Créé dans l’urgence de la crise sanitaire à Lons-le-Saunier (Jura), l’Atelier Textile Jurassien s’est structuré en société coopérative afin de pérenniser son activité autour de trois pôles : la confection en sous-traitance, le co-développement de projets textiles, et à présent la production d’une gamme de vêtements de travail.


En mai 2020, à Lons-le-Saunier (Jura), un atelier de confection textile était créé, à l’initiative d’un collectif d’acteurs de l’économie sociale et solidaire, avec quatorze salariés et un parc de machines constitué en moins d’une semaine. L'objectif premier était alors de produire des masques de protection en tissu pour répondre à l’urgence sanitaire. Le projet portait cependant d'emblée une seconde ambition, celle d’ancrer durablement une filière textile sur un territoire vierge de tradition dans ce domaine. Ainsi est né l’Atelier Textile Jurassien, une entreprise d’insertion qui, depuis plus de deux ans, tente de bâtir un modèle économique pérenne.

Pour s’inscrire dans la durée, il a d’abord fallu doter la structure informelle d’un statut. Fidèle à l’esprit coopératif qui a présidé à ses débuts, l’atelier est devenu, en octobre 2021, une société coopérative d’intérêt collectif (SCIC)  qui s'est placée dans le giron du groupe jurassien Demain.

Au fil des mois, une modéliste, une chargée de formation, un responsable de la production et un chargé de développement commercial ont ainsi rejoint l’atelier, dirigé depuis sa création par Marine Regnaud, ancienne cheffe de produit dans l’industrie textile. L’effectif atteint aujourd’hui 30 personnes, dont 20 en contrat d’insertion.

 

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« L’enjeu consiste d’abord à stabiliser une activité qui reste en démarrage (*) et de structurer l’équipe de permanents en recrutant des professionnels expérimentés », indique Mathieu Grosset, le président-directeur général de Demain, le groupe constitué d’entreprises coopératives spécialistes de l’économie circulaire, soit un effectif cumulé de 220 salariés et un chiffre d’affaires de 14,2 millions d’€.

Cette montée en compétences a permis de consolider les savoir-faire de l’entreprise autour de trois activités. La première, historiquement, c’est la confection en sous-traitance. L’Atelier Textile Jurassien participe depuis l’origine au projet Résilience, un groupement national d’entreprises mobilisées pour la relocalisation de l’industrie textile. Dans ce cadre, les couturières lédoniennes continuent de fabriquer des masques ornés d’un petit drapeau tricolore.

(*) 500 000 € de chiffre d’affaires en 2021

 

Une demande locale pour des tenues de travail made in Jura

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Via un appel d’offres de l’État attribué au groupement Résilience, les couturières jurassiennes confectionnent
les turbulettes offertes dans les maternités. © Edwige Prompt


Le groupement a également répondu à un appel d’offres de l’État pour confectionner les textiles du sac de bienvenue à la parentalité dit « des 1.000 premiers jours », qui est remis dans les maternités. « Depuis mai 2022, nous avons produit 9.000 cabas, 6.000 turbulettes et 10.000 pochettes à savon », comptabilise Théotime Prongué, chargé de développement commercial. « Sur ce marché, nous avons de la visibilité à six mois, avec un gros volume de travail assuré jusqu’au printemps 2023 », complète le PDG de Demain.

La SCIC propose aussi du co-développement de projets textiles (comme la réalisation de sacs à pain personnalisés pour une boulangerie lédonienne). Cette année marque le lancement d’une troisième activité : le déploiement d’une collection de vêtements de travail dessinés, conçus et fabriqués à Lons-le-Saunier. Destinées aux professionnels de l’industrie, de la santé et de l’hygiène, plusieurs gammes de tee-shirts, pantalons, blouses, tabliers, vestes et chasubles se situent actuellement au stade des derniers prototypages.

 

Entretien Dijonnais

 

Le catalogue et un site web marchand seront disponibles dans le courant de l’hiver. « Nous avons réalisé une étude de marché très fouillée qui nous a montré qu’il y avait une vraie demande locale, que c’était économiquement rentable et techniquement atteignable, assure Mathieu Grosset. C’est important de développer nos propres produits, qui sont désormais reconnus pour leur qualité et leur design. »

Cette production devrait monter en charge au printemps prochain. « Optimiste », pour la jeune entreprise, le dirigeant est persuadé que la confection textile solidaire a de l’avenir : « Beaucoup de compétences et d’outils industriels ont été perdus, mais l’attente des clients et des citoyens autour de ce marché est bien réelle. Actuellement, pour du made in France qualitatif, la demande dépasse l'offre. »

 

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La modéliste de l’atelier, Elsa Dorey, travaille sur les prototypes de la collection de vêtements de travail
dont la commercialisation sera lancée d’ici au début de l'année prochaine. © Edwige Prompt

 

Un pull à succès

En décembre 2021, l’Atelier Textile Jurassien a lancé, via une plateforme de financement participatif, une campagne de précommande d’un pull conçu et fabriqué dans le Jura à partir de matériaux (tissu, fil, bouton) made in France. Relayée par des vidéos sur les réseaux sociaux, cette opération de communication visait à valoriser les compétences de l’atelier et à tester le marché « B to C » du consommateur final. Elle a porté ses fruits, en enregistrant 369 préventes par rapport à un objectif initial de 200, assorties d’importantes retombées médiatiques. « Nous avons eu cette idée, car nous étions très sollicités par les habitants du territoire qui voulaient nous soutenir, explique Mathieu Grosset. Cette campagne a permis de montrer que nous savions faire des produits de qualité, avec de la traçabilité ».

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