AGROALIMENTAIRE/DOUBS. Une semaine avant l’ouverture du Salon de l’Agriculture, où elle est régulièrement distinguée, la société du haut-Doubs lance sa sixième campagne au ton décalé dans le métro parisien.
L’opération engloutit tout son budget communication, mais offre une belle visibilité au produit, dont tous les producteurs bénéficient. Morteau Saucisse ne perd pas de parts de marché dans la grande distribution, ce qui en soi est déjà un petit exploit…

« Vingt centimètres de pur bonheur ». C’est avec ce slogan que Morteau Saucisse avait fait le buzz, en 2012. Destiné au départ à une simple campagne d’affichage dans les abribus francs-comtois, il s’était finalement étalé sur une pleine page de pub dans « Libération ».
Avant d’être relayé par de nombreux médias nationaux et émissions diverses comme Les Guignols, Les Grosses Têtes… et d’être suivie depuis, chaque année, de campagnes remarquées dans le métro parisien, dont la dernière vient de démarrer.
« On n’aurait jamais imaginé faire autant de bruit », raconte Carole Amiotte, la petite-fille du fondateur, chargée de la communication et des achats pour les trois entités du petit groupe agroalimentaire franc-comtois auquel appartient Morteau Saucisse.
« On a toujours eu un ton décalé, comme par exemple Fumé, c’est bon pour la santé, mais pour celui-là nous ne savions pas s’il serait pris dans le bon sens. Et finalement il y a eu une montée en puissance exceptionnelle, avec uniquement des critiques positives. »
Le chiffre d’affaires 2012 a connu une hausse « sensible », sans doute due à cette première campagne, ce qui a encouragé la petite entreprise à poursuivre l’aventure. En 2013, l’agence de communication bisontine Dartagnan, qui avait conçu la première campagne, lui avait proposé de remettre ça, mais en visant plus haut cette fois avec une campagne d’affichage dans le métro.
« Dartagnan nous avait proposé une offre très intéressante. Notre budget annuel de communication allait être englouti, mais nous avons pensé qu’il fallait que le logo soit vu trois années de suite, à raison d’une semaine par an, pour que la campagne porte ses fruits et nous avons fait le choix d’y aller quand même. »
Et c’est ainsi que les campagnes se sont succédé dans le métro parisien, chaque hiver à pareille époque. Morteau Saucisse a continué à la confier à Dartagnan, qui avait pour mission de rester dans le ton décalé, de trouver d’autres slogans dans la même veine et de garder le fond d’ardoise noire, qui évoque l'authenticité du produit et la chaleur d’un chalet de montagne.
La cible étant les jeunes urbains pressés et avides de produits du terroir et authentiques : les Franciliens de 35 ans et plus, les bobos du Marais et ceux de la rive gauche. Le produit se vend très peu à l’export, excepté en Belgique, mais il reste un fort potentiel à exploiter en France, estime Carole Amiotte.
« Les Français, en moyenne, mangent deux à trois saucisses de Morteau par an, quand les Franc-comtois en ont toujours une dans le frigo, au cas où. »
Le rendez-vous entre usagers du métro et la bonne saucisse fumée dans un tuyé (la grosse cheminée centrale des fermes du haut-Doubs) et reconnaissable à sa cheville de bois a ainsi lieu chaque année avant le salon de l’Agriculture, dont la prochaine édition se déroulera du samedi 25 février au dimanche 5 mars 2017.
Sept slogans sur un ton décalé

La première campagne fut lancée à cette période un peu par hasard, mais le créneau est bon et a été gardé. Pendant les semaines qui suivent, les Parisiens voient toute la France agricole débouler dans les rames du métro et sont particulièrement sensibilisés aux produits du terroir à ce moment-là de l’année. Et puis la Morteau est un produit qui se déguste à la saison froide…
Après « Ne vous laissez pas enfumer », la première campagne régionale qui voulait dénoncer les produits de contrefaçon et qui précéda par l’IGP (Indication géographique protégée) « saucisse de Morteau » décrétée en 2010, il y eut « Fumé, c’est bon pour la santé », en 2011, qui rappelait l’importance du fumage traditionnel du produit.
Puis successivement « 20 cm de pur bonheur », « Offrez-vous 20 cm de pur bonheur, le retour », « Certains en font tout un plat », « Cet hiver, elle se glisse partout » et, cette année « L’hiver sera long » et « Soirée entre amis ».
Trois cents affiches 4X3 sont visibles depuis le 16 février jusqu’au 22 dans les couloirs du métro avec, en parallèle, une campagne d’un mois sur la page Facebook de la maison et son compte twitter, sous l’identité #20cmdepurbonheur.
Le montant de la campagne n’a pas été révélé. Quant aux retombées, elles ne sont pas quantifiables, assure Carole Amiotte. « La campagne suscite l’envie d’aller acheter une saucisse de Morteau. Les usagers du métro reconnaissent désormais le logo, mais elle bénéficie à tous les producteurs. »
La Morteau se vend principalement en grandes surfaces. « C’est difficile, mais notre chiffre d’affaires est stable. On ne perd pas de parts de marchés, ce qui est déjà bien. »
La hausse sensible de 2011 générée par la campagne de publicité s’est confirmée ensuite, affirme la directrice du marketing.

Arcado, un petit groupe entre artisanat et industrie
Morteau Saucisse, historiquement implantée à Morteau, est une des trois filiales du petit groupe agroalimentaire franc-comtois Arcado, avec Jean-Louis Amiotte à Avoudrey et Clavière à Dole.
Arcado emploie 230 salariés au total, dont 50 chez Morteau Saucisse et parmi eux une dizaine de commerciaux qui relaient les campagnes de pub des trois filiales dans les grandes surfaces, dans toute la France.
Arcado réalise un chiffre d’affaires d’environ 60 millions d’€. Au salon de l’Agriculture 2016, Jean-Louis Amiotte s’est vu décerner une médaille d’or au Concours général agricole et Morteau Saucisse une médaille d’argent.
En ce début 2017, Morteau Saucisse vient d’obtenir un prix d’excellence du même concours pour trois médailles consécutives. « Cela récompense la régularité du travail », explique Carole Amiotte. « On travaille comme des artisans, on pousse la saucisse à la main. C’est une tâche difficile et ce sont nos salariés qui sont ainsi récompensés. »