L’usine Ineos Polymers de Sarralbe (Moselle) referme le lourd dossier de mise en sécurité de ses installations pour ouvrir celui de la transformation environnementale de ses procédés de fabrication de granulés plastiques. Un projet d’investissement de 60 millions d’€ est en réflexion, pour la conversion des chaudières à biomasse.
A peine achevée la mise en sécurité de ses installations classées, le site Ineos Polymers de Sarralbe, à l’est de la Moselle, ouvre un nouveau dossier, tout aussi délicat, celui de sa transition écologique.
Le site du groupe chimique britannique Ineos (*) emploie 240 personnes dans la fabrication de matières plastiques sous forme de granulés, à raison de 250.000 tonnes par an. Ces grains de polyéthylène et de polypropylène alimentent les industries de l’automobile, de l’emballage ou encore de la canalisation d’eau potable, autant de clients dont les besoins pourraient évoluer au regard des nouveaux enjeux environnementaux.
La recherche d’un moindre impact carbone avait cependant un préalable à Sarralbe : le bouclage du Plan de prévention des risques technologiques (PPRT) enclenché en 2017. Le site lorrain a achevé, à l’automne dernier, les travaux de sa mise en conformité au regard de cette règlementation destinée à prévenir des catastrophes comme celle de l’usine AZF de Toulouse en 2001. Au total, 36,8 millions d’€ auront été mobilisés sur cinq ans, dont 40% à la charge d’Ineos, 40% de l’Etat et 20% des collectivités territoriales.
Un des principaux volets du PPRT consistait à supprimer les risques liés au stockage de plusieurs milliers de tonnes d’hydrocarbures sur la plateforme située à proximité d’habitations. « Nous avons construit des réservoirs enterrés : un nouveau pour le butène (160 m3) remplace l’ancien de 250 m3, et deux réservoirs de propylène enterrés (300 m3 chacun) se substituent à deux sphères d'entreposage de 2.000 m3 unitaires. Nous n’avons désormais plus de stocks de produits pétrochimiques sur notre site, mais des réservoirs tampons destinés aux phases d'arrêt et redémarrage de nos installations », précise Fabrice Padellini, le directeur du site Ineos Polymers de Sarralbe.
Le stockage du propylène, un monomère gazeux, principale matière première du site, a été déporté 40 km à l’ouest, sur la plateforme pétrochimique de Carling-Saint-Avold. Un espace de 1.500m3 y a été remis en service à cet effet par TotalEnergies dans le cadre d’un partenariat avec Ineos et Arkema, autre acteur de ce site. La construction d’une station de pompage et d’un quai de dépotage des wagons permet d’alimenter Ineos Polymers via un pipe-line, sans perte de capacité.
Enfin, l’ultime volet du PPRT à Sarralbe – la mise en sécurité des habitations les plus proches du site chimique – devrait être bouclé d’ici à 2025. Onze habitations devront être détruites suite à des expropriations, tandis que 280 autres feront l’objet de travaux de renforcement de portes, remplacement de vitrages, etc.
Ineos Polymers planche maintenant sur la conversion de ses chaudières au charbon. France Relance a d’ores et déjà validé le cofinancement d'un investissement de 60 millions d’€ porté en partenariat avec Veolia Industries Global Solutions pour convertir ses chaufferies à la biomasse. « Nous devrons trancher cet été sur l’opportunité d’engager ce lourd investissement ou de privilégier une alternative moins coûteuse », précise le directeur du site. Si elle voyait le jour, la future chaudière d’une capacité de 42 mégawatts permettrait d’éliminer 70.000 tonnes de CO2 par an grâce aux déchets de bois.
Deux chaudières au gaz ont été mises en service dès 2022 dans le cadre du PPRT. Elles brûlent du gaz process et du propane en vue de produire de la vapeur utilisée pour la fabrication. Ce propane était jusqu’à présent stocké sur place et transporté par camion-citerne.
Extrudeuse convertie au recyclage des déchets plastiques

Toujours sur le volet de la transition écologique, Ineos Polymers parie aussi sur le recyclage des plastiques. Pour l’instant, la demande des clients demeure inférieure à 1% de la production, mais le site anticipe son accroissement. « Nous avons passé les certifications RSB et ISCC+ garantissant notre engagement dans des démarches d’utilisation de matières premières durables : plastiques biosourcés ou recyclés », pointe le directeur. Par ailleurs, une machine à extruder va être convertie dans le recyclage mécanique du polyéthylène. Elle produira des granulés recyclés à partir d’un mélange de paillettes de déchets plastiques et de matière vierge.
Concernant la production de granulés destinés à des plastiques alimentaires (bouteilles de lait, bouchons, barquettes, films, etc.), l'usine mosellane privilégie une autre voie, celle du recyclage chimique. « Cette opération est réalisée dans d’autres sites du groupe comme Cologne (Allemagne). Les déchets plastiques y sont dépolymérisés en vue d’obtenir des briques de base, les monomères gazeux, que nous transformons ensuite à Sarralbe », complète Fabrice Padellini.
Même si la demande apparaît encore balbutiante, l’industriel confirme ainsi se mettre en ordre de marche afin de répondre aux attentes des consommateurs pour des produits plus « verts ».
(*) La société Ineos Polymers Sarralbe est implantée dans le même bassin d'emploi qu'Ineos Automotive, le repreneur en 2020 de l'usine Smart de Hambach (Moselle) alors propriété du groupe Daimler. Les deux entités distantes de 8 petits kilomètres n'entretiennent cependant aucune relation particulière en dehors du fait d'être toutes deux des filiales du groupe chimique britannique Ineos.
Photos fournies par l'entreprise.