Formation. Pour une fois, l’Alsace bombe la torse… et avant l’heure : elle accueillera en 2013 la «meilleure main d’œuvre d’Europe pour les métiers de la production en salles blanches», nous annonce-t-elle. Où ? Dans une usine-école.
L’usine-école, «c’est une usine qui forme», expose Guillaume Ebelmann, directeur du projet au sein d’Alsace Biovalley. Le pôle de compétitivité des biotechnologies en a été la cheville ouvrière, mû par la conviction qu’il fallait un tel outil pour attirer les entreprises et continuer à leur faire créer de l’emploi.
Construit à Illkirch (Bas-Rhin), le fief de l’innovation de l’agglomération strasbourgeoise, le bâtiment reproduira à l’identique les conditions de travail très particulières d’un environnement aseptique et stérile, ce qu’on appelle communément les salles blanches caractéristiques de la pharmacie, des biotechs, de la chimie fine et de l’agro-alimentaire.
Ces secteurs, surtout les deux premiers, seront les utilisateurs du bâtiment. Ils en ont réclamé avec ardeur la création et contribué à son financement. Les entreprises apportent 6 millions d’€ sur un budget total de 27 millions où l’on retrouve la Région Alsace, la Communauté urbaine de Strasbourg, l’Union européenne et l’Etat, pour 9 millions d’€, dégagés par le Programme Investissements d’Avenir (le Grand emprunt).
Situation en réel
«Travailler dans ces environnements, c’est spécial. Il y a des zones de dépression, des consignes strictes à respecter. L’usine-école aura la vertu d’en faire prendre conscience en réel au candidat, quitte à ce qu’il abandonne en cours de cursus en constatant qu’il n’est pas fait pour cela», commente Rémi Gloeckler, vice-président de la biotech strasbourgeoise Transgène.
3500 étudiants, salariés et demandeurs d’emploi sont attendus chaque année.
L’offre de formation se divise en trois volets, à destination de publics venus de toute la France, voire du reste de l’Europe.
La formation initiale compte attirer chaque année 770 étudiants du bac professionnel au Master. La formation continue est dimensionnée pour accueillir 2 500 salariés de l’industrie de la santé essentiellement, en priorité des opérateurs et techniciens.
Plus original, le troisième volet consiste en des «parcours de requalification professionnelle». L’usine-école entend reconvertir chaque année vers la pharmacie-santé, 220 salariés ou demandeurs d’emploi de métiers traditionnels comme la métallurgie et le textile, par l’obtention d’un CQP (certificat de qualification professionnelle).
Les deux mondes ne sont pas à des années-lumière l'un de l'autre, souligne Guillaume Ebelmann : «Certains profils de l’industrie classique remplissent jusqu’à 80 % des pré-requis, car ils ont l’expérience du travail en environnement difficile, exigeant le respect strict de procédures et de consignes».
Réalisées majoritairement dans le cadre de l’alternance (contrat d’apprentissage ou de professionnalisation), les formations seront dispensées pour l’essentiel par des personnels externes : université de Strasbourg, entreprises, centres de formation d’apprentis, et par l’Ifis, l’organisme de formation de la Fédération nationale des industries de santé.
Le secteur des industries de santé emploie 500.000 salariés en France dont 50 000 salariés en Alsace. «Il crée de l’emploi, y compris de production, et ne se résume pas au chercheur derrière son éprouvette», rappelle Nicolas Carboni, directeur général d’Alsace Biovalley.
Unique en Europe, l’usine-école sera une facilitatrice. Normal quand on s’appellera…Ease. Le très mondialisé monde la pharma/biotech n’a pas résisté à la tentation de l’anglicisme. Son remue-méninges a abouti à cet acronyme pour "European Aseptic and Sterile Environnement".