EQUIPEMENTIER AUTOMOBILE/HAUT-RHIN/ALLEMAGNE. On vante assez souvent l’entreprise de taille intermédiaire (ETI) familiale allemande qui apporte la prospérité à un territoire français, pour ne pas résister au plaisir de mettre en avant un cas inverse.
A Weil-am-Rhein, à quelques kilomètres de la frontière française, face à la ville alsacienne de Saint-Louis (Haut-Rhin) où il possède aussi une unité de production et son centre de recherche, le groupe grenoblois ARaymond est devenu un pilier de l’économie locale, grâce à son usine qui dépasse désormais le millier de salariés.

 

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Le site de Weil-am-Rhein est doté d’un impressionnant système de convoyage automatique des pièces. ©Juri Junkov

 

Une récente visite de PerfoEst, l’association des entreprises de la filière automobile liée au Pôle Véhicule du futur Alsace/Franche-Comté, a permis de découvrir quelques secrets de réussite de cette ETI française implantée en Allemagne depuis presque trente ans, le moindre n’étant pas le centre de formation interne.


Créé en 1988, le site de l’autre côté du Rhin, à Weil-am-Rhein, dans le Land de Bade-Wurtemverg, face à la ville alsacienne de Saint-Louis (Haut-Rhin) n’a cessé de grandir pour atteindre un effectif de 1.070 salariés désormais.


En juillet, ARaymond achèvera une nouvelle extension de 50 millions d’€ d’investissements. Il est devenu le premier pôle de production de l’entreprise en Allemagne.

 

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Les deux autres sont tout proches, à Lörrach, site historique de préfabrication du métal implanté dès la fin du XIXème siècle (500 salariés), près de Fribourg, et à Bremgarten (connecteurs rapides, 140 salariés), connu pour avoir été une ancienne base de l’Armée de l’air française.


Le groupe ARaymond, au total, emploie 5.900 salariés pour un chiffre d’affaires d’1,075 milliard d’€ en 2015. Basé à Grenoble, son origine remonte à 1865. Connu pour l’invention du bouton-pression, il s’est développé auprès de l’industrie textile avant de se tourner principalement vers l’automobile, pour des pièces de fixations par clipsage, sa spécialité.

 

Impressionnant système de convoyage automatique des pièces

 

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Raymond achève une nouvelle extension de 50 millions d’€ d’investissements de l’autre côté du Rhin. ©Juri Junkov

 

« Le groupe produit 25.000 types de pièces différentes ! Son dirigeant Antoine Raymond, représentant la cinquième génération, a coutume de dire que nos fabrications ne se voient certes pas, mais que si on les retire, le véhicule tombe en miettes ! », souligne Jürgen Trefzer, le gérant de la filiale allemande.

 

Sur la rive alsacienne, ARaymond compte deux implantations, à Saint-Louis (Haut-Rhin) : une unité de production de systèmes de collage pour l’automobile de 45 personnes et surtout, depuis 2011, le centre mondial de recherche-développement du groupe, le Rayce (Raymond Centre of Expertise) comptant une trentaine d’ingénieurs et chercheurs permanents.

 

L'important site de Weil, quant à lui, se dédie à la fabrication de pièces de fixation métalliques et plastiques et à leur assemblage, pour des parties multiples du véhicule : tapis de sol, capots, pare-soleil, raccords rapides, airbags, habillage intérieur et extérieur, chaîne de traction, distribution électrique, etc.

 

« L’automobile représente 90 % de l’activité, mais nous sommes entrés dans un processus de diversification pour ramener cette part à environ 75 %. Les énergies renouvelables constituent l’une des clientèles nouvelles », complète Jürgen Trefzer, également directeur du site.

 

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Le groupe produit 25.000 types de pièces différentes présentes dans une automobile. ©Juri Junkov

 

Dans les ateliers, les machines d’injection, les systèmes d’usinage et de soudage de dernière génération se succèdent. Le site s’est également doté d’un impressionnant système de convoyage automatique des pièces et ses outils de supply chain optimisent un peu plus ses process.

 

Mais l’une des grandes richesses est ailleurs : dans le centre de formation interne. Sur ce sujet, dans le « match » France-Allemagne, c’est la Mannschaft qui reprend clairement le dessus, car ce centre s’inscrit dans la recette à succès de l’apprentissage dual à l’allemande.

 

Une formation théorique et pratique pendant trois ans

 

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L’entreprise a fait du centre de formation interne l’un de ses principales sources de recrutement. ©Juri Junkov

 

Pendant trois ans, les cours théoriques - notamment à l’école duale DHBW (Duale Hochschule Baden-Württemberg) de Lörrach - alternent avec une formation pratique dans l’entreprise, pas seulement sur le lieu de travail, mais aussi dans un atelier d’apprentissage spécifique.

 

La différence semble décisive à Valjon Imeri, jeune Alsacien de 20 ans en formation d’outillage qui a connu le système français. « On n’apprend pas sous la pression d’un impératif de production, les formateurs prennent le temps nécessaire à nous inculquer les bons gestes », témoigne-t-il.

 

Ces formateurs sont des personnels d’ARaymond qui tirent leur légitimité de leur longue expérience professionnelle. Les élèves apprennent leur métier sur le parc machines propre à l’entreprise, dans un cadre qui débouche sur un diplôme reconnu au niveau national.

 

Le dispositif conjugue ainsi une reconnaissance officielle, une rémunération déjà appréciable (1.000 € mensuels) et, pour l’entreprise, la garantie d’une formation parfaitement adaptée à ses besoins.

 

Le centre de formation de l’entreprise accueille 30 à 40 personnes par an, en grande majorité des jeunes de 15 à 22 ans. Compte tenu des trois ans de cursus, il compte donc en permanence une centaine d’apprenants.

 

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« L’obtention du diplôme ne garantit pas l’embauche, mais de fait, le taux d’intégration révèle que presque tous les jeunes sont embauchés et près de trois sur quatre sont toujours dans l’entreprise au bout de quelques années. Nous avons ainsi procédé à 184 recrutements de cette façon sur les huit dernières années », rappelle Jürgen Trefzer.

 

Autre marque d’identité de l’entreprise allemande, l’entrée par la « petite porte » ouvre des perspectives de carrière presque sans limites : « Ici, neuf membres du comité de direction sur vingt sont passés par une formation chez ARaymond », annonce le directeur.

 

Le centre de formation n’éprouve guère de mal à attirer des candidats. Pour convaincre, il peut compter sur des ambassadeurs bien placés pour en parler : souvent, ce sont les jeunes eux-mêmes qui en font la promotion dans les salons d’orientation.

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