Découverte de Laurence Ruet qui conçoit des poupées d’art, véritables sculptures miniatures. Sa méthode ? D’abord, fabriquer une expression en commençant par mouler la tête et insérer les yeux. Reconnue dans le milieu, elle vient de réaliser deux poupées pour une série télévisée d’Arte.
Dans l’atelier de Laurence Ruet à Dijon, très peu de choses : une armoire dans laquelle elle stocke ses produits, une vitrine qui expose quelques modèles, un moule à gratin dans lequel se trouve une tête de poupée, quelques mini-mannequins en bois… Mais c’est d’ici que tout part. D’abord, la créatrice utilise de la résine polymère – achetée sur Internet – et la modèle avec ses doigts pour former la tête. Elle aime bien ce produit facilement malléable parce qu’il « ressemble à de la peau ».
Puis, elle insère des fils en fer semi-rigides dans la tête pour la relier au corps de la poupée. Elle positionne ensuite les yeux – achetés en Allemagne –, avant d’en sculpter le contour. « Je recherche l’expression, je veux que la poupée soit vivante, qu’elle renvoie des sentiments, tant que je n’ai pas les yeux, je n’ai pas la poupée ».
Le travail de la pâte de résine se fait avec une simple spatule de dentiste qu’une amie lui avait remis au moment de ses études. Pour la lisser, elle applique de l’acétone, en quantité plus ou moins importante suivant l’effet recherché. La tête est ensuite cuite une première fois avec les yeux, pendant une demi-heure à 135 degrés.

L'artisane la sculptera ensuite pour travailler des détails avant qu’elle ne repasse au four. À cette étape de la confection, tout peut encore basculer suivant l’inspiration car, dit-elle avec détermination, « si je n’arrive pas à faire quelque chose qui me convienne, je casse une partie du visage et je le refais ».
C’est tout l’intérêt de cette pâte polymère : elle peut être travaillée y compris après cuisson. Cette phase est d’ailleurs très simple puisqu’un simple moule de cuisine permet d’enfourner la poupée dans un mini-four. Une fois le visage sculpté avec les oreilles, place à la peinture pour personnaliser les joues, le nez, les sourcils, mais aussi les tâches de rousseur qu’elle aime bien faire.
Une succession d’étapes minutieuses

Laurence Ruet se dit très exigeante sur le matériel. Comme le marché est spécifique, la difficulté principale réside dans l’approvisionnement. Elle a du récemment changer de marque de résine de polymère contre une moins rigide. Elle rencontre le même problème pour les yeux que son fournisseur a cessé de réaliser sur mesure.
Pour les cheveux, Laurence achète des mini-perruques qui viennent de Russie, fabriquées avec de la laine de chèvre tibétaine dont la particularité est d’être particulièrement soyeuse et proche du cheveux humain. À l’intérieur de la perruque, elle coud une mini calotte en cuir pour donner une bonne adhérence entre la tête et les cheveux.
Puis elle fixe une collerette pour rattacher la tête au corps. Le corps se compose de tissu, souvent à partir de vêtements d’enfants chinés dans les brocantes. Une de ses amies adepte du tricot confectionne les vêtements en laine. Les mains, les bras et les pieds, sont fabriqués un peu de la même façon que la tête, avec toujours ce fil de fer semi-rigide qui relie les membres entre-eux.
La réalisation d’une poupée d’une taille d’environ 30 cm, aura pris 80 heures de travail... et est plus de de 1.000 €. L'artisane en vend chaque année pour environ 20.000 € à des acheteurs de toute l'Europe, la plupart des collectionneurs, et pour beaucoup des fidèles.



© Sabrina Dolidze
Secrétaire trilingue à l’âge de 21 ans parce que son père voulait qu’elle ait un « vrai métier », Laurence Ruet travaille pour différents employeurs dont Cartier et la Fnac. Naviguant entre Paris, Bourges (Cher) et Dijon, il lui faudra attendre la trentaine pour que sa créativité s’exprime suite à sa grossesse, après avoir vu une exposition de poupées d’artistes au château de Meillard (Allier). C’est alors une révélation. Elle sait qu’elle va fabriquer des poupées. Avec instinct, coeur et envie, elle s’aventure vers la création de sa première poupée, qui pour elle fut très réussie.
Des rencontres ont suivi : une collectionneuse de poupées croisée à des cours de peinture lui demandera de confectionner des têtes pour des poupées anciennes. Il y eut aussi deux grand-mères qui lui demanderont de « reproduire » en poupée leurs petites filles. En 1997, elle réalise trois ventes lors de son premier salon spécialisé. Elle aura ensuite l’occasion de participer à des salons divers et variés, trois fois en Russie, en Allemagne, aux Pays Bas… et même d’exposer à Paris à la bibliothèque Forney à côté de celle qui l’a inspirée dans le métier : l’artiste Anne Mitrani.
Dernièrement, une photo de ses créations a illustré la couverture du roman « le créateur de poupées » de Nina Allan. Et puis, l’an dernier, Arte a repéré Florence et lui a demandé de réaliser deux poupées pour une série qui sera diffusée prochainement, « Esprit d’Hiver ». Elle a alors travaillé en collaboration avec le réalisateur du film et le chef de décoration.
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