AGROALIMENTAIRE/BAS-RHIN. Après l’effort social, le temps des investissements est venu chez Delpierre à Wisches (Bas-Rhin).
Le fabricant de produits de la mer, appartenant au groupe Labeyrie, lance un programme d’investissement d'environ 4 millions d’euros et annonce l'embauche d'une dizaine de personnes.
Pour assainir sa situation, l'entreprise avait signé l'an dernier, un accord de compétitivité.

Cette usine de fabrication de produits de la mer du groupe Labeyrie, et en particulier de saumon, a fait comme d’autres entreprises. Au printemps dernier, elle a signé un accord de compétitivité qui ne dit pas son nom, du moins qui ne s’inscrit pas dans le cadre fort contraignant de la loi de juin 2013 qui lui donne existence officielle en France.
Signé par le seul FO, syndicat majoritaire - la CFDT et la CGT ont adopté une posture de refus -, le texte vise à baisser le coût horaire du travail « sans toucher au salaire net », rappelle la direction : non-rémunération d’une partie des temps de pause, modulation plus ample du temps de travail, chasse à l’absentéisme chronique grâce à une prime d’assiduité et à l’amélioration des conditions de travail. Quant aux salaires, ils sont gelés pendant deux ans.
Confrontée au moment des négociations à une petite vague médiatique, la direction de Delpierre Wisches avait eu le mérite, pas fréquent, de ne pas se recroqueviller comme une huître, mais au contraire de jouer la transparence. Un semestre plus tard, Emmanuel Romary, le directeur rappelle le contexte avec le même souci de pédagogie.
« Menacée d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), et dans sa pérennité même, l’usine a vu ses volumes de production passer de 5 200 tonnes en 2009 à 3 600 tonnes aujourd’hui et elle était en déficit depuis trois ans. L’ouverture du marché européen l’a mise en concurrence notamment avec la Pologne sur les produits premier prix qui étaient sa marque d’identité au début des années 2000 », explique t-il.
Le non-remplacement des départs naturels, qui a ramené les effectifs permanents de 185 à 147 personnes en six ans, n’a pas suffit. « Il fallait agir sur le coût du travail. A 24 € charges comprises, il n’était pas question de pouvoir lutter contre les 4,50 € des pays de l’Est ». Il a également été constaté que l’usine alsacienne affichait des coûts de production de quelques euros supérieurs aux autres usines du groupe. « En compensant l’écart, le site pouvait retrouver sa compétitivité », poursuit-il.
Au final, la négociation pour l’accord de compétitivité n’a pas complètement effacé cet écart, mais elle l’a suffisamment réduit pour justifier de nouveaux investissements. Dans le cas présent, la compétitivité signifiait la capacité à accueillir des produits de plus forte valeur ajoutée moins exposés à la concurrence à tout va.
Des investissements à hauteur de 4 millions d’euros environ

Ainsi, il a été décidé de « passer du seul saumon fumé au saumon dans tous ses états », comme le précise Emmanuel Romary : fumé toujours, mais en version plus haut de gamme, ou encore saumons salés comme les pavés de saumon sauvage d’Alaska prêts à cuire, que le consommateur retrouve en grande distribution dans les bacs du rayon marée. Une partie de la production a été transférée du site de Fécamp, dont l’activité est suffisamment soutenue pour supporter cette perte de volume.
Les investissements pour ce programme baptisé « Wisches 2016 » se montent à 4 millions d’€ environ. Ils comprennent principalement la rénovation de la production de froid pour 1,5 million d’€, la mise en place d’équipements pour plus d’1 million à la charge de Delpierre et 1,36 million pour la construction d’un atelier-relais, celle-ci étant financée par les collectivités.
Accolé à l’usine, ce bâtiment dont Delpierre sera locataire, a démarré ses travaux en décembre dernier, il entrera en service en juin prochain. Il comportera une cellule de développement pour la conception de nouveautés à Wisches, qui n’existait pas jusqu’alors.
Ainsi revigorée, l’usine poursuit deux objectifs : remonter ses volumes à près de 4 000 tonnes et « retrouver une rentabilité acceptable rapidement », dixit sa direction.
Recrutement d’une dizaine d’emplois qualifiés
Alors qu’il avait préféré ne pas prendre d’engagements sur des embauches, le poissonier se met à recruter une dizaine d’emplois qualifiés (cadres, agents de maîtrise, opérateurs spécialisés).
« D’ici à la fin de l’année, nous devrions totaliser entre 155 et 160 salariés en CDI », confirme Emmanuel Romary. Dans ce métier très saisonnier, les effectifs temporaires grimpent vite : en période haute en fin d’année, emplois d’intérimaires et saisonniers peuvent représenter un effectif équivalent à celui des permanents.
« Le sauvetage de l’usine est une œuvre collective », tient à souligner le directeur. « Bien sûr, il y a eu la volonté du groupe de chercher des solutions. Mais nous avons aussi bénéficié de la formidable mobilisation des pouvoirs publics ».
La préfecture de région et la sous-préfecture de Molsheim, la Région Alsace, le conseil départemental du Bas-Rhin et son agence économique l’Adira, la communauté de communes de la Vallée de la Bruche, la mairie de Winches sont salués, : « Tous ont travaillé main dans la main ».