START-UP/METZ. Installé dans les anciens hangars des transports en commun de Metz, Bliiida avec 3 i pour Inspiration, Innovation et Intelligence collective, double de surface pour accueillir davantage de jeunes entreprises des industries créatives et de l’économie numérique.
Exploration de ce tiers lieu, vitrine de la French Tech lorraine, et découverte de deux de ses résidents, Tracksens et DiVaCore.


C’est une véritable fourmilière qui niche dans les anciens entrepôts des transports en commun messins (TCRM). A l’origine projet événementiel qui mettait en avant les talents locaux – les Nuits Blanches de Metz –, Bliiida avec 3 i pour Inspiration, Innovation et Intelligence collective est un tiers lieu qui abrite de jeunes entreprises des industries créatives et de l’économie numérique. Environ 70 ont élu résidence dans cet endroit singulier : 8.000 m2 réaménagés qui vont doubler de surface moyennant un investissement de 11,5 millions d’€ que la société d’économie mixte Metz Métropole a annoncé ce mardi 23 octobre.
Le groupement d’entreprises composé de Demathieu Bard, GHA, CNB, INGEROP, ES et AV Exciters, réalisera le projet d’ici l’hiver 2020. Plusieurs univers vont prendre possession des vastes hangars encore inutilisés. Une halle du numérique sera aménagée dans les anciens abattoirs avec un laboratoire de recherche universitaire qui rejoindra le Cluster du jeu vidéo, déjà existant, et un incubateur.
À ses côtés, un « quartier » arts graphiques et design, avec une salle de spectacle vivant à dimension régionale. Les arts de la scène auront aussi leur lieu d’expression ainsi que la production audiovisuelle. Le tout relié au sein de Bliiida par des espaces communs, de coworking, et une salle de machines de fabrication numérique (imprimante 3D, découpeuse laser, brodeuse numérique…) et, vers l’extérieur, un chemin le long de la Moselle conduisant jusqu’au centre-ville.
Aujourd’hui, deux bâtiments sont occupés. Sous la vaste halle en béton et d'acier, surnommée la Grande Serre, chaque « résident » meuble une place de bus de 10 m2, voire plusieurs pour une activité « encombrante », stockage de la matière première par exemple. Ici, une couturière, là un designer, ailleurs des fabricants de décors de théâtre… Certains sont isolés dans un espace vitré pour travailler au calme, se protéger de la poussière ou encore contenir le bruit à l’intérieur.
Le royaume de Lorn'tech et du 89C3


Dans le prolongement de la halle, dans les anciens bureaux de la société de transport, des start-up se côtoient. C’est le royaume de LORnTECH, l’écosystème French Tech de Lorraine (les 4 agglomérations du Sillon Lorrain : Épinal, Metz, Nancy et Thionville) qui incube de jeunes pousses en phase de démarrage, et les héberge avec des loyers inférieurs au prix du marché, jusqu’à l’âge adulte avant qu’elles ne s’envolent de leurs propres ailes.
Un service d’accompagnement les aide à édifier leur business-plan, leur stratégie commerciale ou trouver des financements. Un parc de machines à commandes numériques est aussi à disposition des résidents.
C’est dans cet écosystème favorable que Grand Innov, l’agence d’innovation du Grand-Est a installé son antenne messine, et que la Banque Populaire d’Alsace Lorraine Champagne (BPALC), gros sponsor des lieux (on lit son nom un peu partout notamment sur la porte d’une salle de réunion de la pépinière), a choisi pour implanter sa start-up à elle, 89C3.
Depuis le début de l’année, Bryan Mercier et Pierre Pilon animent cette cellule qui doit participer à la transformation digitale du groupe BPCE, l’un issu des rangs de la Banque Populaire, l’autre de la Caisse d’Épargne. « Les métiers de la banque sont en train de se transformer comme jamais depuis que les banques commerciales existent », commente Dominique Wein, directeur général de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne.
Leur mission, détecter des projets d’entrepreneurs qui, aux côtés des informaticiens du groupe puissent concevoir des applications numériques capables d’améliorer certaines de leurs missions, comme des simulations de prêts, le traitement des demandes des clients ou encore des outils de gestion interne. La banque les accompagne « par saison de production » puis au-delà avec des produits financiers adaptés.
« C’est notre usine digitale dans un environnement plus favorable que le 4ème étage du siège social ! », s’exclame Jacqueline Schneider, responsable de 89C3 au sein de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne.

Elles se développent déjà à Bliiida : Tracksens et Divacore

• Tracksens, le documentaliste des temps modernes
Spécialiste de la linguistique, Sébastien Albouze pose une question que partagent beaucoup de gros lecteurs à des fins professionnelles, comme les avocats, les juristes ou les chercheurs : comment lire rapidement des centaines de pages pour en tirer la substantifique moelle ?
Avec ses trois associés, dont un mathématicien et un informaticien, il travaille sur un outil de traitement automatique de langages, un algorithme qui analyse, puis résume les textes et les classifient automatiquement par thèmes ou par source.
Les premiers résultats sont encourageants : « Dans une thèse, on a obtenu 40% de bonnes phrases », commente t-il. De là à ce que l’automate rédige tout seul un texte, il n’y a qu’un pas, sans le style de Molière toutefois.
L’ingénieur des Mines et ses acolytes, tous universitaires de haut niveau, planchent sur un second projet, toujours sous l’angle linguistique. A la manière de Google Translate, Regiolex est un dictionnaire des langues régionales. Leurs travaux portent pour l’instant sur l’alsacien, le picard et l’occitan, traduits en français (et inversement) à partir de vieux textes dont ils identifient les mots clés ainsi que les mots de liaison. Trois universités les épaulent, Strasbourg, Amiens et Toulouse.
Deux années après sa création, la jeune entreprise commence à avoir besoin de renfort : elle recrute un UI designer (ou designer d’interface) qui doit lui permettre d’accélérer ce travail de fourmi.

• DiVaCore brave les géants de l’électronique avec des écouteurs sans fil
On l’avait connue en 2016 avec ses enceintes portatives, DiVaCore continue son chemin dans la spécialité de l’audio nomade avec des écouteurs sans fil fonctionnant avec la technologie bluetooth. Lancée il y a un an, une 2ème génération vient de sortir. « Grâce au bluetooth 5, l’accès est plus rapide, le son de meilleure qualité et le phénomène de latence est réduit [ décalage entre l’image et le son, Ndlr ] », explique Linh Tran, cofondatrice en 2011 avec David Grasso et Jérémy Obriot.
Petits, légers (6-7 grammes), d’une autonomie de 8 heures et dotés d’une batterie longue durée, ces « AntiPods » ont été conçus avec l’idée de démocratiser ce produit avec un prix inférieur à 100 € et une connection directe avec un appareil audio (en général un téléphone) sans passer par le téléchargement d’une application. Fabriqués en Asie – « dans l’électronique grand public, il est difficile de sortir en Europe un produit à ce niveau de prix » –, les écouteurs sont vendus sur la boutique en ligne de l’entreprise et dans un bon nombre de magasins de téléphonie, d’informatique et d’appareils électroniques de l'hexagone.
Face à des concurrents géants Apple, Sony etc., la start-up messine se félicite d’avoir pris place dans la boutique du MoMa, le musée d’art moderne de New-York. Une belle référence qui, espère t-elle, lui permet d’avoir une visibilité à l’export.
