MosaHYc, le projet de réseau de transport d’hydrogène par canalisation entre la Moselle et le Land de Sarre, en Allemagne, engage son étude de faisabilité. Porté par le Français GRTgaz et le Luxembourgeois Creos, il combine conversion de canalisations existantes et pose de tuyaux neufs. Les Clubs H2 Bourgogne-Franche-Comté et Grand Est invitent à découvrir ce projet à l’occasion d’un webinaire le jeudi 3 juin. (*)
La montée en puissance de l’hydrogène vert comme alternative aux énergies carbonées pour l’industrie, la mobilité et le stockage d’électricité, implique des infrastructures dédiées. Dans ce contexte, le projet de réseau transfrontalier de transport d’hydrogène par canalisation entre la Moselle et le Land de Sarre, en Allemagne, focalise l’attention. Baptisé MosaHYc (Moselle Sarre Hydrogène Conversion), ce programme porté par deux gestionnaires de réseaux, le Français GRTgaz et le Luxembourgeois Creos (groupe Encevo), a engagé en avril dernier son étude de faisabilité.
MosaHYc a été lancé il y a un an et demi au cœur d’un bassin industriel transfrontalier. L’opportunité de convertir un réseau existant – désormais non indispensable pour l’alimentation en gaz naturel de clients – a déclenché l’opération. Le projet vise l’aménagement d’un réseau de 100 km de canalisations reliant les villes allemandes de Perl, à la frontière luxembourgeoise, Volklingen, Dillingen et Saarbrücken, aux villes françaises de Bouzonville et Saint-Avold, en Moselle. Il combine la conversion de 70 km de canalisations existantes et la construction de 30 km de canalisations neuves.
« MosaHYc est un démonstrateur destiné à affiner les coûts de conversion des réseaux de transport de gaz existants dans le cadre de la stratégie européenne de développement de la filière hydrogène présentée en juillet 2020 », éclaire François Martin, chef du projet MosaHYc chez GRTgaz. Le projet est également un maillon de l’initiative « Grande Region Hydrogen » lancée le 24 mars dernier par les Länder de Sarre et de Rhénanie-Palatinat en Allemagne, la région Grand Est, la région Wallonie en Belgique et le Grand-Duché du Luxembourg.

Le démonstrateur doit permettre de solutionner plusieurs points techniques. En effet, la conversion de canalisations implique le remplacement de joints et de vannes, la molécule de H2 étant plus petite que celle de méthane, avec des risques de fuites à la clé. Par ailleurs, les premiers tests devront établir les niveaux de pression souhaitables, afin que l’hydrogène ne fragilise pas les tuyaux en acier. Enfin, les acteurs vont se pencher sur le développement d’un revêtement intérieur à appliquer dans les canalisations pour les protéger des effets néfastes de ce gaz.
Les différents partenaires de MosaHYc devraient arrêter leur décision définitive d’investir d’ici un an. La mise en service du réseau est prévue quant à elle à l’horizon 2026. L’engagement financier n’est pas anodin, puisque l’enveloppe dépasserait les 60 millions d’€, à raison d’un million d’€ d’investissement par kilomètre de canalisation neuve et 300.000 € par kilomètre de canalisation convertie.
Négociations commerciales en cours

Les négociations commerciales battent actuellement leur plein entre potentiels consommateurs et futurs producteurs d’hydrogène. A eux seuls, les besoins des industriels justifieraient la réalisation du projet, affirme François Martin. Il cite l’aciérie SHS (Saar Holding Stahl) qui pourrait absorber « des dizaines de milliers de mètres cubes, en substituant l’hydrogène aux gaz de coke en vue de produire un acier bas carbone. »
La mobilité est également un débouché, mais plus secondaire. En effet, les bénéficiaires seraient surtout les propriétaires de flottes de véhicules individuels, collectifs ou lourds. Ils profiteraient des économies d’échelle permises par le réseau pour obtenir des prix à la pompe proche du diesel, selon GRTgaz.
Du côté des producteurs, plusieurs acteurs sont sur les rangs. GazelEnergie et Storengy (groupe Engie) ont annoncé le 20 octobre 2020 la mise en service à l’horizon 2023 d’une unité de production d’hydrogène décarboné de 5MW sur le site de la centrale Emile Huchet à Saint-Avold (Moselle). De son côté, Hydrogène de France pourrait injecter dans le réseau transfrontalier de l’hydrogène produit à partir des sources locales en énergies renouvelables (éolien, solaire, etc.). Le français H2V, spécialiste du développement de projets industriels dans l’hydrogène vert, suit également le projet, tout comme l’allemand Steag.
La capacité de l’infrastructure avoisinerait 10 à 85.000 mètres cubes par heure, soit l’équivalent de 5 à 16 poids-lourds par heure. « Nous sommes à un point de basculement où l’hydrogène change d’échelle. De véritables écosystèmes industriels émergent. Ils atteindront un équilibre économique grâce à la centralisation de la production, à l’augmentation des prix de la tonne de CO2, une meilleure valorisation des produits finaux. Des infrastructures comme MosaHYc sont un moyen d’attirer des industriels de demain ! », s’enthousiasme François Martin.
(*) Lien pour suivre le webinaire le jeudi 3 juin de 11h à 12h.