NOTES DE VOYAGE/RHÉNANIE-PALATINAT. Ce Land allemand, moins connu que la Bavière ou que la Forêt-Noire dans la Bade-Wurtemberg, a tous les mérites pour attirer. Frontalier, c’est un pays viticole, aux paysages souvent grandioses.
Pour l’apprécier, il suffit de parcourir la route des vins qui s'étire sur 85 km dans le Palatinat, de suivre le cours de la Moselle (250 km sur ses 544) en levant les yeux sur les coteaux abrupts ou encore de flâner en bateau promenade sur le Rhin jusqu’au rocher de la Lorelei.
Cette terre est aussi très francophile et souvent francophone, aux antipodes des clichés montrant une cuisine roborative, un humour pesant, une rigueur outrancière ou encore un goût musical, soit trad, style Bavarois, soit destroy, en mode thrash métal. A l’exception toutefois d’une ponctualité toute germanique et un rien tatillonne qui horripile.
Hôte d’honneur de cette 86ème foire de Dijon, avec un pavillon de 920 m2 situé pour la première fois dans le grand hall, la Rhénanie-Palatinat, jumelée avec la Bourgogne depuis 60 ans, mérite une escapade prolongée.

• Un peu d’histoire.
L’un des seize états fédérés composant la République Fédérale d’Allemagne est né officiellement, en dépit de l’opposition de Konrad Adenauer qui n’était pas encore chancelier, par l’ordonnance n°57, du 30 août 1946 signée du général français Koenig.

Le Land de Rhénanie-Palatinat a pour capitale Mayence. Cette ville a aussi été la première république d’Allemagne après la chute du Saint-Empire romain Germanique en 1793. L’enfant du pays, Johannes Gensfleisch zur Laden zum Gutenberg, dit Gutenberg, né vers 1400 et mort le 3 février 1468, la rend célèbre.
On lui doit l'invention des caractères métalliques mobiles dans l’imprimerie. Parmi ses réalisations majeures : la Bible, dont les 49 exemplaires encore existants dans le monde valent chacun plusieurs millions de $.
De 1798 à 1815, les armées de Napoléon occupent une partie du territoire qui forme la République Cisrhénane, dont trois des quatre départements qui la composaient porte les noms de Mont-Tonnerre avec comme chef-lieu Mayence, Rhin et Moselle avec Coblence et Sarre, avec Trèves.
Fondée à l'époque romaine, en l'an 16 av. J.-C. environ sous le nom d'Augusta Treverorum, cette cité de 106.100 habitants vit naître Karl Marx en 1818. Parmi ses monuments les plus connus : la Porta Nigra (Porte Noire), l’amphithéâtre et les thermes impériaux, qui sont classés au patrimoine mondial de l’Unesco.
• Le Rhin.

Pour évoquer ce long serpent bleu de 1233 km, aussi majestueux que tempétueux, parlons aussi romantisme. De Mayence, la capitale, au confluent du Main et du Rhin, à Coblence, lové entre Moselle et Rhin, nombre de peintres de poètes et d’écrivains y puisèrent leur inspiration. Citons notamment Clemens von Brentano, Achim von Armin, les frères Schlegel.
Victor Hugo céda aussi à son charme mystérieux. Il décrivit de manière inquiétante la tour aux Souris (Mäuse Turm) lors de son passage à Bingen en 1840. Le musée historique du fleuve, Hildegard von Bingen, explique ce bouillonnement intellectuel.

Vu des hauteurs, le Rhin impressionne plus encore. De sa vallée très encaissée, pointent des dizaines de châteaux plantés sur des éperons rocheux. Peu avant la ville de Saint-Goar, le fleuve serpente dans un couloir jusqu'au célèbre rocher de la Lorelei, cette fille aux longs cheveux dorés qui aurait pris au piège et englouti le batelier et son canot.
Aujourd’hui, c’est fort heureusement très rare avec la puissance des moteurs des coches d’eau, péniches à grand gabarit et pousseurs de barges à conteneurs. Leur va-et-vient incessant est aussi un spectacle et ne pas s’offrir une ballade dans ses méandres en dégustant l’un des crus locaux, serait ignorer un plaisir très avouable.

• Des vins où trône le roi Riesling.

L’Allemagne est productrice de vin, mais peine à les exporter. Et pourtant, les 160 000 producteurs qui se répartissent en 13 régions viticoles sur 102.000 hectares (65% de blancs et 35% de rouges) ont fait d’énormes efforts pour proposer des vins de qualité.
L’Institut du vin allemand et ses 10 millions d’€ de budget par le voix de Steffen Schindler, dans un français impeccable, l’atteste. Qui sait ainsi qu’outre-Rhin, on revendique la troisième place mondiale pour les plantations en Pinot noir (11.784 hectares), le cépage du bourgogne rouge.
Qui suspecte aussi l’Allemagne d’être le premier importateur de vin au monde ? Sauf à préciser que les trois quarts y sont juste embouteillés pour être réexpédiés à l’exportation.
Qui peut dire par ailleurs quels vins boit un Allemand ? Réponse : à 45% des vins de chez lui et à 16% des vins d’Italie. La France n’arrive que troisième avec 13% de la consommation.
Un vin allemand très aromatique se détache de toutes les productions régionales : le Riesling. A force d’efforts, il a ressuscité et fédère aujourd’hui une génération de jeunes producteurs, baptisés Génération Riesling (500 membres).
Le salon Vinidivio, du 3 au 7 novembre, accueillera 20 vignerons des six régions viticoles de Rhénanie-Palatinat, proposant à la dégustation un total de 95 vins. Silvaner, Pinot gris, Riesling, Gewürztraminer, Pinot blanc, Pinot meunier, Rivaner, Pinot noir… s’offriront aux palais des visiteurs.

On en retiendra un seul et de manière très arbitraire : celui de Thomas Siegrist qui exploite 16 hectares sur 72 parcelles. Il a, il y a 40 ans, fait vieillir ses vins en fût de chêne : une révolution qui l’a placé au banc des accusés. Mais tout le monde maintenant respecte, voire imite, son initiative.
A Vinidivio, Thomas Siegrist proposera cinq vins magnifiques : un sauvignon blanc 2015, un Pinot noir Ilbesheim 2014 ; un autre Pinot noir Lössriedel 2011 premier cru ; un Chardonnay réserve 2012 premier cru et un Riesling Sonnenberg grand cru 2012.

• La Rhénanie-Palatinat en quelques chiffres.
- 19.853 km2 de superficie.
- 4 millions d’habitants.
- 70% des vins allemands y sont produits sur 23.613 hectares par plus de 20.000 entreprises viticoles.
- 180.000 hectares de forêt.
- Pas moins de 1.500 châteaux et forteresses.
- Quatre sites classés au patrimoine de l’Unesco : Trèves, Spire, la vallée du haut-Rhin et le Limes Romanus, cette ligne de démarcation de 550 km qui séparait jadis l’empire romain des germains, dits libres.


Toutes les photos sont au crédit de Traces Ecrites.