La jeune entreprise caractérise les surfaces des matériaux dans le but de trouver le zéro défaut. Née dans l’agglomération de Metz, V-Optics vient de s’installer à Illkirch, en Alsace, pour franchir un nouveau palier en ciblant autant d’activités industrielles qu’il y existe de matériaux. Elle compte en faire la démonstration au salon BE 4.0, les 30 novembre et 1er décembre à Mulhouse.
Annoncée comme cela de façon abrupte, la « déflectométrie à décalage de phase » ne passionnera sans doute pas les foules. Mais derrière cette terminologie difficile se cachent des implications fortes et bien concrètes. Elle désigne un modèle mathématique qui reconstitue l’état de surface, par l’émission régulière d’un champ lumineux à balayage horizontal et vertical des surfaces à caractériser.
L’analyse de la déviation des rayons lumineux qui traversent ou « ricochent » étant au cœur du procédé. Il est ainsi possible de détecter les irrégularités d’une surface, ou de s’assurer de sa parfaite planéité. Ce procédé s’applique aux supports les plus courants, dès lors que leur surface réfléchit la lumière ou est transparente : verre, métal, papier, textile, plastique…
Ce domaine est celui de V-Optics. Cette société s’est installée en début d’année à Illkirch (Bas-Rhin) pour engager la nouvelle phase de son existence, débutée formellement en 2018 dans l’agglomération de Metz (Moselle) mais déjà en héritage d’une activité antérieure d’une vingtaine d’années. V-Optics est née du rachat des actifs de Visuol, société elle-même issue des travaux de recherche dans l’acier d’une équipe de l’Irsid, le grand centre de R&D d’ArcelorMittal.
Des associés de cette précédente aventure et des fonds (Ader Investissement en Lorraine, Arts & métiers business angels) ont alors fondé V-Optics, autour de Patrick Siedel. Avec l’intention de franchir un cap : « L’activité était orientée vers des applications de laboratoire. A la reprise, nous avons conservé la technologie, mais avec le projet de se développer dans des applications industrielles, reproductibles à une certaine échelle et permettant aux clients d’atteindre des objectifs de zéro défaut, de hausse de productivité, de meilleure traçabilité et in fine de mise en œuvre de l’industrie 4.0 », décrit Patrick Siedel, président de la PME.
Une extension était nécessaire en conséquence, et c’est dans l’agglomération de Strasbourg que V-Optics la concrétise, à Illkirch, suite aux recherches effectuées par l’agence de développement alsacienne Adira. Le transfert s’est accompagné d’un investissement de près d’1 million d’€ en locaux et en matériel. Il est porté pour le compte de la société par six de ses actionnaires, avec les concours de la région Grand Est, de Sodiv et de Bpifrance. La société s’est implantée dans 550 m2 qui lui permettent de poursuivre ses travaux d’analyse et de métrologie, sur des échantillons précis tels les implants ophtalmiques, contrôlés à l’unité ou par lots.
De l’optique à usage médical à de multiples applications en industrie

La grande majorité de l’activité se concentre dans l’optique à usage médical, les lentilles de contact et les implants ophtalmiques en premier lieu. V-Optics compte comme premier client l’allemand Carl Zeiss Meditec, un leader de ce secteur. Son matériel permet le contrôle des implants intraoculaires avec davantage de précision et d’efficacité : il peut non seulement détecter des défauts éventuels et des non-conformités, mais aussi mesurer la puissance optique en une seule opération.
« Nous travaillons avec 80 % des fabricants de lentilles dans le monde et les projets avancent bien », expose le dirigeant. Dans le médical toujours, les développements de V-Optics pourront se porter sur d’autres dispositifs, dès lors que le seuil de rentabilité sera atteint sur le premier segment de l’optique.
La variété des matières qui peuvent être analysées orientent la PME vers de nouveaux horizons, d’ores et déjà conquis : la papeterie (Clairefontaine pour le contrôle de la qualité du papier), l’industrie automobile (Faurecia, Renault…) pour les pare-brise en particulier dont la zone dite « caméra » d’aide à la conduite, l’industrie des peintures pour les contrôles d’aspect, les thermoplastiques, l’aéronautique, la défense (Nexter) pour le contrôle de vitrages renforcés.
V-Optics se sent ainsi pousser des ailes. « Nous avons démarré à cinq il y a trois ans, nous nous sommes installés à 11 en Alsace et nous allons continuer à augmenter les effectifs », souligne Patrick Siedel. Ceux-ci se situent désormais à 14 collaborateurs, répartis entre huit salariés à demeure (en développement, production, ventes et support administratif), deux prestataires, un consultant et trois apprentis.
Le chiffre d’affaires 2020, proche de 800.000 €, est resté inférieur aux prévisions du fait de l’impact de la Covid-19 sur l’automobile et l’aéronautique. Pour cette année, Patrick Siedel avance une perspective « d’augmentation sensible », mais avec les prudences qui s’imposent.

Le président de V-Optics peut se prévaloir de trente ans d’expérience antérieure dans l’industrie, en particulier la métrologie. Il a dirigé des sites de Schlumberger-Actaris-Itron (au gré des changements de noms de propriétaires de cette branche métrologie du groupe international) en Europe, en Asie et en Amérique du sud dont celui de Reims pendant dix ans.
Devenu consultant en management de transition et investisseur, en 2013 il a accompagné plusieurs start-up du Grand Est dans ce cadre. Il a participé en 2018 à la création de V-Optics, qu’il préside, épaulé par Jean-Yves Hergott, directeur des opérations et Simon Jung, directeur commercial.
Photo : Patrick Siedel a participé en 2018 à la création de V-Optics. © Traces Ecrites