Citraval, la filiale lorraine du groupe alsacien Schroll vient de mettre en service près d’Epinal, un centre de tri des déchets doté de nombreux automatismes afin de réduire au minimum la part non valorisable. L’équipement adapté à l’extension, cet été, des consignes de tri de nouvelles catégories de plastiques, doit être complété ultérieurement par des robots de surtri, sur le modèle de ce qui a été déjà installé à Strasbourg.
Dans son genre, c’est un bijou de technologie qu’a produit le groupe Schroll, à Chavelot près d’Epinal (Vosges). « Le centre de tri de déchets le plus abouti de France », assure Pascal Schroll, le co-dirigeant avec son frère Vincent de l’entreprise familiale alsacienne. En l’occurrence, c’est la filiale lorraine, Citraval, qui a porté le projet destiné à répondre aux besoins d’Evodia, le syndicat de gestion des déchets pour l’ensemble du département Vosges, soit un périmètre de 360.000 habitants.
Inauguré en février, l’investissement d’un montant de 15 millions d’€ est très conséquent à l’échelle du groupe de 580 salariés. Celui-ci reste l’équivalent d’une PME dans l’univers très concentré des déchets, mais qui sait y tracer son chemin : si le groupe Schroll a construit ce centre, c’est parce qu’il a remporté pour dix ans le contrat de gestion d’Evodia, auparavant détenu par Suez.
Sur 12.500 m2 de bâtiments et 4 hectares de terrain, le site Citraval pourra traiter 80.000 tonnes par an. « Entre la collecte sélective des ménages et la récupération des déchets industriels banals auprès des entreprises, nous en sommes déjà à 60.000 tonnes en rythme annuel », annonce Pascal Schroll. Prévue à partir de l’été prochain dans les Vosges, la fameuse extension des consignes de tri apportera les surcroîts. Les équipements ont été pensés pour accepter les nouvelles catégories de plastiques qu’elle induit : films, pots, barquettes…
Le site vosgien emploie 34 salariés, chargés de piloter les machines automatiques et d’apporter le dernier œil humain de correctifs, dans l’objectif que le maximum de ce qui sort de Chavelot parte en filière de valorisation matière (la sidérurgie pour les ferrailles, les papeteries, la plasturgie…) voire en valorisation énergétique, en limitant à une part résiduelle l’enfouissement en décharges.
Des robots de surtri, comme à Strasbourg

Le process se répartit en deux lignes. L’une extrait papiers, cartons, ferrailles et corps creux. L’autre fait le tri entre bouteilles plastiques, briques alimentaires et emballages aluminium. Le tout rassemble le dernier cri des technologies respectives de criblage balistique, tri magnétique ou de tri optique.
Ces équipements seront rejoints ultérieurement par des robots de surtri, sur le modèle de celui déjà installé sur le centre homologue de Schroll à Strasbourg. « L’intelligence artificielle commence à entrer dans nos métiers. Toutes les installations de Chavelot ont été coconçues avec leurs fabricants », précise Pascal Schroll. « On sait par exemple séparer les matières plastiques jusqu’à leur moindre détail, à savoir la résine », ajoute-t-il.
Ce centre, son exploitant et le syndicat mixte commanditaire ont voulu aussi en faire un lieu de pédagogie sur le monde des déchets trop souvent considéré comme opaque, et à tort. Un circuit de visite a été aménagé, suffisamment proche des équipements pour en voir le fonctionnement, mais avec un minium de distance de sécurité.
Au-dessus d’eux, des pancartes affichent bien distinctement la matière traitée (bouteilles en PET de couleur claire, PET coloré, briques films plastiques, aluminium…) assortie de quelques lignes d’explication grand public sur le process. Dans le bâtiment d’accueil attenant aux lignes de traitement, un espace a été aménagé afin de reproduire le concept de la « maison du recyclage » implanté à Strasbourg depuis quelques mois.
« Nous pratiquons un métier formidable mais compliqué à appréhender pour le public… et à gérer pour nous entrepreneurs ! Il nous interdit de raisonner en logique de production de série. Tous les mois, se pose la question : quelles quantités allons-nous traiter et vendre , et à quel prix ? Et la réponse varie », expose Pascal Schroll.
La fluctuation des cours des matières issues sur le recyclage pèse sur le bilan économique, surtout quand elle évolue à la baisse comme actuellement. Alors que les volumes traités par le groupe Schroll ne cessent de croître pour frôler désormais le million (975.000 tonnes en 2019, + 8 % en un an, le chiffre d’affaires a baissé l’an dernier d’environ 15 %, pour s'établir à 110 millions d’€.
« Notre métier se situe vraiment au cœur de l’économie circulaire », renchérit le dirigeant, qui rappelle le credo de l’entreprise familiale : « Tendre vers le 100 % recyclable, et donc vers le zéro enfouissement. » Schroll s’affiche comme opérateur global, récupérateur certes comme depuis l’origine, mais pas que. Son histoire a débuté en 1892 avec l’arrière grand-père des actuels dirigeants, Louis-Fernand Schroll qui commença à sillonner la région de Strasbourg , à cheval, à la quête de papiers et cartons usagés des relieurs et imprimeurs afin de les livrer à une fabrique de cartons allemande - l’Alsace appartenait alors au second Reich.

Depuis, le groupe a bien grandi. Mais sa croissance s’est déroulée avec le souci d’en maîtriser les tenants et aboutissants, avec peu de croissance externe, et le souci d’une expansion géographique maîtrisée. À partir de l’Alsace, Schroll s’est cantonné au Territoire de Belfort, à la commune allemande de Kehl limitrophe de Strasbourg, et plus significativement à la Lorraine pour aboutir à 21 sites. « Notre ancrage se veut régional : nous connaissons bien nos clients et réciproquement. C’est cette qualité de relation qu’il convient de cultiver avant tout, en proposant des nouveaux services fiabilisés. La priorité c’est de continuer à bien mailler notre territoire », résume Vincent Schroll, le frère de Pascal.
À destination des clients professionnels, le groupe met notamment à disposition ses huit « Recyparc » donnant l’accès, par badge personnalisé, à des sites de réception de plus de 30 types de déchets. Il a aussi développé avec succès un service de destruction de documents confidentiels, baptisé Neutralis.