AUTOMOBILE/CÔTE-D’OR. L’équipementier japonais, spécialiste dans le monde des directions assistées et des transmissions automobiles, dope sur deux ans la production de son usine dijonnaise avec deux nouvelles lignes d’assemblage dédiées à des constructeurs allemands.
Le site de la capitale de Bourgogne Franche-Comté emploie 850 personnes en moyenne, avec les intérimaires, et affiche des performances pour les seules directions assistées parmi les plus élevées de son secteur.
Une méthode industrielle japonaise éprouvée, associée à une faculté d’adaptation toute cocardière, explique en grande partie ce succès.

Un engagement ne trompe pas. Lorsque rien n’a été facile, de 2009 à 2012, pour le site de JTEKT, implanté à Chevigny-Saint-Sauveur, dans l'agglomération du Grand Dijon, la maison mère japonaise de cet équipementier automobile, spécialisé dans les directions à assistance électrique avec la technologie simple et double pignon, a voulu limiter l’hémorragie de ses effectifs.
Si deux plans successifs de sauvegarde de l’emploi (PSE), touchant 110 personnes, essentiellement des départs négociés et une cinquantaine de licenciements, ont bien eu lieu, « nous avons voulu préserver au maximum les emplois », se rappelle Alexandre Gonnard, président de JTEKT Automotive Dijon Saint-Etienne (JADS).
Pourquoi ? Le président de JADS explique que les industriels japonais ne se résument pas à d'opiniâtres philanthropes, mais ils raisonnent avec pragmatisme : ils se sont dit que perdre à jamais des salariés compétents leur coûterait bien plus cher lorsque l’horizon économique s’éclaircirait de nouveau fin 2012 - début 2013 (*), puisqu’il faudrait alors impérieusement réembaucher et surtout former, ce qui est très chronophage.
Un vaste dispositif de plus de 90.000 heures de formation, jouant à parité avec du chômage technique, a donc été mis en place. « Nos personnels travaillaient à 50% du temps de travail légal, mais touchaient 90% de leur salaire, aussi lorsqu’il a fallu reprendre à plein temps, certains ont même demandé une augmentation », relate sur le ton de l’anecdote le dirigeant.
Une industrie de volume
Cinq ans plus tard, JADS se porte très très bien avec un carnet de commandes plein à 2020 et de sérieux projets à confirmer pour les années suivantes. L’entreprise emploie dorénavant sur un seul site en France, celui de Dijon, 850 personnes avec les intérimaires et affiche un chiffre d’affaires de 357 millions d’€. Si elle prévoit d’avoir une activité stable cette année, elle mise sur 365 à 370 millions en 2018.

Le gain sur appels d’offres de fabrications pour les constructeurs allemands Daimler et BMW, respectivement en 2017 et 2018, l’explique. Deux nouvelles lignes d’assemblage sont en cours de montage. « Pour un même modèle, nous pouvons avoir à faire de 40 à 50 références », précise Alexandre Gonnard. Ce qui explique le 1,5 million d’unités produites, sur le dernier exercice (japonais) du 1er avril 2016 à fin mars 2017.
L’unité dijonnaise de l’équipementier de premier rang, vaste de 21.000 m2 couverts sur un terrain de 14 hectares, investit en conséquence. Avec le rééquipement courant, pas moins de 24 millions d’€ - 10 millions cette année, 14 millions en 2018 - seront injectés dans l’outil industriel.
« Nous sommes une industrie de volume et devons être toujours très performants, avec des équipements de pointe et des personnels qui les maîtrisent parfaitement », souligne le président de JADS. Bilan des courses : l’usine bourguignonne, qui applique un lean manufacturing maison, revendique une productivité bien supérieure à son secteur d’activité.
(*) En raison du gain de marchés, en l’occurrence de nouveaux modèles de constructeurs dont l’industrialisation est actée longtemps à l’avance.

Un peu d’histoire
L’arrivée du groupe nippon en Bourgogne remonte à 2000. Appelé à l’époque Koyo Seiko, il rachète le site PSA en bordure du centre-ville de Dijon et un autre à Saint-Étienne, aujourd’hui fermé. Sans grande possibilité d’évoluer sur place, il cherche un nouveau lieu d’implantation.
La communauté de l’agglomération du Grand Dijon lui offre pour l’€ symbolique 14 hectares de terrains sur la commune de Chevigny-Saint-Sauveur, qu’elle aménage moyennant un investissement de 4,57 millions d’€.
L’usine de 21.000 m2 construite par le Japonais entre en service à partir de 2002 et se spécialise dans la technologie des directions électriques. JTEKT Corporation naît officiellement le 1er janvier 2006 du rapprochement de Koyo Seiko avec le groupe Toyoda.
L’opération donne naissance à un sumo industriel, dans lequel Toyota possède 25% des parts, qui pèse 11 milliards d’€ de chiffre d’affaires et emploie près de 44.000 personnes.
Il exploite 63 usines dans le monde, dispose de 69 bureaux commerciaux et de 18 centres techniques, dont celui d’Irigny (métropole de Lyon) où travaillent plus de 500 ingénieurs et techniciens.
Qui est Alexandre Gonnard ?
Après un parcours dans l’automobile en Allemagne, cet ingénieur de 45 ans, diplômé de l’INSA Lyon, travaille depuis l’an 2000 pour Koyo Seiko, devenu ensuite JTEKT. Il entre au départ comme chef de projet, montant notamment des usines en Europe de l’Est.
La culture comme la mentalité des habitants du pays du Soleil-Levant, Alexandre Gonnard les appréhende parfaitement. Quelques exemples glanés lors d’une rencontre favorisée par le l’UIMM Côte-d’Or et le Medef 21 à l’occasion du dernier « Rendez-vous Business » des deux organisations le 9 mars dernier.
« Un japonais a le goût du détail qui confine à la minutie » ; « Il faut être totalement transparent et clair dans ses explications, car si votre interlocuteur nippon a le sentiment que vous lui cachez quelque chose, il ne comprend pas, panique et perd confiance » ; « A la moindre anomalie sur une pièce lié au dysfonctionnement d’une machine, on arrête, répare et relance ».
Le président de JTEKT Automotive Dijon Saint-Etienne (JADS) a aussi fait sienne cette maîtrise de soi toute asiatique. Et tout spécialement lorsqu’un inopportun journaliste de Traces Ecrites le dérange en plein sommeil, décalage horaire aidant, au Japon. Il fait juste remarquer la situation, mais sans faire perdre la face à son interlocuteur plus que confus, et répond aimablement aux questions.

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