Jusqu'alors directeur de Japy Tech, Philippe Breiss est devenu, le 1er janvier, l’actionnaire majoritaire du spécialiste de la fabrication de tanks et de silos à lait implanté à Saint-Apollinaire (Côte-d’Or). Il a l'ambition de faire progresser le chiffre d’affaires de moitié d’ici à 2030 en continuant de miser sur l’innovation, point fort de la PME.


« Nous sommes plus connus au Chili qu’à Dijon ! » Philippe Breiss ne cache pas l’admiration qu’il a éprouvée, dès son arrivée à Dijon, pour Japy Tech, le leader européen de la conception et de la fabrication de tanks à lait dont il a été nommé directeur en 2021. Le mandat lui venait alors du fonds Mutares peu après son rachat de l'entreprise au groupe allemand GEA qui était propriétaire depuis 1998. Désormais, c'est Philippe Breiss qui a les clés : il est devenu l’actionnaire majoritaire de la société le 1er janvier dernier.

De fait, l’outil de production, qui s’étend sur 26.000 m2 à Saint-Apollinaire, est impressionnant. Les équipes d’ouvriers qualifiés déploient de hautes compétences dans la découpe, le meulage et la soudure de l’inox, afin de produire un millier de tanks ou silos à lait chaque année. Installés dans des élevages, ces équipements recueilleront le fruit de la traite en le maintenant à 4 degrés pendant un à trois jours, avant le transvasement vers les camions approvisionnant les laiteries. « Au cœur de notre savoir-faire se trouve l’évaporateur, reposant sur une technologie de refroidissement éprouvée depuis les années 1970 », résume Guillaume Gentilhomme, directeur industriel.

 

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Le respect des exigences réglementaires et de sécurité sanitaire tient lieu d'obsession pour les équipes de Japy Tech, qui détient 15 à 20 % de parts de marché en France et même 25 à 30 % en Allemagne. À titre d’exemple, la paroi intérieure des cuves doit présenter une rugosité d'à peine 1 micron afin d’éviter le développement des bactéries. L’outil industriel lui-même est de haut niveau. Il comprend, en particulier, une presse à emboutissage à double poussée comme il n’en existe que six modèles dans le monde.  

 

Conception et fabrication maison

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L'entreprise de Saint-Apollinaire à côté de Dijon emploie 135 personnes, dont de nombreux ouvriers hautement qualifiés en soudure et meulage. © Patrice Bouillot


Aussi bien les cuves (horizontales et installées dans les étables), d’une capacité unitaire de 1.000 à 33.500 litres, que les silos (verticaux jusqu'à 7,5 mètres de haut et 3 mètres de diamètre implantés en extérieur) de 6.000 à 40.000 litres sont des produits « maison », conçus par un service recherche et développement d’une dizaine de personnes et intégrant des composants fabriqués à 85 % sur le site de Saint-Apollinaire.

Ils intègrent un bloc froid et un moteur qui permettent d’activer une pale pour remuer le lait et ainsi assurer une température homogène à l’intérieur de la cuve. Si quelques pièces de ces équipements sont achetées, l’assemblage est assuré dans l’usine. « Le maintien des compétences en interne fait partie de notre stratégie, souligne Philippe Breiss. C’est la raison pour laquelle nous avons internalisé l’opération de bordage, que nous confiions jusqu’à présent à un sous-traitant italien. Nous avons acquis une machine transalpine, la Rolls des bordeuses, pour un montant de 250.000 €. Cette opération nous a permis de réduire les délais, les coûts et l’impact carbone… et de gagner en souveraineté. »

 

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Le nouveau dirigeant de Japy Tech entend ainsi poursuivre l’aventure initiée en 1920, à Dijon, par la famille Hugonnet qui fabriquait au début des bidons de lait. Trois ans après le rachat de la branche des activités laitières du Bisontin Japy, en 1957, l’entreprise s’installait à l’extérieur de Dijon, sur un terrain de 11 hectares qui lui permet encore aujourd’hui d’envisager sereinement son développement. En 1964, ses ingénieurs inventèrent le tank à lait réfrigéré, qui fera la célébrité de la société dans le monde entier : elle réalise actuellement à l'export 85 % de son chiffre d’affaires, situé à 19,4 millions d'€ en 2021.

 

Un tour de table avec UI Investissement et des banques

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Philippe Breiss, nouveau dirigeant de Japy Tech, a accueilli le 12 janvier Marie-Guite Dufay, présidente de la région Bourgogne-Franche-Comté, et Bénédicte de Chevigny, directrice associée d’UI Investissement. © Patrice Bouillot


L’opération de transmission qui vient d’aboutir a été réalisée avec l’appui d’UI Investissement, qui a mobilisé le fonds Défis 3 porté par la région Bourgogne-Franche-Comté (*), ainsi qu'un tour de table bancaire associant la Caisse d’épargne Bourgogne-Franche-Comté, la Banque populaire Bourgogne-Franche-Comté, le Crédit agricole Champagne-Bourgogne et Bpifrance. Le montant de l’opération n’a pas été communiqué. « Notre engagement aux côtés du dirigeant est guidé par trois facteurs, souligne Bénédicte de Chevigny, directrice associée d’UI Investissement. D’abord, la volonté de relocaliser un centre de décision en région. Puis, la qualité du projet porté par l’équipe. Enfin, la qualité des produits Japy Tech. »

« Nous avons été rassurés par le fait que le repreneur dirigeait l’entreprise depuis deux ans déjà et nous avons été séduits par l’engagement des équipes et la culture d’entreprise », ajoute Patrick Blasselle, directeur associé d’UI Investissement.

 

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Désormais à la tête de cette entreprise de 135 personnes (soit 11 de plus qu’en 2021), Philippe Breiss affiche ses ambitions : porter le chiffre d’affaires à 30 millions d'€ à l’horizon 2030, soit une progression de 50 %. Pour cela, il mise plus que jamais sur l’innovation au service de la qualité et de la transition écologique, avec notamment le lancement d’une gamme de cuves connectées et du service Möbius consistant à racheter des tanks dans les fermes pour les rénover et les remettre sur le marché. « Des recrutements seront nécessaires, souligne le dirigeant. Notamment pour d es postes d'ouvriers – soudeurs, meuleurs, frigoristes – et de commerciaux. »

Dans un contexte de hausse du coût des matières premières – le cours de l'inox a été multiplié par trois en deux ans –, Japy Tech a pu opérer la répercussion sur le prix de vente de ses tanks, qui a augmenté de 20 à 30 %. Face à la hausse du coût des énergies, l’entreprise a déjà réduit à quatre le nombre hebdomadaire de journées de production. Elle ijnvestit dans la sobriété énergétique et envisage de coiffer son parking de panneaux photovoltaïques.   

 

Un nouveau fonds régional de capital-risque pour l’agroalimentaire

  À l’occasion de sa visite chez Japy Tech, ce jeudi matin 12 janvier, qui saluait notamment la participation à la transmission de la PME du fonds régional Défis 3, la présidente de région, Marie-Guite Dufay a annoncé la création imminente de BFC Participations, « fonds de capital-risque dédié au développement des entreprises du secteur agroalimentaire dont l’objectif est de maintenir l’ancrage territorial des groupes industriels ». Cet outil financier sera doté d’emblée de 3,5 millions d’€. La direction du nouvel organisme sera confiée à Alain Cannard, dirigeant qui a mené sa carrière dans l’industrie fromagère.

 

(*) depuis sa création, Défis 3 a apporté son soutien à 30 entreprises, aboutissant à la création ou au maintien de 3. 000 emplois.

 

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