Après avoir fait fortune dans la finance, le franco-indien Ravi Viswanathan investit désormais dans le vin, dont il est un poids lourd en Inde, et le tourisme avec un plan de développement très précis. Acquéreur du domaine Protheau à Mercurey (Saône-et-Loire), il pourrait ne pas s’arrêter là dans sa conquête du vignoble bourguignon. Ce week-end, il fait découvrir le vin indien au salon Vinidivio à Dijon.


C’est en plein cœur de la Bourgogne viticole, à Mercurey, que Ravi Viswanathan, le nabab du vin indien – le fournisseur du salon Vinidivio (Lire l’encadré) qui s’ouvre ce 8 novembre dans le cadre de la foire internationale et gastronomique de Dijon –, a réalisé son dernier grand coup : acheter le prestigieux domaine Protheau dont les 50 hectares de vignes s’étendent autour du Château d’Étroyes, en appellations Mercurey et Rully, en Saône-et-Loire. 

L’investissement de l’ordre de 7 à 9 millions d’€ en appelle peut-être d’autres dans le futur. « Nous regardons deux ou trois autres affaires mais il demeure compliqué d’acheter des domaines en Bourgogne, notamment les petits domaines, qui sont les plus intéressants, mais dont la vente passe par la gestion pas toujours limpide de la Safer [ Société d’aménagement foncier et d’établissement rurale, ndlr ] », révèle l’investisseur franco-indien de 57 ans.

 

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Acheter en Bourgogne répond bien sûr à une envie d’excellence mais aussi à une logique de synergies opérationnelles et capitalistiques. Car Ravi Viswanathan qui a aussi un pied à terre das le haut-Doubs, près de Pontarlier, compte bien exploiter le prestige et le savoir-faire français pour renforcer son activité viticole, située en Inde. Né à Pondichery, mais arrivé en France dès l’âge de 6 mois, l’homme y a fait des études brillantes, devenant polytechnicien, puis banquier, avant de se spécialiser dans l’investissement.


raviportraitÀ la tête de 70 % de la production viticole en Inde

 

« Ce qui nous intéresse particulièrement en Bourgogne, c’est le savoir-faire autour des cépages pinot noir et chardonnay, qui sont extrêmement compliqués à cultiver en Inde, dont le climat tropical se prête mal à la viticulture », explique-t-il.
À travers son fonds d’investissement VisVires Capital, basé à Paris et Singapour, qu’il dirige avec son associé de toujours Luc Giraud, il a déjà acquis des parts dans deux vastes domaines dans le sous-continent, Grover Zampa, acquis en 2012, et Sula. 
Ensemble, ces deux exploitations représentent 70 % de la production viticole locale. Et si le marché indien reste encore confidentiel, son échelle le rend significatif et porteur d’avenir.
« L’Inde n’est pas un pays de vin, on y consomme surtout du whisky  [dont l’Inde consomme la moitié de la production mondiale, ndlr], du brandy et de la bière. Mais le marché du vin a commencé à se développer doucement il y a une vingtaine d’années et croît de 15 à 25 % annuellement depuis. Aujourd’hui, mon groupe produit 5 millions de bouteilles par an, essentiellement pour le marché indien. Dans trois ans, nous devrions être à 12 millions de bouteilles, dans 10 ans entre 50 et 100 millions », commente l’investisseur.

D’un marché de niche, réservé aux Indiens très aisés qui voyagent et entendent disposer dans leur pays des mêmes plaisirs qu’en Europe, le vin s’étend aujourd’hui aux jeunes diplômés, attirés par le style de vie occidental, et l’aspect social du breuvage, que l’on consomme entre amis. Les femmes, elles, y voient l’occasion d’une boisson alcoolisée qu’elles peuvent consommer en public sans s’attirer la réprobation sociale attachée aux alcools plus forts ; elles représentent la moitié des consommateurs de vins dans le pays.

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Des projets d’oenotourisme d’ici deux ans

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La cave des premiers crus Clos l'Evêque au château d'Etroyes à Mercurey (Saône-et-Loire)

VisVires Capital ne compte pas s’arrêter à la vigne, mais entend développer un concept de tourisme viticole et de bien-être, qu’il proposera d’abord en Inde, avant de l’exporter vers la France. L’idée est toute simple : « dans chacun de nos domaines, nous allons installer des facilités d’œnotourisme. Ça ira de la visite de cave, au petit musée, en passant par une offre d’hôtellerie complète. Car les indiens sont friands de cette culture, qui leur reste largement mystérieuse. D’ici deux ans, nous aurons déployé ce concept, et le proposerons alors également en France », détaille Ravi Viswanathan. L’investisseur compte également appuyer la dimension santé de ses projets : le vin, et ses anti-oxydants, serviront de base à des « vino-spa » qui conjugueront art de vivre et bien-être

 

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Pour financer ces nouveaux développements, VisVires Capital va monter en puissance. Doté, aujourd’hui, d’environ 100 millions d’€ de capital, la société d’investissement procède actuellement à une levée de fonds – jusqu’à 200 à 250 millions – qui devrait se concrétiser dans les prochains jours. Depuis sa fondation, en 2012, VisVires Capital a poursuivi un credo simple : investir dans de petits marchés pour y prendre une place significative malgré une capacité d’investissement relativement limitée. Le fonds a également recentré ses activités autour du vin et de l’agroalimentaire. Il a notamment investi dans l’entreprise française Ynsect, qui fabrique des farines d’insectes pour l’alimentation animale et a installé son usine pilote à Dole (Jura).
« L’essentiel de nos activités, dans un futur proche, restera orienté vers la vigne et l’alimentation », confirme l’entrepreneur.

 Les vins indiens se dégustent à Vinidivio durant la foire gastronomique de Dijon

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La production de vin en Inde se répartit principalement entre trois régions viticoles : Nasik et Pune sur la côte ouest dans le Maharashtra, et Bangalore au sud dans le Karnataka.
Cultivées sur les plateaux du Karnataka et dans le Maharashtra, les vignes de VisVires Capital donnent naissance à une gamme de vins complète, blancs et rouges, avec des typicités marquées qui en font presque des « vins de marque ». « Nous avons des vins qui ressemblent à les vins français ou italiens, d’autres qui sont plus marqués nouveau monde. Nous ne cherchons pas à produire les meilleurs vins au monde, mais des vins d’excellente facture à un très bon rapport qualité prix », décrit Ravi Viswanathan.
Par curiosité, et par gourmandise, on pourra découvrir une trentaine de ces vins étonnants lors du salon Vinidivio, qui se tient en marge de la foire internationale et gastronomique de Dijon, du vendredi 8 au lundi 11 novembre de 11h à 20h (fermeture à 18h le 11 novembre). Vinidivio propose  également deux master classes samedi 9 et dimanche 10 novembre à 16h.

 Mieux connaître le secteur viti-vinicole en Côte-d'Or sur le site de

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Photos fournies par l'entreprise.

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