MICROTECHNIQUES/DOUBS. Quatorze ans après la création de l’entreprise, sa technologie s’apprête à être diffusée dans l’industrie à travers un partenariat avec le groupe américain Timex.
Le moteur conçu par Silmach pour alimenter les montres connectées représente une vraie rupture technologique et sera fabriqué à Besançon, dans les locaux de Fralsen Timex.
Baptisé TIMach, le joint-venture pourrait bien, plus tard, intéresser d’autres secteurs industriels.

La Direction générale de l’armement (DGA), c’est le premier client de Silmach. A sa création, en 2003, l’entreprise de Besançon avait en effet choisi comme démonstrateur de son savoir-faire dans les MEMS (micro-electro-mechanical systems) de concevoir un micro-drône libellule qui avait immédiatement séduit cet important donneur d’ordres, et qui en est aujourd’hui à sa troisième version.
La DGA est par ailleurs co-propriétaire d’un des deux brevets de Silmach dans les capteurs. Ce lien étroit explique pourquoi l’annonce du rapprochement de Silmach avec le groupe horloger américain Timex a été officialisée sur son stand au salon du Bourget, le 22 juin dernier.
Pour la DGA, il s’agissait de montrer que cette PME reconnue comme « stratégique » détenait une technologie qui permet différentes approches.
« En version industrielle, le moteur aux performances hors normes de la libellule peut donner ce micro-moteur horloger qui sera fabriqué avec Timex. C’est une version en mode dégradé et à moindre coût », explique Patrice Minotti, le dirigeant fondateur de Silmach.

TIMach, la coentreprise lancée au Bourget pour la fabrication, à Besançon, de moteurs de montres à quartz plus compacts, moins énergivores et plus polyvalents que les traditionnels moteurs Lavet concrétise l’entrée de Silmach dans la production industrielle.
Treize ans après sa création, la PME installée à Temis à Besançon, emploie 22 personnes, devrait réaliser 2 millions d’€ de chiffres d’affaires en 2017 (en prestations R&D jusque-là essentiellement) et commence à industrialiser, en interne, une partie de ses capteurs.
Pionnier des technologies Mems, Patrice Minotti avait voulu tenter l’aventure de l’entrepreneuriat justement pour diffuser, dans l’industrie, ses solutions de rupture pour la motorisation des systèmes nomades (micromoteurs hybrides à base de silicium, comme le PowerMems animant la libellule et bientôt les montres connectées) et le contrôle de santé des structures sans énergie (capteurs pour contrôle des centrales nucléaires, avions, navires, voitures).
« On aurait sans doute pu aller plus vite si on avait eu un système de capital-risque à l’anglo-saxonne. Mais il a fallu aussi attendre la convergence des technologies pour pouvoir développer une alimentation électronique satisfaisante », explique le fondateur de l'entreprise .
«Aujourd’hui, avec les circuits électroniques, les moteurs et la connectique, tout l’écosystème converge. Maintenant, il s’agit de mettre en musique l’industrialisation, et c’est là qu’il est intéressant de s’associer. »
Fabriqués dans l’usine Fralsen-Timex de Besançon

La PME était en lien avec le groupe horloger Timex depuis 2010, dans le cadre d’un partenariat de recherche. La décision d’un joint-venture a été prise début 2017. Les micro-moteurs horlogers PowerMems seront fabriqués dans l’usine Fralsen-Timex de Besançon qui emploie 85 personnes et fournit tous les composants de mouvements quartz du groupe américain.
Si tout se passe comme prévu, le nouveau moteur particulièrement adapté aux montres connectées devrait rapidement inonder le marché mondial. Le directeur général de Timex, Tobias Reiss-Schmidt, estime « à dix millions à terme » la production annuelle de ces nouveaux moteurs si le marché horloger suit.
Pour les emplois créés à Besançon, ni l’un ni l’autre des deux partenaires ne se prononcent encore, mais les chiffres de 100 ou 200, à terme, sont évoqués.
« L’une de mes motivations, c’est de défendre l’emploi franc-comtois et de revitaliser le site bisontin de Timex, en intervenant dans un domaine historique mais avec un changement de paradigme », explique encore Patrice Minotti.
« Fralsen, c’est eux qui injectent l’innovation dans le groupe, l’innovation démarre toujours ici, à Besançon. Nous allons lancer d’abord une phase manuelle puis le produit a vocation ensuite à être automatisé, et c’est là que le site retrouve tout son intérêt. »
Le fondateur de Silmach voit déjà plus loin : TIMach ne devrait pas se limiter à l’horlogerie et proposer ses micro-moteurs pour d’autres applications. « Pour la suite, il faudrait pouvoir lire dans une boule de cristal », dit-il.
Patrice Minotti et sa dream team

Chercheur au CNRS depuis 1985, Patrice Minotti avait été mis dès les années 90 sur la piste de la miniaturisation des moteurs piezo-électriques puis sur silicium par Jean-Jacques Gagnepain, le Monsieur microtechniques franc-comtois qui fut aussi conseiller scientifique de la DGA.
Un pari fou que le chercheur a si bien relevé qu’il était allé diriger, à Tokyo, le laboratoire franco-japonais LIMMS, de 1996 à 1999. Revenu en France, il avait ensuite fondé une équipe de recherche qui a beaucoup publié sur le sujet entre 1998 et 2003. Puis, en 2003, il a lancé Silmach avec le même « commando ».
Quatorze ans plus tard, il a confié le pilotage du projet de joint-venture avec Timex à Pierre-François Louvigné, son directeur des ventes. Les autres hommes forts de cette pépite sont Julien Thevenet, responsable R&D et Patrice Le Moal qui travaille au côté de Patrice Minotti depuis 25 ans et a développé les modèles de calcul.