L’arrière-saison est encore favorable à la randonnée dans les montagnes du Jura. Les grands itinéraires, l’Échappée Jurassienne et Les Grandes Traversées du Jura offrent de nombreuses possibilités de découvertes, pour quelques heures ou quelques jours.
Avec son accent « traînant » caractéristique, Josiane Bertonili ne trompe personne. Accompagnatrice de randonnée en moyenne montagne, elle connaît tout (ou presque) des sentiers des montagnes du haut-Jura, pour les avoir arpentés depuis plus d’une vingtaine d’années avec sa petite entreprise Jura Balades, et les avoir repérés auparavant comme hôtesse à l’office de tourisme de Morez.
La zone frontalière du Jura avec la Suisse est traversée par deux grands itinéraires de randonnée : l’Échappée Jurassienne, 350 km de Dole à Saint-Claude, dans le Jura, et Nyon (canton de Vaud, Suisse) qui permet de traverser à pied le massif d’Ouest en Est, en s’affranchissant des frontières ; et Les Grandes Traversées du Jura, 400 km de Mandeure, dans le Pays de Montbéliard, à Culoz, dans l’Ain qui jouxte le pays de Morez, au sud du département du Jura.
Divisés en autant de circuits de quelques jours ou quelques heures, ces sentiers, fort bien balisés, empruntent les crêtes (les sommets les plus hauts jusqu’à 1.720 m au Crêt de la Neige dans le Pays de Gex dans l'Ain) et les combes du troisième plateau, également nommées Hautes Combes, à une altitude moyenne de 1.100 mètres à travers pâturages et forêts.

L’itinéraire qui se partage entre combes et forêts est accessible à tous, avec ses 150 mètres de dénivelé seulement. © Traces Ecrites
Présidente pour le Jura du Syndicat national des accompagnateurs en montagne qui sont au nombre de quelque 80 dans le département, Josiane Bertonili s’est fait une spécialité de la faune et surtout de la flore locale. En cet été caniculaire, le tableau de chasse fut hélas bien maigre.
La grande gentiane à fleur jaune qui pousse dans les alpages au-dessus de 1.000 mètres d’altitude était déjà fanée. L’arrachage de ses rhizomes est soumis à autorisation pour en faire des eaux de vie ou des liqueurs. Comme il lui faut pas moins de huit années pour une première floraison, un prélèvement prématuré pourrait conduire à son extinction.
Les myrtilliers, petits arbustes tapissants dans les forêts, avaient aussi bien du mal à faire grossir leurs fruits. Seuls les épilobes roses apportaient des touches de couleur aux alpages jaunis par le soleil. Et la linaigrette qui se réfugie dans l’humidité des tourbières portait encore les quelques plumeaux blancs qui lui valent le faux nom de plante à coton.


Même la forêt, omniprésente dans le Parc naturel régional du haut-Jura, porte les stigmates du changement climatique. Son ennemi numéro un est, depuis quelques années, un coléoptère nommé bostryche ou scolyte. Il perce des galeries entre l’écorce et le bois des épicéas pour y pondre ses œufs, rompant ainsi le cycle de la sève. « Les aiguilles deviennent rouges, elles tombent puis l’arbre sèche sur pied », décrit Josiane. Percé de milliers de petits trous, les longs troncs rectilignes perdent leur valeur marchande : au lieu de planches pour les meubles, ils sont plutôt transformés en granulés pour le chauffage.
Afin de freiner la propagation de l’épidémie, la communauté forestière recommande « la forêt jardinée ». Déjà bien installée dans le Jura, elle fait côtoyer les résineux – épicéas et sapins – et les feuillus, généralement des hêtres. Petite leçon de botanique sous la fraîcheur des sous-bois : comment reconnaît un épicéa d’un sapin ? Le premier a des aiguilles rondes tandis que celles du second sont plates en dessous. La différence se remarque aussi par leurs cônes : ceux de l’épicéa pendent des branches, celles du sapin se dressent dessus.


par la convention de Ramsar, du nom de la ville en Iran
où un traité de protection de l’environnement a été signé en 1971. © Traces Ecrites
Nombreuses sont les zones humides que le Parc naturel régional du haut-Jura et le programme européen Life aménagent pour les préserver de la fréquentation des visiteurs. Située sur la commune de La Chapelle-des-Bois, entre Mouthe et la station des Rousses, la tourbière des Mortes (*) est inscrite au réseau européen Natura 2000. Elle se découvre en sillonnant sur des platelages. Le sol gorgé d’eau stagnante abrite une flore singulière comme la drosera, une petite plante carnivore, et les sphaignes, une sorte de mousse.
L’eau provient des lacs glaciaires de Bellefontaine et des Mortes qui se côtoient, puis elle va se perdre sous terre pour ressortir 8 km plus loin dans la vallée de la Bienne. Le parcours balisé d’environ 8 km, avec comme repère les villages de La Chapelle-des-Bois et Bellefontaine, a pour point culminant le belvédère de la Roche Bernard adossé à la forêt du Risoux qui suit sur 60 km la frontière suisse, de Morez au sud du Jura, à Pontarlier dans le Doubs. La qualité de ses bois est réputée pour la fabrication d’instruments de musique, nous précise t-on.
(*) On y accède directement au croisement des routes des Marais et du Jura à La Chapelle-des-Bois.

des tuiles d’épicéa, soit par des talvannes, une tôle décorée de losanges.© Traces Ecrites


Quand les eaux sont très fortes, elles forment une cascade en forme de queue de cheval. © Traces Ecrites
En direction de la vallée de Champagnole, ville porte du Parc naturel régional du haut-Jura, les pertes de l’Ain comptent parmi les incontournables du Jura, avec Les cascades du Hérisson. A Bourg-de-Sirod, EDF exploite, depuis 1922, la force hydroélectrique d’un barrage sur l’Ain qui fabrique l’équivalent de la consommation domestique annuelle de 3.500 foyers. Un sentier de 200 mètres suit et surplombe le cours de la rivière qui, il y a 10 millions d’années se perdait sous terre, et désormais dégringole à l’air libre sur la roche calcaire. Sur la route des pertes de l’Ain, à Les Planches-en-Montagne, on découvre le même phénomène géologique aux Gorges de la Lingouette. L’eau de la rivière Saine, affluent de l’Ain, a sculpté une faille de 47 mètres de profondeur, l’équivalent d’un immeuble de 8 étages. Un petit sentier suit son cours.

près de laquelle il installe sa caravane l’été. Cet ancien bûcheron originaire de Bergame (Italie) est fier de raconter son palmarès de cycliste :
plus de 2.000 courses, 5 podiums aux championnats du monde et il y a 5 ans, à 81 ans, sa place de 19ème à La Montée des Forts,
6 km au-dessus de Salins-les-Bains, sa ville d’adoption. © Traces Ecrites

Les auberges ne manquent pas dans le Jura où l’on peut manger et dormir, mais prenez garde, les hébergements sont très recherchés à la belle saison. Proches des lieux de randonnée du périple conté ici, des adresses testées :
• L’Auberge de la Rivière à Foncine-le-Haut au bord de la Saine (ouvert tous les soirs et également le midi le week-end) est depuis juin 2020 l’affaire d’un jeune couple accueillant et talentueux, Jessica Mantel et Julien Caffier, qui ont une expérience commune dans un établissement étoilé à Chamonix, Le Hameau Albert Ier. Pour leurs hôtes de l’hôtel (formule demi-pension) et les touristes de passage (sur réservation), ils préparent un menu du marché avec une petite touche décorative (fleurs, épices) qui met en appétit. Les huit chambres portent chacune le nom d’une rivière du coin et quatre roulottes attendent les personnes qui veulent être plus indépendantes (équipement d’un gîte).
• L’Hôtel-restaurant des Lacs à Chaux-des-Crotenay est le seul à 10 km à la ronde. Autant dire qu’il fait le plein en saison, malgré sa situation en bordure de la route nationale 5, très passante (elle mène à Genève). Dans un décor de montagne, sont servis des plats régionaux pantagruéliques comme l’oeuf à la crème de morilles et le fameux poulet au vin jaune. L’hôtel, repris il y moins d’un an par Laura Gygax et Antony Monge, comprend une vingtaine de chambres et une roulotte posée au bord de la rivière Lemme.
Dans l’un et l’autre de ces établissements, pourquoi diable, les lumières restent-elles allumées même en plein jour en plein été ?
Retrouver les itinéraires de randonnée dans le Jura sur le site de www.montagnes-du-jura.fr