Situation sanitaire oblige, les prix de la performance 2020 de l’association PerfoEST et du pôle de compétitivité Véhicule du Futur ont été décernés lors d’une réunion 100% digitale. Ces trophées qui récompensent un processus d’amélioration continue, au bénéfice d'équipementiers de l‘automobile, vont traditionnellement de pair avec le baromètre annuel de la performance, étalon de la compétitivité des entreprises de l'automobile. Les sociétés Eurocade, Fonderie de Lorraine et Tubular ProductsVitry ont été récompensées dans les trois catégories PME, ITE et grands groupes.



Elles ont toutes été impactées par la crise sanitaire avec une dégradation estimée de leur chiffre d’affaires de 25%, mais les trophées de la performance récompensent une démarche d’amélioration continue sur une longue durée, indépendamment de la conjoncture. Elles sont trois cette année remarquées par l’association PerfoEST et le Pôle Véhicule du Futur (PVF).

• Eurocade (chiffre d’affaires de 7,3 millions d’€ en 2019, 52 salariés), fabricant de faisceaux électriques pour toutes sortes de véhicules (voitures individuelles, véhicules industriels, bus) à Dampierre-lès-Bois (Doubs), mène depuis deux ans une digitalisation de son outil de production (Manufacturing execution system). Un logiciel permet d’identifier les points d’amélioration des coûts. Les données de production sont collectées en temps réel et analysées sous toutes les facettes : traçabilité, contrôle qualité, suivi de  la production, ordonnancement et maintenance préventive comme curative. « Issu du programme 4.H de PerfoEST, cette démarche d’amélioration continue nous a permis de gagner en agilité et en productivité », témoigne Denis Rezé qui dirige l’entreprise depuis 2005. Une adaptation qu’il juge aujourd’hui plus que nécessaire car estime t-il, la crise de la Covid-19, qui a encore plus secoué les équipementiers de l’aéronautique, que de l’automobile va faire de ceux-ci de futurs concurrents.

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Denis Rezé, dirigeant d'Eurocade : « La démarche d’amélioration continue nous a permis de gagner en agilité et en productivité. » © Traces Ecrites



• La Fonderie Lorraine à Grosbliederstroff près de Sarreguemines (Moselle) a, elle, engagé un processus d’amélioration continue il y a cinq ans. Cette joint venture (chiffre d’affaires de 70 millions d’€, 180 salariés) des groupes allemands Voit et ZF, fabrique des éléments pour les boîtes de vitesse et moteurs électriques qu’assemblent ses actionnaires. L’ETI a concentré ses efforts sur la réduction systématique des rebuts et amélioré les temps d’usinage des pièces en aluminium qu’elle réalise grâce à 18 cellules de 1.000 à 2.500 tonnes de pression de fermeture. L’industriel a également travaillé sur les « presque accidents », c’est-à-dire les accidents du travail sans blessés. « Toutes les équipes ont passé le cap de 1 an sans accident, l’une d’elles a même dépassé 3 ans », affirme Marc Friedrich, son PDG.

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A la Fonderie lorraine, l'usinage génère les deux tiers de la valeur ajoutée. © Fonderie lorraine


• Le troisième trophée revient au site Tubular Products de Vitry-le-François dans la Marne, division du groupe ArcelorMittal qui fabrique des éléments tubulaires (traverses d’essieux, bras de suspension, cadres anti-crash).
Depuis 2010, l’entreprise de 170 personnes (chiffre d’affaires 2019 de 34 millions d’€) a fait de l’analyse des pertes le pilier de sa démarche d’amélioration continue.  « Le suivi d’indicateurs opérationnels avec des objectifs ambitieux débouche sur un plan d’actions préventives et curatives annuel en cas de dérive », explique Didier Boutter, directeur. Fort de cette méthodologie, il pense mieux pouvoir aborder les évolutions qui se profilent.

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Covid-19 : « On peut s’attendre à des fermetures et des réductions d’effectifs dans les mois à venir. »


Le recul de l’activité de la filière automobile se faisait déjà sentir début 2019 en raison d’une baisse mondiale des ventes de voitures, dont l’Europe était moindrement contributrice (moins 0,4%). Il s’est confirmée en début d’année  2020 même avant la pandémie de la Covid-19 qui a accéléré la dégradation, les usines des constructeurs ayant fermé pendant deux mois. La Bourgogne-Franche-Comté et le Grand Est qui concentrent 44% de la production d’automobiles en France avec les deux usines PSA de Sochaux et Mulhouse et leurs fournisseurs, également clients des constructeurs de l’Allemagne voisine, s’en trouvent et trouveront fortement impactées.
« Les entreprises les plus fragiles d’avant la crise seront encore plus fragilisées ; on peut s’attendre à des fermetures et des réductions d’effectifs dans les mois à venir », commente Ludovic Party, directeur général de PerfoEST. 


Certaines entreprises s’en sortent cependant bien. Celles qui fournissent des pièces à une plate-forme d’assemblage de plusieurs véhicules ou qui alimentent les lignes de production des voitures à succès, comme la 3008 de PSA. Les entreprises qui ont diversifié leur clientèle également souffrent bien moins, sauf si elles ont choisi une diversification dans l’aéronautique. 
A ce jour, le Pôle Véhicule du Futur estime que le niveau de l’activité est revenu entre 70 à 80% de celui d’avant Covid.

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Marc Becker, président du Pôle Véhicule du Futur en visio-conférence avec la presse hier 15 septembre. © Traces Ecrites

Le plan de relance national qui prévoit une enveloppe de 200 millions d’€ pour la modernisation de l’outil de production devrait limiter les dégâts. Marc Becker, le président du Pôle Véhicule du Futur,exhorte les entreprises à innover, citant Automobiles Dangel qui a mis le confinement à profit pour généraliser l’hybridation de ses véhicules utilitaires. Des appels à manifestation d’intérêt aident les entreprises à trouver l’ingénierie et le financement pour la R&D. L’appel semble avoir été entendu puisque 135 entreprises du Bourgogne-Franche-Comté et du Grand Est ont déposé des dossiers.  


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L’amélioration continue que valorise les trophées annuels est incontournable chez les équipementiers de l’automobile pour conserver leurs marchés. C’est pourquoi le Pôle véhicule du Futur qui compte aujourd’hui 500 adhérents, – historiquement en Alsace et dans le Nord Franche-Comté et désormais dans tout l’Est, avec l’intégration récente des Aria de Lorraine et de Champagne et du pôle de performance de Magny-Cours dans la Nièvre –, réalise chaque année un « baromètre de la performance industrielle ».
Ce tableau indicateur de la compétitivité des entreprises de la filière automobile permet aux adhérents de se comparer avec leurs confrères et d’identifier leurs points d’amélioration. La filière, elle, s’en sert pour identifier les catégories d’entreprises qui doivent être accompagnées.

Les réponses des 39 équipementiers qui y ont participé – un peu moins que d’habitude –,  traduisent une tendance de fond.  Sur les 11 indicateurs (au lieu de 18 les années précédentes), 5 sont en progression. Le nombre de retours à l’usine (défauts de pièces) est en baisse de 5%. Le taux de service (livraisons dans les délais et en conformité) a progressé à 93,3%. La rotation des stocks s’améliore aussi (+ 8%), ce qui est une bonne nouvelle pour les finances des entreprises, tandis que les taux de fréquence et de gravité des accidents du travail baissent respectivement de 22% et 18%.

 

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Deux indicateurs sont en dégradation. Les dépenses de formation, peut-être en raison de la réforme de la formation professionnelle qui a pu bouleverser les habitudes, ainsi que les dépenses d’investissements qui traduisent une prudence des industriels. « Cela correspond aussi au cycle de lancement des véhicules, les investissements au moment de la mise en production de nouveaux modèles étant plus importants qu’en cours de production », commente Ludovic Party, directeur général de PerfoEST. Deux indicateurs sont en forte dégradation : le coût des rebuts et retouches (+15%) et le nombre de suggestion des équipes de production (moins 27%).

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