LUNETTERIE/JURA. Sauvé à la barre du tribunal en décembre, l’atelier de lunetterie Fidela à Morez (Jura) est reparti.
Intéressé par son savoir-faire en fabrication laminée, son repreneur, le Jurassien Victor-Gros Distribution, a relancé la commercialisation de la marque Airlight, qu’il a reprise avec toute l’équipe technique.
Quatre mois plus tard, le chiffre d’affaires s’annonce conforme aux prévisions, voire meilleur.

 

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Fidela est un des tout derniers lunetiers à maîtriser la fabrication laminée.

 

Les Moréziens connaissent aussi l’entreprise sous le nom des « Fils d’Aimé Lamy », dont Fidela est la contraction. Le lunetier installé depuis 1820 au 167bis de la rue de la République à Morez (Jura), sous le lycée lunetier Victor-Bérard, est le plus ancien de la vallée, mais il a bien failli disparaître fin 2016.

 

En difficulté financière, l’atelier de création et de fabrication des montures Airlight, Fidela et Bugatti avait été placé en redressement judiciaire en septembre par Frédéric Lafite, le distributeur optique parisien qui l’avait racheté en 2011 à Dominique Lamy, le représentant de la 5e génération des Lamy, une famille historique de la lunette dans le Jura.

 

Lucas Gros, directeur général de la société jurassienne de lunettes Victor-Gros Distribution, implantée à Lons-le-Saunier, l’avait sauvée in extremis.

 

« Fidela, c’est un des tout derniers lunetiers à maîtriser la fabrication laminée, qui permet des montures extrêmement fines et solides. Un sous-traitant m’a parlé de ses difficultés et j’avais déposé une offre de reprise 48 heures après avoir vu le dossier », expliquait Lucas Gros peu après la reprise, effective au 1er janvier 2017.

 

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« Pour nous qui produisons et distribuons la marque Traction Productions, c’était l’opportunité de compléter la gamme, en repositionnant la marque Fidela sur un segment légèrement plus haut. Nous pouvons ainsi maintenir la fabrication locale. »


Dans cette vallée et pour la lunetterie française, où elle est concentrée, la survie de la plus vieille entreprise lunetière quelques semaines après le naufrage de Logo – 172 salariés à Morez –, c’était tout un symbole.

 

Quatre mois plus tard, l’opération semble réussie : la marque Airlight a été très vite intégrée dans le réseau de vente de Victor-Gros Distribution et les prévisions de vente pour 2017 sont même dépassées.


« On estimait qu’à 1,5 million d’€ de chiffre d’affaires on serait heureux, mais on atteint déjà 1,7 millions », confie aujourd’hui Lucas Gros, enthousiaste.

 

Renégocier les contrats en France est à l’export

 

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Fidela emploie 16 personnes à Morez, bientôt 17.


« A l’export c’est plus compliqué, nous nous attachons maintenant à re-signer des contrats avec les clients du Royaume-Uni, de Belgique et d’Australie, après nous être entendus sur une hausse des prix d’environ 10%. Ce sont des négociations techniques mais faciles pour nous : ce sont ces conditions ou rien. »

 

« Quant au marché français, poursuit-il, nous renégocions certains accords signés avec les centrales d’achat, en faisant passer la marque Airlight sous les accords de Victor-Gros Distribution, avec un gain immédiat. Ca passe, le produit est très qualitatif et on va pouvoir trouver tout de suite la rentabilité qu’on cherchait. »


Reprise et repreneuse, les deux sociétés ont des airs de famille. Lucas Gros représente la sixième génération de la famille Gros, alors que Dominique Lamy, qui avait dirigé Fidela jusqu’en 2011, est issu de la cinquième génération de la famille de lunetiers.


Victor-Gros avait été créée à Oyonnax (Ain) en 1872 et a fabriqué des montures acétate jusqu’en 1995, où la lunetterie française a commencé à subir la concurrence asiatique.

 

Installée à Lons-le-Saunier (Jura), la société Victor-Gros s’est transformée pour devenir le distributeur de la marque haut de gamme Traction Productions – labellisée « Origine France garantie », comme la marque Airlight – et, dans un contexte de bonne santé de la distribution haut-de-gamme, a remis un pied dans la fabrication.

 

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Tombé dans la marmite tout petit, Lucas Gros connaît la filière comme sa poche et croit à l’avenir de la lunette jurassienne haut de gamme.

 

Sa société emploie 19 personnes, dont 10 dans le Jura, compte trois boutiques à Paris et une trentaine d’agents commerciaux dans le monde. Victor-Gros a réalisé un chiffre d’affaires de 4 millions d’€ en 2016 et espère monter à 6 millions en 2017 avec « Fidela 1820 », ainsi qu’elle a rebaptisé le lunetier morézien.


Lors de la reprise à la barre du tribunal de commerce de Lons-le-Saunier, en décembre, Lucas Gros s’était engagé à conserver l’atelier de Morez et son équipe, soit 14 des 34 salariés. Deux embauches ont été réalisées depuis, qui portent l’équipe à 16 et bientôt 17 personnes.


Parallèlement au chantier de reconquête de l’export, Lucas Gros cherche maintenant de nouveaux locaux, à Morez toujours, pour loger cette équipe affûtée et performante : le bail du 167bis de la rue de la République arrivera à son terme fin 2018. Mais l’aventure continue.

 

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La marque Airlight que le repreneur veut repositonner légèrement plus haut.


L’opération « Lunette comtoise » des opticiens mutualistes


« Ne vous trompez pas de monture », affiche depuis quelques jours la campagne de communication des 8 opticiens mutualistes du Doubs en faveur de la « lunette comtoise ».
Conscients des difficultés de la filière locale, ils sont allés à la rencontre des entreprises et se sont mis d’accord avec quatre d’entre elles (Decoracet et Modern’Optique à Oyonnax, Paget à Morez, Optic 2R à Censeau) pour fabriquer des lunettes de qualité, à prix doux et écoresponsables : des montures à partir de 120 €, en acétate de cellulose qui est issue de la fibre de coton, biodégradable et hypoallergénique.
« Les entreprises franc-comtoises sont équipées pour faire des petites séries. Nous leur avons commandé 800 montures dans un premier temps, qui pourraient représenter 7 à 8% de nos ventes. Il y a une demande pour le Made in France », explique Nicolas Daclin, l’un des 8 opticiens mutualistes du Doubs.
Une première expérience avait déjà été menée en 2010-2011 sous le label « Made in Jura », développé par le département. Quelque 1.500 paires avaient été vendues en un an par les 8 magasins du Doubs, affiliés à la Mutualité Française Doubs, une entreprise de l’économie sociale et solidaire qui emploie 1.200 salariés et réalise 75 millions d’€ de chiffre d’affaires.

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