Inconnue des touristes et même des habitants, la crypte de la rotonde de la cathédrale Saint-Bénigne à Dijon se prépare à une nouvelle vie grâce à une grosse restauration à laquelle le plan France Relance vient de donner de nouveaux moyens.
Elle a longtemps été présentée comme l’un des trésors de Dijon que seuls pouvaient découvrir des visiteurs un peu curieux. Par son accès très discret sur le flanc de la cathédrale Saint-Bénigne où s’arrêtent chaque année quelques 30.000 pèlerins, la rotonde construite en l’an 1000 par l’abbé Guillaume de Volpiano ne fait pas partie du circuit touristique de la capitale de la Bourgogne-Franche-Comté.
Dans trois ans, fin 2024, sa crypte souterraine, seule partie de la rotonde qui a subsisté et classée aux monuments historiques en 1846, deviendra incontournable grâce à une restauration que la Direction régionale des affaires culturelles (Drac) de Bourgogne-Franche-Comté a pensé, à la fois pour préserver le monument abîmé et accueillir le public.
Engagés fin 2019, les travaux viennent de prendre un coup d’accélérateur grâce à des crédits du plan France relance : 2,6 millions d’€ sur une facture totale de 7 millions.
Les historiens le disent depuis longtemps, et les architectes et archéologues à l’oeuvre en ce moment sur le chantier le confirment. La rotonde de Saint-Bénigne est un édifice « exceptionnel » de l’architecture pré-romane. En l’an mille, dans le prolongement Est de la cathédrale, qui était à l’époque l’église abbatiale d’un couvent bénédictin, s’élevait un bâtiment circulaire sur trois niveaux construit autour du tombeau d’un bienfaiteur nommé Bénigne. Elle s’est inspirée, en plus modeste, de la coupole du Panthéon de Rome construite dans l’Antiquité. Les descriptions anciennes rapportent « une forêt de colonnes dans un espace sans fin baigné d’une clarté zénithale tombant d’un puits de lumière. »
Des découvertes grâce à l'intervention d'archéologues

Aujourd’hui, la clarté zénithale n’est plus. Mais elle ressuscitera à l’issue de la restauration. Un vaste parapluie protège le monument des ruissellements pluviaux qui ont rendu la pierre poreuse, dans l’espoir d’un assainissement total avant de redonner naissance au puits de lumière, grâce à une couverture en verre feuilleté.
Quant à la « forêt de colonnes », elle s’est réduite avec le temps. A l’origine, elles formaient trois cercles concentriques, avec 24 colonnes surmontées de chapiteaux formant le plus large de 17 mètres de diamètre et sept rassemblées au centre. Les murs seront enduits d’un mélange à la chaux respirant dans le but d’assainir le bâtiment, précise Martin Bacot, architecte en chef des monuments Historiques.

De nouvelles explorations menées par le Centre d’études médiévales d’Auxerre à l’occasion du chantier ont débouché sur de belles découvertes. Derrière un mur de la crypte, situé entre le chevet de la cathédrale et la sacristie, a été mise au jour l’ancienne citerne pouvant recueillir des milliers de mètres cubes d’eau. C’est la partie la plus authentique de la rotonde qui a subi beaucoup de destructions au fil du temps (Lire encadré).
« Les quatre colonnes et leurs chapiteaux sont intactes [ bien que noircis par l’humidité, Ndlr ], à leur place originelle, car ailleurs, lorsque la rotonde a été redécouverte, les colonnes formaient un véritable mikado à terre ; elles ont été redressées et ornées de chapiteaux au hasard », commente Sylvain Aumard, archéologue du Centre d’études médiévales d’Auxerre. Dans ce petit espace de quelques mètres de profondeur, des banquettes le long des murs révèlent que l'ancienne citerne a servi par la suite de salle de repos des pèlerins. Il sera visible mais non accessible au public en raison de son étroitesse.
L’autre découverte est le vestige d’un escalier du 11e siècle du côté de la sacristie qui restera visible des visiteurs. Considéré jusqu’à présent aussi « incompréhensible qu’invisible du grand public », selon Virginie Broutin, architecte des bâtiments de France, le monument une fois restauré bénéficiera d’explications des plus pédagogiques dans un espace de médiation. L'accès au plus grand nombre suppose aussi une nouvelle entrée depuis l’intérieur de la cathédrale par un escalier contemporain hélicoïdal et un ascenseur pour les personnes à mobilité réduite.
Les travaux concernent également la sacristie qui sera entièrement restaurée cette fin d’année. Abîmées en raison d’une mauvaise qualité des matériaux utilisés à l'époque, « plus de 100 m3 de pierres seront remplacées », indique Martin Bacot. La rénovation dans l’état initial du 11e siècle a conduit également à refaire la toiture en ardoise, pilastres et balustrades ainsi que des sculptures.
L’histoire mouvementée de la rotonde de Saint-Bénigne


La rotonde construite en l’an 1000 a été détruite en 1792 lorsque l'ancienne abbatiale devient cathédrale du diocèse de Dijon. Seul sorti sain et sauf de cette nouvelle page de l’histoire, l’étage inférieur de la rotonde (la crypte) a été comblée avec les décombres de la démolition des étages supérieurs sous la cour de l'archevêché. Les vestiges de la rotonde sont redécouverts accidentellement en 1844 et un début de dégagement est amorcé.
Mais c'est à l'occasion du projet de création d'une nouvelle sacristie à l'est de la cathédrale que la rotonde est restaurée à partir de 1858 par Jean-Philippe Suisse, architecte diocésain, sous la supervisation d'Eugène Viollet-le-Duc. L'exiguïté du terrain et la forte axialité du chevet amène Jean-Philippe Suisse à un projet audacieux pour la sacristie : une composition néogothique dans l'esprit du chevet de la cathédrale, située au-dessus de la rotonde et reprise par des arcs en sous-œuvre portant sur deux piliers, évitant le report des charges sur les colonnes du XIe siècle. Source : Wikipédia.
