L’entreprise commune à l’équipementier automobile Faurecia et à la coopérative agricole de Haute-Saône Interval commence à séduire les constructeurs automobile pour des pièces non apparentes du véhicule. Elle sort d’une longue période sous l’éteignoir, tant il est difficile convaincre des acheteurs de ce secteur, exigeants à l’extrême et peu aventureux dans les nouveautés de cette nature.

 

Pierre Demortain, le directeur général d’APM (*), l’assure sans forfanterie : « de 3 millions de véhicules équipés de composants masqués issus de nos granulés en plastique biosourcés à base de chanvre, nous allons passer rapidement à 13 millions. »
Les contrats seraient déjà signés au profit de cette co-entreprise dijonnaise de l’équipementier automobile Faurecia et de la coopérative agricole franc-comtoise Interval (**).

 

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« Avant ce bond en avant, le chemin a été toutefois très long », s’empresse d’ajouter cet ingénieur de formation de 38 ans qui a travaillé une dizaine d’années chez Faurecia, pour notamment piloter les projets de développement de l’habitacle.
APM a ainsi perdu de l’argent durant seize ans et ne commence à remonter la pente que depuis trois ans, au point d’afficher une croissance d'activité de 50% et d’espérer atteindre un  chiffre d’affaires de 8 millions d’€ avec un effectif de 40 salariés.

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Mise en oeuvre d'un composant automobile à base de chanvre chez Faurecia. © APM.

Le comportement plus que frileux des acheteurs du secteur automobile devant les nouveautés de ce type, à quoi s’ajoute une réputation terrifiante de chasseurs de coûts, l’expliquent en grande partie.
« Je suis parti avec mon bâton de pélerin et ils nous a fallu convaincre sur l’ensemble de notre concept en termes de qualité, de fiabilité et de facilité de mise en œuvre », argumente le dirigeant.

Culture de 2.000 hectares de chanvre

L’attribution par l’Ademe d’un programme d’investissement d’avenir (PIA) de 8 millions d’€ (2015-2020) a permis de booster la recherche, en collaboration avec le groupe Faurecia et le centre troyen Fibres Recherche Développement (FRD), tout spécialement pour éradiquer la moindre odeur au produit final.

 

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L’entreprise livre aujourd’hui une quatrième formulation de granulés biosourcés. Elle intègre de 20 à 25% de fibres de chanvre et fait recette auprès de Renault, PSA, Alfa Romeo (Fiat) et Jaguar Land Rover (groupe indien Tata).
« Sur la Megane Renault, nous gagnons 1,25 kg avec notre planche de bord et 400 grammes sur le panneau de porte de la 308 Peugeot sans avoir le moindre retour de non qualité », certifie Pierre Demortain.

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© Traces Ecrites.

Car APM ne fait pas que distribuer ses granulés dans une quinzaine d’usines européennes, elle épaule ses clients dans la mise en œuvre de leur process de production, surtout pour le réglage de la température d’injection qui doit être millimétrée.
Seul problème non résolu à ce jour : aucun constructeur ne suggère le composite pour des pièces d’aspect, c’est-à-dire visibles, en raison d'un rendu de la couleur non uniforme hérité des poussières de chévenotte (tige de la plante).

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Le producteur dijonnais achète son chanvre, de l’ordre de 2.500 tonnes par an, chez Eurochanvre, filiale de la coopérative Interval installée à Gray (Haute-Saône) qui cultive 2.000 hectares de ce végétal sobre comme un chameau et n’ayant aucun besoin de produits phytosanitaires. Une plante idéale pour la planète somme toute.

(*) APM, pour Automobile Performance Materials, est l’héritière d’AFT Plasturgie que les producteur de chanvre de la Chanvrière de l’Aube et d’Interval avaient créée en 2001.
(**) Interval fédère 4470 exploitants agricoles et réalise 200 millions d’€ de chiffre d’affaires.

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Pierre Demortain, directeur général d'APM. © APM.
2 commentaire(s) pour cet article
  1. Pierre Demortaindit :

    Bonjour, Votre question prend tout son sens dans des systèmes complexes comme une planche de bord automobile, où de nombreuses technologies s'entremêlent effectivement. Le déploiement en cours de nos matériaux biosourcés prend précisément sa source dans un long travail sur la mise en oeuvre de ces nouveaux matériaux, tant au niveau produit que process, au delà des qualités intrinsèques de la matière donc. C'est ainsi que nous avons procédé à la vérification et calibration de la faisabilité de toutes les technologies dites de "post-processing", en termes de soudure (par vibration, par ultrason, ..), d'assemblage, et donc de finition comme vous le mentionnez, avec des tests d'adhésion réalisés avec succès selon les exigences les plus sévère du marché (Volvo, Audi). C'est aujourd'hui ce niveau de validation d'une innovation en amont qui permet de nous interfacer efficacement avec nos clients en termes de conduite de changement préparée et sécurisée dans son execution !

  2. denis christendit :

    Bonjour, Félicitations pour votre persévérance. Un succès ne laisse souvent qu'entrapercevoir tous les efforts nécessaires à convaincre et vaincre.Une question pour ma compréhension; la planche de bord est généralement injectée avec une mousse de polyuréthane, vos granulés sont "mélangés" au plastique de l'insert je présume, quid de l'adhérence entre les deux ? Bonne journée à vous Denis

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