Jusqu’alors agrégat de sociétés œuvrant de près ou de loin à la construction (réseaux d’énergie et de télécommunications, ingénierie, immobilier…), le pôle constitué par la famille Doll entend désormais stimuler les synergies d’expertises pour progresser. Il a recruté dans ce but un manager bien connu de la relation public-privé en Alsace, Nicolas Carboni, et choisi comme premier terrain d’application la vaste zone d’activités Axioparc dans son fief au nord de Strasbourg.
Qui connaît Tellos ? En tant que tel, peu de monde en Alsace. Quelques-unes des entreprises affiliées à ce groupe, en revanche, jouissent d’une notoriété et d’une réputation bien établies, principalement Sogeca dans le domaine de la pose de réseaux. Jusqu’à présent, le nom Tellos renvoyait davantage à un agrégat de sociétés évoluant chacune dans leur couloir, qu’à un « vrai » groupe organisant des synergies entre ses composantes : réseaux électriques et de télécommunications, réseaux de chaleur, sablière, terrassement et VRD (la filiale SMTPF à Saint-Avold en Moselle), promotion immobilière et aménagement, ingénierie, formation. Soit un cumul de 280 salariés pour 80 millions d’€ de chiffre d’affaires annuel.
Créer ce ciment à partir du siège de Herrlisheim (Bas-Rhin) constitue désormais l’objectif de la famille dirigeante Doll. Elle a confié le pilotage de cette mission à un - presque - vieux briscard des passerelles, notamment celles entre le secteur privé et la recherche publique : Nicolas Carboni a rejoint le groupe en début d’année comme directeur général, après voir, entre autres, présidé Conectus Alsace, la Société d’accélération de transfert de technologie (Satt).
Il lui appartient donc de mettre en œuvre la nouvelle structuration. Celle-ci a démarré, classiquement, par les fonctions support. Mais elle ne s’arrête pas là. « Un mouvement majeur consiste à remonter l’activité de bureau d’études à l’échelle du holding, car la matière grise doit constituer le vecteur d’une politique d’innovation généralisée, au service de l’objectif de réduire notre empreinte carbone et celle de nos clients », décrit Nicolas Carboni.
Si chaque filiale garde le pilotage de son cœur de métier, elle est invitée à se rapprocher davantage de ses sœurs, de sorte à « créer l’effet de synergie qui apportera de nouveaux relais de croissance », poursuit le directeur général.
La zone d'activités Axioparc, un exemple de synergie des filiales

Pour illustrer le concept, le nouveau manager met en avant l’exemple du métier d’aménagement, à partir de la zone d’activités Axioparc. Ce « prototype » ainsi qualifié par Tellos Groupe aurait besoin de plus d’un laboratoire pour l’englober, puisqu’il s’étend sur la centaine d’hectares de l’ancienne raffinerie, dépolluée, de Total entre Drusenheim et Herrlisheim, au nord de Strasbourg. Il fonctionne donc à échelle et dans une configuration on ne peut plus réelles, Tellos en ayant reçu la concession d’aménagement en 2019, avec Nexity Villes & Projets, une filiale du groupe immobilier national, pour la remplir d’entreprises selon un potentiel évalué à un millier d’emplois.
Le groupe alsacien y teste ainsi sa capacité à réunir aménagement et commercialisation, le déploiement d’un réseau de fibre optique à très haut débit, la production d’énergie par la constitution d’un réseau dédié de chaleur et de froid – celui-ci mobilisant près de 10 millions d'€ d’investissements jusqu’à la mise en service de la chaufferie sur place prévue à l’automne 2023. Six mois plus tard, Axioparc devrait aussi couvrir quelque 20 hectares de son sol de panneaux photovoltaïques déployant une puissance de 25 mégawatts. La création d’une offre de recharge en hydrogène est également à l’étude pour les occupants de la zone, en mode mobilité pour leurs véhicules et en mode stationnaire pour le fonctionnement de leur process.
Mais le groupe, qui cultive la discrétion, se fixe des limites à la prétention à vouloir tout faire. « Réussir notre synergie passe aussi par des partenariats avec des experts dans des spécialités complémentaires, et cela nous crédibilise vis-à-vis des clients. C’est ce que nous entreprenons pour les réseaux de chaleur : leur production, on connaît (nous posons une centaine de kilomètres de conduites par an), mais pas l’exploitation. Il en va de même pour l’exploitation des parcs photovoltaïques », énonce Nicolas Carboni. D’où la quête, en cours de finalisation, d’un partenaire sur ce point pour Axioparc.
Au cumul, le site entend confirmer en réel son ambition, énoncée par le directeur général de Tellos Groupe, d’une « zone d’activités de nouvelle génération, bas carbone, pensée par et pour la 5G, apporteuse de lieux de services et d’interactions entre ses occupants ». Le « prototype » pourra alors s’industrialiser quelque peu, c’est-à-dire s’appliquer à d’autres territoires, notamment pour la reconversion de friches d’une certaine taille.

Les « habitants » d’Axioparc sont donc attendus nombreux, autour d’un millier, et après la phase initiale de latence que la crise sanitaire a accentuée, le projet en prend le chemin. Son aménageur mesure à 65 % le taux de commercialisation effective ou de pré-commercialisation des 85 hectares ouverts aux implantations. Dans ce secteur seulement séparé de l’Allemagne par le Rhin, le déclic vient de Bauder, spécialiste germanique des produits de couverture pour le bâtiment qui a choisi Axioparc pour son usine française de 100 emplois à terme à partir de 2025.
Le gros moteur, toujours allemand, doit être confirmé ce printemps, suite à l’enquête publique qui a concerné son dossier en mars : il s'agit du logisticien familial Pfenning pour une plateforme de 120.000 m2 de gestion de flux de clients industriels, dont le nombre d’emplois est annoncé à 400.

Il a ensuite œuvré au sein des structures publiques : la banque Bpifrance à son siège national pour le pilotage de sa nouvelle direction Deeptech et, de 2019 à fin 2021, la Région Grand Est comme directeur général adjoint en charge du vaste pôle économie-innovation, tourisme-culture-patrimoine, international-Europe-transfrontalier.
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