La société née dans l’ingénierie en 2015 arrive au terme de trois ans de développements d’un « cobot », dont le fonctionnement modulaire doit permettre de démocratiser l’accès à ce type d’équipement dans les PME. La mise sur le marché est programmée au printemps prochain.
Belfort, capitale française du cobot ? Il y a encore un peu de marge d’ici là, et pas sûr que ce titre supplante le Lion comme vecteur de marketing territorial de la ville… Mais pour le monde industriel, la perspective n’est point du tout anodine, tant le robot collaboratif, l’autre nom du cobot, s’installe de plus en plus systématiquement dans ses process.
Or, une société belfortaine incarne cette tendance : MS-Innov. Dans les 720 m2 qu’elle loue à la société d'économie mixte Tandem au Techn’Hom, elle fait tourner le prototype d’un tel robot dont l’originalité tient dans la modularité : ses bras peuvent s’ajouter ou s’enlever de façon à s’adapter à la dimension que recherche son entreprise utilisatrice.
« Un seul cobot est ainsi capable de se substituer à la gamme des machines 4, 5 ou 6 axes concurrentes, pour assurer les fonctions de production, d’assemblage, de manutention, de contrôle qualité, entre autres », décrit Julien Morel, le dirigeant de MS-Innov. Celui-ci met en avant une autre particularité : « la rotation infinie. Chaque articulation peut pivoter sur elle-même sans discontinuer, et dans tous les sens. Notre cobot n’a pas besoin de faire demi-tour comme un robot classique, ce qui amplifie les possibilités d'application. »
Avec sa solution qu'il a baptisée Morfose, MS-Innov s’affirme comme « le premier concepteur français de solutions de robotisations collaboratives modulaires ». La société postule à la certification Origine France Garantie (*) pour la conception et la production de ce cobot qui aura vocation à être installé par des prestataires auprès des clients utilisateurs.
Lesquels en priorité ? MS-Innov vise tout type d’industries, et surtout toute taille d’entreprises. « La modularité de Morfose et le logiciel de pilotage très intuitif qui lui est associé aboutissent à proposer une solution adaptée aux moyens des PME et ETI, qui sont bien différents de ceux de grands groupes », plaide Julien Morel. De plus, le système d’articulation permet de se faufiler dans tous les recoins difficiles d’accès, ou dans une zone contaminée impropre à l’intervention humaine. Cette caractéristique ouvre par exemple des perspectives dans le nucléaire ou le secteur pharmaceutique.
Levée de fonds prévue

© Mathieu Noyer
La jeune entreprise fondée en 2015 se place aujourd’hui dans l’antichambre de son déploiement commercial. Né des travaux d’un contrat de recherche Cifre (**) avec l’UTBM (Université de technologie de Belfort-Montbéliard) en 2019, protégé par des brevets sur certains de ses composants, Morfose termine sa mise au point, dans l’objectif de sa mise sur le marché en avril 2023. « Nous avons enregistré sept premières pré-commercialisations », souligne Julien Morel. Dès lors, MS-Innov prévoit de franchir un premier palier de chiffre d’affaires d’1 million d’€ l’an prochain, avant de viser une montée progressive « jusqu’à 8 à 9 millions d’€ en 2025 ».
Le premier étage du décollage requiert de rassembler 1,5 à 2 millions d’€ de financement - en haut de bilan, de préférence - en complément des plus de 2 M€ injectés depuis l’origine en fonds propres, prêts bancaires et aides du plan de relance de l’Etat.
Les effectifs amorcent déjà la courbe ascendante : 22 collaborateurs aujourd’hui (développement logiciel et mécanique), une trentaine en mars prochain, avant encore 12 à 15 recrutements supplémentaires d’ici à trois ans. Cette croissance ramène l’entreprise à des niveaux qu’elle avait connus avant d’être freinée net dans sa course par la crise sanitaire. Celle-ci avait déclenché un plan social. Elle a alors intensifié sa diversification, d'un bureau d'études mécaniques et d'un ingénieriste industriel vers la robotique.
L’expansion des prochaines années mettra MS-Innov à l’étroit dans ses actuels locaux, rendant nécessaire d’implanter un atelier de plus grande taille, si tout se passe bien. « On sera fidèle au Territoire de Belfort qui nous a fait confiance », promet Julien Morel.

On pensait trouver un ingénieur multi-diplômé à la tête de l’entreprise de « matière grise » MS-Innov. Il n’en est rien. Le dirigeant a suivi une formation de tourneur-fraiseur en BEP et en bac pro, avant une licence professionnelle de gestion de projets d’innovation à l’IUT de Belfort-Montbéliard. Après une première partie de carrière de dix ans dans la prestation de services pour de grands comptes, il a pris le virage de l’entrepreneuriat en 2015, avec la fondation de MS Innov.
(*) La certification Origine France Garantie s'applique à un produit qui respecte ces deux critères : au mions 50 % de son prix de revient unitaire provient de France et le lieu du produit « prend ses caractéristiques essentielles » en France
(**) Convention industrielle de formation par la recherche