Le groupe pharmaceutique allemand attribue à son site alsacien cinquantenaire un spectaculaire projet d'extension : une nouvelle unité de production de poches stériles en polyéthylène pour les vaccins et traitements de biothérapie. Un signe de plus de la place décisive de Molsheim dans sa stratégie mondiale.
Merck donne un gros coup d'accélérateur à son projet « Mobius » à Molsheim (Bas-Rhin) du nom de ses assemblages à usage unique, constituant des poches stériles. Au printemps 2021, le groupe pharmaceutique allemand avait annoncé la création d'une nouvelle unité de tels produits pour un investissement de 25 millions d’€ et la création de 350 emplois. Ce 8 septembre, il a dévoilé 130 millions d’€ supplémentaires. Cette nouvelle phase d'expansion déclenchera 800 embauches : il faut remonter loin dans le temps pour trouver trace d'une vague si forte de recrutements d'un seul tenant dans la pourtant bien portante industrie alsacienne.
Le projet prévoit la construction d’un bâtiment de 3.500 m2 de salles blanches, complété d’un centre logistique, d’un bâtiment à usage tertiaire incluant un nouveau restaurant d’entreprise et d’un second parking aérien (720 places).
Au total, douze lignes d’assemblage et trois lignes de fabrication de poches automatisées sont prévues pour confectionner quatre gammes de produits, et couvrir ainsi la quasi-totalité du marché européen. Le chantier vient de démarrer, dans l'objectif d'une mise en service fin 2024.
Les assemblages à usage unique Mobius sont utilisés par les fabricants de vaccins et les clients développant des biothérapies pour lutter contre le cancer ou les troubles de la fécondité. « Ces dernières années, de nombreux acteurs se sont tournés vers les technologies à usage unique pour leur flexibilité, leur rapidité de mise en œuvre, la réduction des coûts et la limitation des risques de contamination, ce qui a entraîné une croissance à deux chiffres pour ce segment sur le marché. La pandémie a significativement renforcé cette tendance. Cet investissement permettra par conséquent d'accélérer la livraison des produits et technologies essentiels pour apporter des traitements révolutionnaires aux patients dans le monde entier », affirme Matthias Heinzel, membre du comité de direction de Merck et patron de la branche Life Science dont Molsheim fait partie.
Le challenge du recrutement

Suite aux annonces de l'an dernier, deux lignes d’assemblage ont été installées dans un local modulaire et les premiers lots ont été mis sur le marché en décembre 2021. Trois autres lignes d’assemblage, opérationnelles depuis mai dernier, ont pris place dans un bâtiment existant. En parallèle, trois autres lignes de fabrication de poches sont en cours de validation pour un démarrage en routine prévu en ce mois de septembre 2022.
Cette série d'installations porte la capacité du site à 250.000 poches stériles par an, et la nouvelle phase ambitionne de doubler ce chiffre. Concernant les profils recherchés pour les 800 nouveaux postes, « ils se répartissent en 80 % d’opérateurs de production et 20 % de fonctions support : techniciens de laboratoire, techniciens de maintenance et emplois d'encadrement », détaille Romina Marcovici, directrice du site.
« Trouver cette main d'œuvre sera notre principal défi », a reconnu jeudi Matthias Henzel, a fortiori dans un bassin si prospère qu'il est en quasi-plein emploi. Le site de Molsheim emploie aujourd’hui 2.100 salariés, ce qui fait déjà de lui le troisième plus gros du géant Merck (62.000 salariés pour un chiffre d'affaires proche de 20 milliards d'€ en 2021). Avec la montée en puissance supplémentaire qui s'amorce, il devrait passer à 3.000 collaborateurs dans six ans.
Le hub européen du programme Mobius

Avec Danvers aux États-Unis et Wuxi en Chine, Molsheim devient le troisième site de Merck à produire des dispositifs à usage unique. La nouvelle étape du projet Mobius s’inscrit dans la stratégie de l’industriel consistant à régionaliser les capacités de production, et ainsi à positionner le site alsacien comme son hub européen dans cette spécialité. Ces grandes poches en polyéthylène - une alternative aux traditionnels réacteurs en inox - représentent une diversification pour le site de Molsheim, venant après les produits de contrôle microbiologique dans le milieu pharmaceutique et agroalimentaire, les appareils de purification d'eau pour les laboratoires, et la conception-fabrication d'équipements pour les industries pharmaceutiques et de biotechnologie. « Toutes ces spécialités seront d'une taille à peu près équivalentes. Nous veillons à ne pas mettre tous nos œufs dans le même panier », précise Romina Marcovici.
Photos fournies par l'entreprise.