Des écrans au profil courbe
Des écrans au profil courbe répartis sur 1 km, là où le trafic routier créée le plus de nuisances sonores.

INFRASTRUCTURES. Voilà trente ans que les Dijonnais attendent qu'un ruban de bitume relie la rocade en provenance de Lyon et l'entrée de l'A38 vers Paris.

Inaugurée ce lundi, la liaison intercommunale nord-ouest (LiNo) sera enfin ouverte à la circulation le 10 février.

L'infrastructure de 6,5 km achève le contournement de Dijon et devrait fluidifier la circulation aux heures de pointe sur les communes du nord-ouest de l'agglomération.

Retour sur une histoire mouvementée.

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« J'ai l'honneur de vous informer que le ministre de l'Intérieur a estimé ne pas devoir déclarer d'utilité publique le projet de liaison intercommunale nord-ouest. (…) le conseil d'Etat a estimé que l'étude d'impact ne répondait pas suffisamment aux prescriptions de l'article 2,2 du décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 relatives aux effets sur l'environnement ».

Aussi, poursuit l'orateur ce 19 octobre 1992 : « il convient de statuer sur l'abandon ou la poursuite de l'opération ». Pour Henry Berger, alors président du conseil général de la Côte-d'Or et sa majorité, ce sera un : on continue !

Pas pour très longtemps. Quatre ans plus tard, son successeur Louis de Broissia clame : on arrête ! Et en profite pour faire l'Arc, une deux fois deux voies à l'Est de Dijon.

La déclaration d'utilité publique (DUP) venait à nouveau d'être refusée. Le conseil général demande alors à l'Etat de prendre le relais en devenant le maître d'ouvrage. La décision fait l'unanimité dans les rangs de l'assemblée départementale.

Vue aérienne au débouché du tunnel à Pomblières.
Vue aérienne au débouché du tunnel à Pomblières.

Le projet à l'époque est évalué à 340 millions de francs (52 millions d'€) avec deux fois deux voies. Le chantier qui vient de se terminer a coûté 164 millions d'€, avec seulement deux voies (une dans chaque sens) et un créneau de dépassement sur la moitié du parcours.

Déjà on parlait de serpent de mer. Car les premières études avaient commencé en 1967 pour ne déboucher que vingt ans plus tard, sur une première déclaration d'utilité publique, annulée derechef pour vice de forme.

En 2000, l'Etat (à travers la DDE de Côte-d'Or) remet le projet à plat : la proposition de plusieurs variantes de tracés vise à calmer le jeu auprès des associations de riverains, l'Aderoc étant la plus active, et des écologistes.

Le cahier des charges porte une attention toute particulière aux problèmes de bruit à Talant et Plombières, deux communes limitrophes de l'infrastructure. Une équipe de maîtrise d'œuvre pluridisciplinaire avec architecte, paysagiste et bureau d'études environnement doit rendre la LiNo la plus discrète possible.

L'Etat ne lésine pas sur la concertation : les mardis de la liaison nord, une série de réunions publiques, rythment le printemps 2000.

Ces quinze dernières années ne furent toutefois pas un long fleuve tranquille. La polémique sur l'environnement se déplace sur le profil de la route : doit-on faire deux fois deux voies ou deux fois une ? C'est cette dernière qui l'emportera pour des raisons politiques et budgétaires.

Finalement, grâce à une nouvelle déclaration d'utilité publique le 4 janvier 2006, les travaux préparatoires démarrent malgré un recours devant le conseil d’Etat, mais qui n'est pas suspensif.

Mais début 2010, les travaux s'arrêtent pendant près d'un an, à l'exception de quelques ouvrages d'art dont la construction avait commencé. Le préfet est contraint de prendre cette décision suite à l'annulation du dossier de la loi sur l'eau par la cour administrative de Lyon.

A l'intérieur du tunnel de 600 mètres.
A l'intérieur du tunnel long de 600 mètres.

Certification Iso 14001

Les services de l'Etat (aujourd'hui la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement, Dreal) reconstituent le dossier de la loi sur l'eau et en mai 2011, le creusement du tunnel sous la butte de Talant consacre la reprise du chantier, dans un contexte « politique » contraignant pour les entreprises.

Les horaires des tirs de mine, limités à deux quotidiens, et de la circulation des camions sont strictement encadrés.

Pour se rendre irréprochable, la Dreal investit sur les protections acoustiques, le dispositif le plus visible d'une démarche environnementale poussée jusqu'à la certification Iso 14001.

Selon la topographie des lieux, sont installés des écrans droits en béton, des translucides - sur les ponts -  et de classiques merlons en terre. Les plus élaborés épousent un profil courbe avec un débord sur la chaussée de 3 mètres.

Situés à la sortie du tunnel et dans le vallon de la Peute Combe, ils sont, selon le maître d'ouvrage, inédits par leur forme, mais aussi leur hauteur de 7,65 m. « Ils sont deux fois plus efficaces que les écrans droits avec un gain de 3 décibels », précise un technicien.

Les travaux achevés, sourde toutefois une polémique sur les giratoires en dénivellé qui desservent les communes d'Ahuy et de Talant, une solution plus économique que les échangeurs et qui devraient selon le maître d'ouvrage, suffire au trafic.

Les automobilistes, mais surtout les riverains, se feront leur propre avis, à partir du 10 février, date de la mise en circulation.

tranchée couverte
Au fond, la tranchée couverte pour la traversée d'une zone densément peuplée entre Daix et Talant.

La Lino en bref

- Le financement de la dépense de 164 millions d'€ : Etat, Grand Dijon, conseil régional de Bourgogne,  conseil général de la Côte-d'Or, environ un tiers chacun.

- Les entreprises qui ont fait le chantier : Razel-Bec (tunnel), Eiffage (décharge), Bouygues (écrans acoustiques), Roger Martin, Rougeot, SNCTP et CBRTP (terrassement), SNCTP, EDTP et Pennequin (ouvrages d'art), Clemessy (équipements du tunnel), ISS Espaces Verts (plantations).

- La vitesse autorisée sera de 90km/h entre la rocade et l'échangeur de Daix, et réduite à 70km/h jusqu'au rond-point de l'A38 à cause d'une pente à 6% et de la traversée du tunnel.

linolivre- A feuilleter, l'ouvrage de Jacques Revon, ancien photographe et reporter à France 3 Bourgogne Franche-Comté sur le chantier et les hommes et femmes qui l'ont réalisé : « Le quotidien des bâtisseurs ou l’histoire humaine d’une construction » Aux Editions L’Harmattan. 546 photos, 80 pages de textes. Prix de vente: 35 €. (disponible dans les librairies).

Photos : Dreal.

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