Sa ligne industrielle à peine lancée, dans la Marne, la start-up lorraine Replace engage une levée de fonds afin de déployer son concept de valorisation des plastiques multi-composants. Le soutien de l’Ademe et du plan France relance a permis l’industrialisation de son procédé, pour une première utilisation, des tuteurs pour le vignoble champenois.
Des tuteurs de vignes fabriqués à partir de déchets de plastiques multi-composants non recyclables. Il fallait y penser. Cette solution durable mise au point il y a tout juste trois ans par Replace à Woippy (Moselle) est en plein déploiement industriel. Les fondateurs de cette start-up de 3 personnes préparent une levée de fonds de deux millions d’€ environ, afin de se déployer dans l’Hexagone.
Leur innovation placée sous le sceau de l’économie circulaire a été labellisée par la fondation Solar Impulse de l’explorateur Bertrand Piccard. Elle se fonde en effet sur trois piliers : une ligne de production industrielle brevetée, la valorisation de gisements locaux de déchets destinés à l’incinération et des produits à faible impact carbone répondant aux besoins du territoire.
« Nous ne ciblons pas les gisements de PET (polytéréphtalate d'éthylène) issus de l’embouteillage et du textile, car les filières de recyclage fonctionnent bien. Nous ciblons davantage le polypropylène ou encore le polyéthylène, notamment lorsqu’ils sont pollués par d’autres matériaux. L’exemple du masque chirurgical est emblématique. Sa partie textile est constituée de trois couches de polypropylène, ses élastiques sont en élasthanne, sa barrette nasale métallique est recouverte de plastique. Cela coûterait une fortune à séparer avant recyclage ! », souligne Laurent Villemin, cofondateur de l’entreprise.
Le business-model de Replace (chiffre d’affaires de 200.000 € en 2021) a été mis au point avec l’appui de The Pool à Metz, l'incubateur de start-up labellisé par la Région Grand Est. Il repose sur un procédé simple, peu coûteux et peu énergivore déjà décliné dans la Marne. Replace a en effet mis en route début 2022 dans d’anciens ateliers industriels à Sainte-Menehould, une ligne capable de produire 1.000 tonnes par an de tuteurs.
Commercialisés auprès des viticulteurs champenois par Keepfil (Aube), ces produits viennent avantageusement remplacer leurs homologues en bois dont le traitement par créosote – un dérivé toxique du goudron – est interdit depuis trois ans. « À partir du moment où nous sommes en mesure de produire des poteaux et des planches, nous savons tout faire ! Notre matériau se travaille comme du bois : Il peut être percé, cloué ou encore usiné », expose le dirigeant qui table sur un chiffre d’affaires de 2 millions d’€ en 2022.
Tubes de dentifrice et coiffes de Champagne

A Sainte-Menehould, à l’entrée de la ligne, se trouvent quatre big bags. Le premier est rempli de chutes de production de tubes de dentifrice, le deuxième de purges de granulateurs à plastiques, le troisième de déchets automobiles et le dernier de coiffes de bouteilles de Champagne, un mélange d’aluminium et de plastique. Les matières préalablement broyées sont mélangées puis chauffées dans une machine d’extrusion d’une capacité de 250 kg par heure, avant d’être homogénéisées et moulées dans une machine mise au point en partenariat avec le suisse Aisa.
« Nous avons imaginé une ligne de production de facture simple qui puisse être pilotée par des opérateurs sans qualification spécifique. Ainsi,notre unité de Sainte-Menehould est gérée par cinq travailleurs de l’entreprise adaptée Argonne Production », poursuit Laurent Villemin. L’investissement de 1,3 million d’€ dans cette première ligne a été soutenu à hauteur de 500.000€ par l’Ademe dans le cadre du programme Orplast (Objectif recyclage plastiques) et par la Région Grand Est. Le projet a également reçu le soutien de la plateforme technologique Plastinnov.
Qui sont Laurent Villemin et Christian Horn ?

Les deux cofondateurs de Replace bénéficient d’une expérience en béton. Laurent Villemin a œuvré près de trente ans dans l’industrie de la transformation des plastiques et des caoutchoucs auprès des leaders de ces marchés. Il a notamment supervisé une quinzaine de sites de production européens du spécialiste du packaging Albéa, un groupe de 12.500 personnes. Sa rencontre avec Thierry Horn lui a permis d’approfondir la problématique de gestion des plastiques après utilisation. Le second co-fondateur de Replace a en effet développé en 1995 des palettes en plastique recyclé, actuellement encore utilisées dans l’industrie européenne des câbles en acier. Il a également mis au point un concept de recyclabilité des surplus issus de la fabrication des étiquettes auto-adhésives.