Les vacances d’été arrivées, l’actualité des entreprises ralentit. Pour rester connecté, la rédaction de Traces Ecrites News vous propose de revenir sur les faits les plus marquants de ces derniers mois. Aujourd'hui : Delle Fil, entreprise de transformation de fils de cuivre et aluminium de Delle (Territoire de Belfort) délaissée par le suisse Von Roll, a été reprise par le groupe espagnol Vicente Torns qui en fait son pilier d’une diversification vers les applications dans l’automobile.
ARTICLE DÉJÀ PUBLIÉ LE 7 JUIN 2022. Un parfum d’Espagne flotte sur Delle (Territoire de Belfort) depuis un peu plus d’un an. Il diffuse une ambiance de travail studieuse : le groupe Vicente Torns déroule son plan de relance de l’usine de fil de bobinage de cuivre et d’aluminium reprise à la barre du tribunal en mars 2021, qui s’est rebaptisée Delle Fil à cette occasion. Vicente Torns avait alors pris la suite du suisse Von Roll dont l’usine delloise n’entrait plus dans les axes stratégiques, ce qui avait déclenché un désengagement amenant au redressement judiciaire, au printemps 2020.
Le nouveau propriétaire applique pour l’instant son programme d’investissements en parfaite concordance avec son calendrier. « Un plan de 10 millions d’€ sur cinq ans avait été annoncé pour un total de 14 nouvelles machines, comportant une première tranche de 2,5 millions d’€ en 2021/2022. Celle-ci suit son cours prévu. Le premier nouvel équipement a été installé en janvier dernier, le second suit cet été », énonce Louis Mendès, directeur de l’entreprise Delle Fil.
La nouvelle installation est impressionnante : elle déploie un procédé d’émaillage sur 22 mètres de haut, qui dessine pour de minces fils d’1 à 7 millimètres d’épaisseur un parcours digne de la montée dans un immeuble de plusieurs étages.
Ce début de transformation de l’outil doit consolider Delle Fil dans ses marchés pour machines tournantes, selon deux objectifs : garder ses places fortes dans les applications dans l’énergie (générateurs, alternateurs dans le nucléaire, l’éolien ou l’hydro-électricité) acquises notamment auprès de General Electric ; et en gagner dans l’autre pilier de l’industrie nord-franc-comtoise, l’automobile en route vers son électrification.
Les fils plats et émaillés de l’entreprise entrent en effet dans les moteurs électriques, « quel que que soit le mode d’alimentation, batteries ou recharge à partir de l’hydrogène », précise le directeur. Les investissements ont été lancés sans attendre la signature de premiers contrats auprès de clients potentiels, constructeurs ou équipementiers. Mais le dirigeant sur place fait état de « contacts avancés. »
Cette spécialisation sur le « tournant » a décidé Vicente Torns à se pencher sur le dossier de l’usine de Delle pour rester finalement le seul candidat repreneur en lice. Ce groupe de 500 salariés pour 280 millions d’€ de chiffre d’affaires en 2021 évolue dans le même domaine, mais pour les applications en transformateurs. « Il a trouvé ici une parfaite complémentarité d’offre, une opportunité d’étendre sa gamme de produits », relate Louis Mendès.
La nouvelle filiale rejoint ainsi un outil industriel déjà constitué de l’unité mère au siège de Rubi près de Barcelone, d’une usine en Slovaquie (depuis 2007) et d’un pôle français en Rhône-Alpes réparti entre Meyzieux et Vaulx-en Bugey sous le nom de Torns Sofilec.
Un plan de 20 embauches en CDI

notamment dans les moteurs de véhicules électriques. © Mathieu Noyer
En s’installant à Delle, le groupe espagnol a aussi rencontré un profil d’entreprise proche du sien : le site franc-comtois existe depuis 1927, tandis que Vicente Torns a été fondé en 1924, par le grand-père des actuels dirigeants.
Le nouveau propriétaire hérite de bâtiments vastes, mais pas sur-dimensionnés. Les six hectares abritent 20.000 m2 bâtis laissent certes de l’espace libre pour circuler généreusement, mais ils n’entraînent pas de vacance flagrante de surfaces. Le procédé demande de la place. Il se répartit en quatre ateliers pour la réception des bobines de matière suivie du tréfilage et du laminage de celle-ci, de sorte à passer de la forme ronde au plat, à l’émaillage, à l’enrubanage et au guipage qui aboutit à l’isolation du produit.
La conformité du projet à son scénario initial se confirme aussi au niveau des chiffres, selon Louis Mendès, qui rapporte un « résultat d’exploitation positif » au terme du premier exercice, pour un chiffre d’affaires de 43 millions d’€.
De quoi rendre confiant aussi sur le respect des objectifs d’augmentation des effectifs. Repris avec 78 salariés, Delle Fil est promis à 20 embauches en CDI sur les cinq ans du plan d’investissement, dont six dans la première tranche en cours. Trois ont déjà été concrétisées.

Employé depuis 30 ans dans l’usine, il en est en quelque sorte la mémoire. La consonance espagnole de son nom n’a donc rien à voir avec l’arrivée du nouveau propriétaire.
Après son diplôme Deust (bac + 2) à l’Université de Franche-Comté à Besançon en préparation d’activités industrielles - spécialisation qualité, il rejoint le site de Delle comme technicien R&D avant de prendre, pendant 17 ans, la responsabilité du service qualité. Ont suivi neuf années de direction de la production et services annexes.
Durant le redressement judiciaire, les circonstances ont abouti à lui faire prendre la direction. A lui désormais, à 51 ans, de guider Delle Fil dans sa nouvelle vie.