Le multi-spécialiste allemand des produits professionnels d’outillage et de fixation ambitionne d’atteindre 25 milliards d’€ d’activité à l’horizon 2025, contre 14 milliards aujourd’hui. Würth France, première filiale étrangère du groupe installée à Erstein (Bas-Rhin), aspire pour sa part au milliard d’€, contre 595 millions de chiffre d’affaires actuellement. La politique sociale de l’entreprise alsacienne, que nous avons expliquée hier 5 février, à laquelle s’ajoute aujourd’hui la performance logistique rendent crédible cet objectif. On peut aussi y adjoindre l’impulsion apportée par le président Claude Kopff, vendeur dans l’âme, alsacien jusqu’au bout des ongles et footeux jusqu’à la racine des cheveux, dont nous dressons le portrait.

 

• Une logistique revue et affinée à l’appui de 80 millions d’investissement

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Würth pratique encore pour ses préparations de commandes, le picking manuel, qui pourrait disparaître à terme avec le "Goods to person", où le produit à expédier arrive directement à l'opérateur. ©Traces Ecrites.

Le principal centre logistique (38.000 m2) de Würth France se situe, comme le siège social, à Erstein, sachant que l’entreprise en exploite un autre depuis 2008 de 15.000 m2 à Montélimar (Drôme). Les deux plates-formes vont bénéficier à l’horizon 2021, et sur trois à quatre ans, d’un investissement d’environ 80 millions d’€.

La part la plus importante, environ 70 millions, dont une grosse quarantaine en équipements ira au site d’Erstein (plus de 200 personnes) qui gagnera vraisemblablement 18.000 m2. Montélimar devrait de son côté doubler à terme de surface. « La finalité est de réduire notre temps d’intervention et d’améliorer notre taux de disponibilité », explique Frédéric Martin, responsable du service arrivage.

 

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Aujourd’hui, la logistique d’Erstein gère 29.000 références et expédie jusqu’à 13.000 colis par jour. Le process datant de la fin des années 90 est éprouvé : un retour sur 1.000, près de 98% de taux de disponibilité et des livraisons sous 24, 36 et 48 heures maximum. La plate-forme livre aussi sur chantier et bénéficie en plus des équipes maison, d’un personnel de différents transporteurs sur site, d’un établissement et service d'aide par le travail (Esat).

La découverte des équipements de convoyage et de préparation de commandes oblige à faire un semi-marathon avec 14 km de convoyeurs, une gare de triage équipée de 295 tablettes tournantes, 185 travées de contrôle et d’emballage, à quoi s’ajoute un transstockeur à palettes de 14.600 emplacements. « Nous envisageons dans le vaste projet à venir d’intégrer un shuttle de 139.000 emplacements et d’aller vers le goods to person, où l’opérateur logistique se voit amener devant lui les produits », précise Frédéric Martin.

La culture et le spectacle vivant au cœur de l’entreprise

Business et culture font bon ménage chez Würth. Reinhlod Würth (84 ans), la figure tutélaire du groupe qu’il a construit pierre par pierre à partir de 1954 est un collectionneur d’art passionné. À la tête d’environ 18.000 œuvres modernes et contemporaines, il a doté ses principales implantations industrielles européennes d’un musée, tout à la fois lieu d’exposition et espaces de spectacles vivants. Une quinzaine existe à ce jour.

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La Joconde Noire de l'artiste José de Guimarães. © Traces Ecrites

Le site d’Erstein en possède un depuis 2008, ouvert tous les jours et gratuit, qui revendique entre 45.000 et 50.000 visiteurs par an. Trois salles accueillent des expositions temporaires d’artistes de la collection. Mais pas seulement, car un auditorium de 224 places fait la part belle à une programmation de théâtre, cinéma, musique, dont un festival d’automne de piano.

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Claire Hirner, responsable de la conservation et de la médiation au musée Würth d'Erstein, explique une autre oeuvre de José de Guimarães : la Vache qui rit. © Traces Ecrites

L’exigence de qualité ne rime pas ici avec élitisme. Pour s’en convaincre, il suffit d’être guidé par Claire Hirner, responsable de la conservation et de la médiation. Elle fait découvrir jusqu’au 15 mars José de Guimarães, artiste au rayonnement mondial, Portugais d’origine, et trop peu connu en France. Influencé par les cultures d’Afrique (Angola), du Mexique et du Japon, il propose au musée Würth d’Erstein une balade dans ses différents univers, graphique, chromatique et sculptural.

À contempler absolument, sa Joconde noire, son alphabet africain fait d’une multitude de pictogrammes, et quelques installations ou masques. Prochain grand temps fort du 7 avril prochain au 21 janvier 2021  : une exposition Christo et Jeanne-Claude, connus pour avoir emballé de très nombreux ouvrages d’art et monuments du monde entier, comme le Pont Neuf de Paris en 1985. Et non, Christo n’empaquettera pas les bâtiments de l'entreprise, mais mettra à disposition ses esquisses et ses dessins, en résumé tout le travail préparatoire à ses oeuvres hors normes, rarement montré au public.

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L'alphabet africain de José de Guimarães fait de multiples pictogrammes. © Traces Ecrites

 

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• Claude Kopff, un bébé Würth

Son accent ne trompe pas. Plus alsacien que Claude Kopff, il y en a certes d’autres, mais lui accorde au moins à son interlocuteur, le bénéfice d’être d’origine franc-comtoise, Bourguignon d’adoption et Lorrain de coeur... Reste que vous fâcherez assurément le président de Würth France depuis 2015 à évoquer le sanglier des Ardennes.
claudekopffNon qu’il déteste l’animal, le boudin blanc de Rethel, voire ce département et encore moins les Ardennais, mais la fusion des régions lui laisse un goût amer dans la bouche. Footeux dans l’âme, naguère joueur amateur de très bon niveau comme milieu offensif, il occupe un poste au sein de la fédération régionale de football et déteste au plus haut point d’avoir à faire 700 km aller et retour pour une réunion consacrée au ballon rond au diable vauvert.

« La cohérence géographique de la région Grand Est avec la Champagne-Ardenne me laisse pour le moins perplexe », glisse-t-il en guise de litote. Gommez cela et vous avez devant vous un dirigeant attachant, qui s’est fait seul, n’en fait pas des tonnes et aime les gens. Il faut le voir accueillir les nouveaux arrivants (commerciaux) dans l’auditorium maison. Pour un peu, il reviendrait bien en arrière sillonner les routes en leur compagnie. Le temps qu’il passe à les interroger surprend et séduit son public.

Claude Kopff nait il y a 59 ans à Erstein même, commune alsacienne d’environ 11.000 habitants, siège social et centre logistique de Würth France où travaillent 680 collaborateurs. Formé par alternance  et titulaire d’un CAP, BEP et bac pro d’ajusteur outilleur, il décroche aussi un BTS en électromécanique. Ses premiers pas professionnels, il les fait grâce au foot à la sucrerie d’Erstein, située à deux pas de la frontière allemande et déjà son âme de leader se détache.

Toujours grâce au foot, Claude Kopff entre chez Würth en 1989 et travaille déjà comme vendeur dans le nord de l’Alsace. En deux ans, son portefeuille atteint les 200 clients. Remarqué, il passe chef des ventes pour le nord et l’est de la France, puis crée un district en recrutant ses propres chefs des ventes et devient en 1995 directeur général des ventes.

Très entreprenant, polyglotte (trois langues), il monte des centres de profits en électro et sanitaire, pour le marché de la maintenance, dirige la division métal, installateurs et maintenance, forte de 1.000 personnes. On le nomme début 2009 directeur des opérations et là, croyez-le ou non il refuse. « Je ne voulais pas me déconnecter du terrain et de mes équipes », indique-t-il. En décembre de la même année, il finit tout de même par accepter, après une période d’essai de six mois qu’il s’impose. Courant 2014, il occupe le siège de directeur général et devient président de Würth France l’année suivante.

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L’un des grands plaisirs du président de Würth France est d’accueillir régulièrement les nouveaux arrivé(e)s dans l’entreprise. Toutes et tous se présentent à lui et il a un mot sympa pour chacun. On le sent dans son élément, au milieu d’une équipe. © Traces Ecrites

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