PATRIMOINE/SAÔNE-ET-LOIRE. Véritable « showroom » version 19ème siècle de l’industrie céramique en Saône-et-Loire, la Villa Perrusson a achevé sa restauration extérieure au début de l’été.
La Communauté urbaine Creusot-Montceau programme maintenant la restauration des intérieurs. Une souscription publique est lancée avec la Fondation du patrimoine.
Découverte à l’occasion des journées du patrimoine (*), ces 15 et 16 septembre.

 

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La Villa Perrusson près du Creusot (Saône-et-Loire) est en fait constituée de deux demeures séparées : à gauche sur la photo, la villa bâtie par le dirigeant de l'usine de céramique Perrusson et, construit plus tard avec un étage supplémentaire, le pavillon Desfontaines où habitaient sa fille et son gendre. © Traces Ecrites.

 

Pour visiter la villa Perrusson, du nom de la famille de céramistes qui l’ont fait bâtir au 19ème siècle au bord du canal du Centre à Écuisses (Saône-et-Loire), on se donne rendez-vous au café. La Communauté Urbaine Creusot-Montceau, propriétaire des lieux depuis 2008, a établi l’accueil de cette antenne de l’écomusée, dans l’ancien café de la gare, juste en face de la maison bourgeoise.

 

Les trains continuent de passer, en frôlant la propriété, mais sans s’arrêter : la gare a fermé et son emplacement est aujourd’hui le parking des visiteurs. On a conservé une centaine de mètres de rails entre les deux lieux pour mémoire.


Comme aujourd’hui une entreprise déploie son enseigne en bordure d’autoroute pour se faire voir du plus grand nombre, le patron de l’entreprise Perrusson, en 1900, profite du passage du train pour déployer un véritable catalogue de la production de l’usine céramique sur sa villa, aujourd’hui classée Monuments Historiques.

 

 

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Lorsque Jean-Marie Perrusson, le fondateur de l’entreprise en 1860, construit sa maison d’habitation juste derrière l’usine (la construction s’échelonne entre 1869 et 1900), il n’éprouve pas seulement le besoin de montrer son ascension sociale rapide.

 

Cet ancien batelier saisit l’opportunité de la découverte de gisements d’argile lors du creusement du canal du Centre (1784-1793 puis élargi au gabarit Freycinet de 1880 à 1885) pour installer une briqueterie, puis une tuilerie qui emploient jusqu’à 750 personnes à la fin du 19ème siècle. Il en fait un showroom en décorant façades et toitures de tous les accessoires fabriqués à l’usine.

 

Tuiles écailles polychromes, tuiles mécaniques noires et jaunes, épis de faîtage, mitres sur les cheminées, médaillons et frises d’encadrement des portes et fenêtres, en terre cuite brute ou émaillée : les décors dont les derniers ont achevé leur embellissement en juin dernier, ont été retrouvés dans les catalogues des produits de l’entreprise, dont une vingtaine numérisés sont consultables sur écran dans le « café-accueil » de la villa.


« Les commanditaires invités à déjeuner pouvaient ainsi apprécier, sur pièce, la qualité des éléments céramiques sur les façades et la toiture mais aussi à l’intérieur. Et les photos d’époque montrent qu’une large ouverture avait été judicieusement aménagée dans le parc arboré, pour offrir aux voyageurs de la ligne de chemin de fer une vue imprenable sur la villa et ses décors », commente Nadia Bogenez, médiatrice culturelle chargée du projet.


Les historiens remarquent d’ailleurs que certains décors ont été récupérés sur le kiosque de l’exposition universelle de 1889 que l’entreprise Perrusson avait dressé au pied de la Tour Eiffel.


Restauration de l’intérieur pour une ouverture en 2020

 

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L'arrière de la maison avec son lanternau, reproduction presque fidèle de celui qui ornait le kiosque de l'entreprise Perrusson à l'exposition universelle de 1889. © Traces Ecrites.

 

Quatre années de travaux ont redonné tout son éclat à l’édifice ainsi qu’à l’orangerie, elle aussi porteuse d’éléments céramiques, nichée au fond du parc d’agrément replanté selon les codes du 19ème siècle. La dépense de 1,88 million d’€, prise en charge par la Communauté urbaine Creusot-Monceau, a été subventionnée à hauteur de 30% par l’Etat (DRAC Bourgogne-Franche-Comté) et le Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté. Certains décors ont été refabriqués sous la houlette de Frédéric Didier, architecte en chef des Monuments Historiques..

 

Il a fallu refaire des moules et l’entreprise Tegulys (Corrèze) chargée de restauration a même fait appel à Jean-Pierre Ducrot, artisan de Palinges (tout prè des lieux) à la retraite pour les éléments de toitures, notamment les mitres et le lanternau, consolidé. Mais la plupart des décors ont été simplement rafraîchis. La charpente et la toiture ont été entièrement refaites.

 

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Une nouvelle période de travaux va être lancée en 2019 qui permettra aux visiteurs de découvrir probablement en 2020, l’intérieur de la villa. Les sols comme les plafonds des pièces sont parés de carreaux mosaïques, comme on peut le deviner à travers le bow-window de l’aile bâtie dans un second temps (1890) dit pavillon Desfontaines du nom du gendre de l’industrie, et sur le plafond de la claustra de la villa.

 

Pour poursuivre la restauration, la communauté urbaine organise une collecte de dons (avec défiscalisation pour les particuliers comme les entreprises), au côté de la Fondation du patrimoine et qui, fin juillet, avait réuni 10.000 €. La souscription est toujours d’actualité (www.bourgogne.fondation-patrimoine.fr).

 

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Un extrait d'un des catalogues des fabrications Perrusson, numérisé et présenté sur écran dans le café-accueil de la villa. Entre Écuisses et Saint-Léger-sur-Dheune, de nombreuses maisons possèdent encore des carrelages de l'entreprise fermée en 1960. A Saint-Léger-sur-Dheune, la confiturerie Pêché Sucré installée dans une ancienne tuilerie Perrusson arbore une façade décorée.

 

La technique du carreau incrusté

 

Les carreaux mosaïques étaient fabriqués selon la technique du carreau incrusté, teinté dans la masse.
Dans un moule en laiton reproduisant le « carton » (le dessin au crayon) par des cloisonnements (sorte de pochoirs isolant les différentes formes et couleurs), on déposait une couche de pigments d’environ 2 millimètres.
Le pochoir était ensuite délicatement retiré, puis le moule était rempli d’un argile neutre humide pour faciliter le compactage des couleurs par l’intermédiaire d’une presse hydraulique produisant une pression de 50 kg au cm2.

 

 

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Tous les étés, une exposition de céramiques contemporaines anime le parc de la villa. Cette année, Frédéric Fleury. © Traces Écrites.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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L'usine qui occupait 10.000 m2 a été démolie, à l'exception de quelques corps de bâtiments, comme celui-ci, classé, et dont la Communauté urbaine réfléchit à une affectation. © Traces Écrites.

 

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Environ 4.000 pièces ornent les façades sauf celle côté usine d'une totale sobriété. © Traces Écrites.

 

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Plafond de carreaux mosaïques de la claustra. © Traces Écrites.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(*) Accès libre pendant les journées du patrimoine avec visites commentées par groupe. Jusqu’au 30 septembre, ouvert le week-end de 14h à 18h. Départ des visites toutes les heures (4 €).

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