En visite hier 3 juin à Belfort, Bruno Le Maire, ministre de l'Economie, a demandé à General Electric de réduire le nombre de licenciements qu'il prévoit à Belfort dans son usine de turbines à gaz et dans ses services supports. Il a dit aux syndicats et élus locaux vouloir soutenir financièrement la reconversion du site en une activité de sous-traitance pour l'industrie aéronautique avec le concours de Bpifrance.
Avec Pierre-Yves Ratti, à Belfort.
General Electric a annoncé le 28 mai vouloir supprimer plus d’un millier d’emplois dans le Territoire de Belfort (Lire ici, l'article de Traces Ecrites News) où le groupe américain possède le plus gros site au monde de fabrication de turbines et où il avait repris en 2016 l’activité de son concurrent Alstom Power. Le plan social concerne au total 1.044 personnes, 792 personnes dans la branche turbine à gaz à Belfort et 252 au sein des services supports à Bourogne.
En visite hier à Belfort, Bruno Le Maire, ministre de l'Économie a demandé à General Electric d'améliorer son plan social en réduisant le nombre de licenciements, sans préciser le volume souhaitable, « au risque de perdre des compétences locales (...) dans les turbines à gaz, ce qui conduiraient à terme à la suppression de cette activité », a t-il précisé. Pour encourager l'industriel dans cette voie, il se dit prêt à lui donner les moyens nécessaires à la création d'une activité de sous-traitance dans l'aéronautique, les savoir-faire pour fabriquer une ailette d'avion ou de turbine étant les mêmes.
« C'est à GE de capitaliser cette société, mais pour 1 € d'investissement, Bpifrance mettra 1 € », a déclaré le ministre qui a présenté cette piste de diversification – soufflée par les syndicats et les élus locaux –, comme « la plus prometteuse ». « Je veillerai à ce que le fonds de 50 millions d'€ constitué par les pénalités de GE [ pour ne pas avoir créer les 1.000 emplois promis lors du rachat d'Alstom Power en 2016, Ndlr ] complètent la capitalisation de cette société. »
Autre promesse du ministre : le soutien à la filière hydrogène qui se dessine dans le nord Franche-Comté, assise sur les compétences de l'UTBM (Université de Technologie de Belfort-Montbéliard), sans préciser l'implication financière de l'État.
Le ministre veut en tout cas que les choses aillent vite. Il présidera lui-même un comité de suivi du plan social dont la première réunion aura lieu début septembre au ministère de l'Économie et des finances. Autrement dit, le message envoyé à GE est de ne pas laisser le confit s'enliser.
Dans le nord Franche-Comté, General Electric emploie 4.000 personnes dont 1.900 personnes dans l’activité gaz. « Les engagements du géant américain, pris lors du rachat de la branche énergie d’Alstom sont loin » commentent élus et syndicats. L’industriel avait en effet promis la création d'un millier d’emplois et à défaut, de payer une « amende » de 50.000 € par salarié, soit 50 millions d’€, au profit de nouvelles activités industrielles.
C'est à ce scénario auquel s'étaient presque résignés élus comme syndicats depuis quelques mois. Plusieurs événements leur avaient mis la puce à l’oreille. Déjà, 575 départs volontaires avaient été été actés l’an dernier à travers un dispositif de rupture conventionnelle collective et un plan senior. A Belfort, plus de 200 départs étaient engagés dans les deux entités rachetées par l’Américain, 194 chez Alstom Power System et 18 chez Power Conversion. Les 10 et 11 avril derniers, un plan de réduction des coûts de 800 millions d’€ avait été présenté aux syndicats comme étant en cours de finalisation.
Les élus locaux et les syndicats avaient anticipé cette annonce en esquissant une stratégie de diversification (Lire ici l’article de Traces Ecrites News) sur des activités qu'ils jugeaient comptatibles avec les savoir-faire locaux. Notamment participer à la mise en œuvre du plan « grand carénage » pour restaurer le parc nucléaire français, implanter une fiière hydrogène industrielle et développer la sous-traitance pour l'aéronautique.
Les salariés de Belfort attendent du gouvernement qu'il ne les abandonne pas, eux qui se souviennent de l'assurance du Président de la République, Emmanuel Macron, de « la plus grande vigilance de la part de l’État » alors que la situation actuelle se profilait.
Tout le bassin d'emploi est concerné. Comme le rappelle le président de la CPME 90, Louis Deroin : « un emploi supprimé chez GE, ce sont 2 à 3 emplois indirects impactés ! » De leur côté, les représentants du personnel ne vont pas lâcher prise. « Il faut monter en puissance, car quand on parle de négociation, si vous n'avez pas d'armes, on va tout droit vers la fermeture du site », a déclaré Philippe Petitcolin, délégué syndical CFE-CGC, à l'issue de deux heures d'entretien avec le ministre.