace.