PLASTURGIE/MARNE. La PME rémoise formule des mélanges à base de PVC, appelés compounds. Ces produits semi-finis servent de matière première à des industries de transformation, l’automobile, le bâtiment, et… le disque vinyle.
Cette entreprise réputée pour son caractère innovant, n’a jamais cessé de produire les granules vinyliques qui servent de matière première au pressage des disques.

Face aux assauts répétés du CD puis du DVD, on ne donnait pas cher de la peau du disque microsillon. Les DJ, les collectionneurs et les nostalgiques continuaient certes à entretenir la flamme, mais le 33 tours restait moribond, véritable dinosaure d’une ère technologique révolue.
Puis, contre toute attente, la galette noire est revenue au goût du jour. Un son réputé plus chaud que le numérique, une pochette plus attrayante, un produit plus agréable à manipuler : c’est la résurrection du vinyle.
« Le Phénix renaît de ses cendres », confirme un homme bien placé pour témoigner de ce retour en grâce et l’apprécier à sa juste valeur : Jérémy Dauchin, le directeur général de Résinoplast.
Car cette entreprise rémoise, qui appartient aujourd’hui au français Ivy Group, n’a jamais cessé de produire les granules vinyliques qui servent de matière première au pressage des disques. « On a conservé la ligne de production et les formules », indique t-il.
Heureuse inspiration, car les volumes ont « doublé en trois ans ». Résinoplast est à l’origine d’un tiers des 90 millions de disques gravés chaque année dans le monde, l’équivalent de 5.000 tonnes de granules.
Mais cette PME implantée à Reims depuis 1972 et qui a changé de mains plusieurs fois sans perdre son nom ne se contente pas de suivre la mode : elle s’efforce au contraire de réinventer l’antique vinyle à grand renfort d’innovations.
Un microsillon qui changerait de couleur pendant la lecture
Après les 33 tours multicolores, transparents ou qui brillent dans le noir, Résinoplast planche sur un microsillon qui changerait de couleur pendant la lecture, s’ornerait d’hologrammes ou diffuserait des odeurs ! Le tout en atteignant une qualité de son égale à celle du numérique.

C’est pourquoi l’entreprise a embauché un ingénieur-docteur entièrement dédié à cette activité de R&D et fait l’acquisition d’une vieille presse à disques, bizarrement surnommée Tatiana alors qu’elle vient tout droit des Etats-Unis.
Il ne s’agit pas pour Résinoplast de se lancer dans la production de disques, mais de disposer de ses propres moyens de pressage aux fins de tests et d’essais.
D’ailleurs, aussi original et inattendu qu’il soit, le marché du disque vinyle ne représente pour la PME que 15 % de son chiffre d’affaires, en y incluant d’autres biens de consommation plus marginaux.

L’automobile, avec 50 % de son activité, le bâtiment et la construction, avec 35 %, constituent ses deux secteurs de prédilection.
« Nous accompagnons depuis plus de vingt ans les constructeurs automobiles allemands, explique le directeur général. En particulier Volkswagen, dont nous sommes fournisseurs de rang 1. »
Résinoplast fabrique la poudre qui donnera un aspect cuir aux planches de bord. « Nous livrons directement depuis Reims le site de Wolfsburg, précise Jérémy Dauchin. On a commencé avec la Golf IV en 1997 et on en est à la Golf VII. »
D’autres marques s’appuient sur Résinoplast et ses sociétés sœurs implantées aux quatre coins du globe (Espagne, Italie, Allemagne, Japon, Vietnam, Chine, Mexique, USA) : Ford, BMW, Mini, PSA, Renault, Toyota, Nissan, Opel, de même que des équipementiers tels que Faurecia, Yanfeng, Antolin et Reydel (ex-Visteon). Ce qui fait que « le nom de Résinoplast est connu dans le monde entier ».
« Nous équipons les planches de bord de 10 millions de véhicules par an, dont 3 millions depuis Reims et le reste avec nos autres sites. » Le siège rémois héberge aussi le centre d’ingénierie et le laboratoire.
Résinoplast fournit également le PVC qui servira à fabriquer des joints de vitres arrières ou des profilés de toit. Car tout est question de formulation.
70 % à l’export
La PME marnaise fait un peu fonction de chef cuisinier. Elle mixe différents ingrédients selon des recettes qui répondent aux cahiers des charges des clients afin de donner les propriétés voulues aux futurs objets. Comme en cuisine, le succès dépend de la pesée et du dosage. Environ 300 formules sont actives à ce jour.
« Il entre et sort 30.000 tonnes de matières premières par an de l’usine. Nous recevons la résine PVC non additivée sous forme de poudre blanche et la mélangeons à du plastifiant liquide, à différents additifs, gélifiants, colorants, stabilisants… »
Le produit ainsi transformé une première fois par Résinoplast repart sous forme de poudre sèche, de granule ou de liquide selon les applications.

Les granules servent donc à fabriquer des disques vinyles, mais aussi différentes pièces utilisées dans le bâtiment et la construction : profilés rigides (fenêtres, bardages) ou flexibles (tuyaux, gainages de câbles), joints, etc.
« Ce sont souvent des marchés locaux à forts volumes, avec beaucoup de contraintes en termes de coût et de technique », souligne le directeur général. Les débouchés se situent principalement en France et au Benelux.
Tous marchés confondus, Résinoplast exporte 70 % de sa production : 50 % en Europe et 20 % ailleurs dans le monde (Chine, Afrique, Etats-Unis…). La PME, qui réalise un chiffre d’affaires d’environ 60 millions d’€, tourne en 3x8 ou en 5x8 selon les secteurs. Elle va investir 700.000 € dans une nouvelle ligne d’extrusion qui sera opérationnelle en 2017.