Laurent Droxler (à gauche), responsable du site 3 des AST, présente les fiches de poste adaptées aux travailleurs handicapés à Javier Varela, directeur de l'usine PSA de Sochaux (à droite).
Laurent Droxler (à gauche), responsable du site 3 des
AST, présente les fiches de poste adaptées aux travailleurs handicapés à Javier Varela, directeur de l'usine PSA de Sochaux (à
droite).

HANDICAP. C’est un fournisseur automobile à la fois comme les autres et pas comme les autres.

Employant 500 travailleurs handicapés dont 380 à la préparation de pièces pour PSA, les Ateliers spécialisés de Technoland (AST) à Etupes (Doubs) ont récemment ouvert grandes leurs portes à la direction de l’usine de Sochaux.

Ils sont de grands adeptes du dessin.

Cliquez sur les photos pour les agrandir.

Ces ateliers répartis sur quatre sites sont de véritables ruches qui, chaque jour, soudent 22 000 pièces, assemblent 11 000 câbles de batterie ou de liaisons de boîtes électroniques et batteries et montent 16 000 produits (boîtes de cric, blocs ABS…).

Ils travaillent pour un client unique, PSA, mais des sites multiples : le voisin Sochaux bien sûr, Mulhouse, Vesoul, mais aussi Rennes, Sevel Nord et l’étranger, de Vigo en Espagne, à Wuhan en Chine en passant par Trnava, en Slovaquie et Kaluga, en Russie.

Cette diversité leur a permis de lisser l’impact des baisses d’activités. Les Ateliers spécialisés de Technoland ont connu du chômage partiel en 2012, mais ont tout de même tourné à 90 % de leurs capacités.

Sur le site Etupes 3, on retrouve l'organisation en lignes de production caractéristique des usines automobiles, avec leurs panonceaux en suspension au-dessus des opérateurs.

La référence en chiffres de la pièce à traiter apparaît bien,  mais pas le nom de la pièce : il est remplacé par un petit dessin.

La surprise devient plus totale encore quand  on observe de plus près, ce qui est représenté : un arrosoir, une fusée, un crocodile, un poisson, un camion … Quel rapport avec le geste à effectuer ? En soi, aucun. 

C’est tout simplement le langage codé par lequel se transcrit la tâche à accomplir pour des salariés souffrant de déficience intellectuelle plus ou moins importante.

« Nous avons créé ce dispositif il y a vingt ans, il s’est développé au fur et à mesure ; nous comptons plusieurs centaines de motifs différents », souligne Jean-Michel Laforge, directeur des AST.

L’assemblage de composants donne des « résultats » qui viennent défier les lois de la nature : le hibou noir et la brouette violette donnent naissance à l’escargot gris qui correspond à un câblage fini ! Un schéma de montage vient compléter l’information.

La transcription du nom des pièces et des tâches en une série de pictogrammes aident à la bonne compréhension des employés.
La transcription du nom des pièces et des tâches en une série de pictogrammes aident à la bonne compréhension des employés.

Pour certaines opérations complexes, l’image fixe, jugée insuffisamment éloquente,  fait place à une vidéo. C’est le cas pour la pose d’un allume-cigare.

« Nous utilisons aussi la vidéo pour présenter l’ergonomie d’un poste », ajoute Laurent Droxler, responsable du site 3.

Ici aussi, on traque les rebuts, on cherche à réduire le temps de cycle. On parle lean ou plutôt BPHI (Bonnes pratiques humaines et industrielles).

Les AST se sont engagés dans la démarche en 2010, ils s’appuient sur le programme BPHI et la formation du même nom développée par l’Université de technologie de Belfort-Montbéliard (UTBM).

La chasse aux coûts est d’autant plus nécessaire que l’établissement possède les « contraintes » de la particularité de ses effectifs. Les travailleurs handicapés sont encadrés par une quarantaine d’éducateurs et avec 11 millions d’€ annuels, on est bien sûr loin des ratios standards de chiffre d’affaires par salarié.

Si par bonheur l’activité augmente en masse, les AST ne peuvent ajuster leurs effectifs avec la même souplesse qu’un sous-traitant lambda faisant appel à l’intérim. Les personnes aux handicaps les plus importants, qui relèvent de l’Esat (établissement de service et d'aide par le travail), fonctionnent en postes de journée classique, matin et après-midi.

Celles en entreprise adaptée sont organisées en double poste et le magasin, chargé des expéditions, travaille en trois équipes.

Plus compétitifs pour la remplaçante de la 308

Par contre, les AST peuvent s’appuyer sur un certain "matelas" : la part d’activité qui leur est accordée d’office par PSA pour que le constructeur puisse satisfaire à ses obligations légales en matière d’emploi handicapé. Cela concerne les câbles négatifs de batterie.

Pour le reste, les ateliers sont mis en concurrence avec les autres fournisseurs. Mais leur chasse aux coûts paie. Ils ont gagné des volumes significatifs sur la remplaçante de la 308, « parce que nous étions les plus compétitifs », souligne Jean-Michel Laforge. 

Le directeur de l’usine de Sochaux, Javier Varela, est ressorti favorablement impressionné de la visite. Sa conclusion finale sur un site « au niveau des équipementiers de pointe » n’était sans doute pas qu’une formule de politesse.

Les ateliers spécialisés de Technoland emploient 500 travailleurs handicapés dont 380 à la préparation de pièces pour PSA.
Les ateliers spécialisés de Technoland emploient 500 travailleurs handicapés dont 380 à la préparation de pièces pour PSA.

Représentant PerfoEst, Philippe Moussalli a confirmé que les AST se situent dans le peloton de tête, dans les enquêtes de performance de la filière que mène l’association locale des entreprises automobiles.

Les AST font partie de l’Adapei (association des amis et parents de personnes handicapées) du Doubs constituée depuis quelques semaines par la fusion des différentes structures locales d’emploi de travailleurs handicapés du département.

Photos : Christian Robischon.

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