IMMOBILIER/BOURGOGNE-FRANCHE-COMTÉ. L’immobilier d’entreprise est reparti mais le marché reste instable pour le crédit-bail, en raison de taux bancaires longs toujours faibles.
La société régionale Batifranc dans laquelle le Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté a pris une minorité de blocage, contourne cette difficulté conjoncturelle en élargissant son activité à la location.

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L'Actiparc de Grand Charmont, dans le Pays de Montbéliard, des ateliers jumelés à des bureaux destinés à des PME.© Girolimetto Architecte.

 

Son métier est le crédit bail, un mode d’investissement dans l’immobilier professionnel comparable à la location avec option d’achat qui consiste à financer le bâtiment et superviser sa construction, à le louer pendant une durée déterminée (en générale 15 ans) à son occupant qui, au terme du contrat, peut le racheter à sa valeur résiduelle. La mission du crédit-bailleur peut inclure l’acquisition et l’aménagement du terrain, les honoraires de maîtrise d'œuvre, de contrôle technique, de mission hygiène-sécurité et la prime d'assurances construction.
Pour l'entreprise, ce mécanisme permet de financer son patrimoine immobilier sans apport initial. L'autre avantage qui fait son succès réside dans le fait que les loyers payés par l'entreprise sont des charges déductibles en intégralité.
 

Cela fait 34 ans ans que la SAEM (société anonyme d’économie mixte) Batifranc fait ainsi émerger des projets industriels en Bourgogne-Franche-Comté depuis son siège de Besançon et une agence à Dijon.
Avec 41,7% du capital, la région Bourgogne-Franche-Comté en est devenue en 2017 le premier actionnaire bénéficiant ainsi d’une minorité de blocage : la collectivité a racheté les parts des conseils départementaux suite à l’abandon de la compétence développement économique voulue par la loi NOTRe.

 

 

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Les communautés de communes qui ont désormais une compétence en immobilier d’entreprises par la même loi, pourraient entrer au capital, à l’instar de Pays de Montbéliard Agglomération qui l’est déjà, souligne Jean-Claude Lagrange, président depuis octobre 2017, suite à l’élection de Denis Sommer à l’Assemblée Nationale.

L’actionnariat demeure cependant majoritairement privé à hauteur de 51,78% du capital de 9,6 millions d’€. Les trois banques régionales, Caisse d’Épargne, Crédit Agricole et Banque Populaire, sont ensemble les principaux actionnaires et bailleurs de fonds de Batifranc. Figurent également dans l’actionnariat, la Caisse des dépôts ainsi que la CCIR (chambre régionale de commerce et d’industrie).

« Avec la crise économique, nous avons été cinq ans en apnée, commente Pierre Chavelet, aujourd’hui les projets redémarrent mais on ne peut pas parler de réelle reprise, le marché n’est pas encore solide.»


Plusieurs projets industriels en route

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Pose de la première pierre de la halle de maintenance ferroviaire d'Erion à Montceau, le 11 juillet 2018. De g.à d. : Pierre Chavelet, DG Batifranc, Laëtitia Martinez, vice-présidente du Conseil Régional de Bourgogne-Franche-Comté, Guy Souvigny, maire-adjoint de Montceau-les-Mines, Lionel Duparay, conseiller départemental, Jean-Claude Lagrange, président Agence Ecosphère, David Marti, président de la Communauté Urbaine Creusot-Montceau et Daniel Martinez Alonso, Président d'Érion.


L’actualité du second semestre semble pourtant le démentir. Première pierre de la halle de maintenance ferroviaire de l’opérateur espagnol Érion, en construction à Montceau (Saône-et-Loire). Déménagement de Cylindre, la filiale française du groupe suisse Dixi dans un bâtiment plus grand, de 3.500 m2, à Damparis, près de Dole (Jura). Livraison imminente de l’extension du centre de recherche Échappements de Faurecia à Bavans, dans le Pays de Montbéliard. Déménagement prochain de la société d’ingénierie industrielle Segula Technologies sur le parc d’activités Technoland II. Construction des nouveaux locaux de R-Tech Oenologie à Beaune. Et plus récemment, location des locaux du futur atelier de maroquinerie de SIS et de la société G-Manufacture à Vaivre-et-Montoille, près de Vesoul.

Avec 22,4 millions d’€ de nouveaux engagements (20,3 millions en 2016), le bilan 2017 de l’organisme de crédit-bail est « plus qu’honorable ». Il a été clos à 94,5 millions d’€ avec un résultat après impôt de 323.000 €.

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Parmi les projets à venir, R-Tech Oenologie à Beaune. © Ligne Bleue.


« Cependant, on ne doit pas passer sous silence les données publiées par la profession qui font état, pour l’année 2017, d’une diminution de 7,5 % de la production de tous les adhérents crédit-bail immobilier de l’Association des Sociétés Financières, avec une baisse des loyers facturés de 1,5 % et une diminution des opérations en cours de 1,2 % », souligne Pierre Chavelet. Chez Batifranc aussi, le bilan annuel pour le crédit-bail est » décevant », une appréciation atténuée par les perspectives » encourageantes » de 2018.

 

 

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Selon le directeur général, l’organisme de crédit-bail s’en sort plutôt bien grâce à une diversification déjà ancienne de son activité. Avec 29% du chiffre d’affaires, en progression de 14,07 % en 2017, la location grignote petit à petit l’activité de crédit-bail (59%) et les prises de participations dans des SCI de projets et la plupart des sociétés patrimoniales régionales compensent la faiblesse de l’activité historique de crédit-bailleur, peu encouragée selon le directeur général, par des taux bancaires longs faibles.

En réaction, Batifranc diversifie aussi ses modes opératoires. Pour la halle de maintenance d’Érion, en construction à Montceau, Batifranc a effectué pour la première fois, une véritable mission d’assistance à maîtrise d’ouvrage : définition du cahier des charges, sélection des prestataires et, suivi des réunions de chantier aux côtés de Keops, le promoteur-constructeur du bâtiment de 4.153 m2 qui représente  un investissement de 4,7 millions d’€.

 

Un format spécialement adapté aux PME

 

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Extension des locaux de Genlis Métal, dont la première phase avait déjà été réalisée en crédit-bail. © Ostin, architecte.

 

La diversification, dans la location, était intervenue dans le milieu des années 2000, avec la location de bâtiments industriels et tertiaires. Batifranc s’adaptait alors à la demande des entrepreneurs qui ne souhaitaient plus investir dans l’immobilier, et des collectivités locales qui cherchaient des solutions pour attirer de nouvelles entreprises ou mieux héberger celles de leur territoire. Le crédit-bailleur est propriétaire du bâtiment qu’il fait construire et le loue, cette fois sans engagement d’achat par l’occupant.

C’est sur la technopole de Temis à Besançon que les premiers immeubles en blanc ont été construits, puis dans la zone de Mazen-Sully à Dijon. Depuis, la société compte à son actif un concept baptisé Actiparc, dans un format spécialement adapté aux PME. Des locaux d’activités de 250 à 350 m2 sont divisibles en ateliers avec bureaux attenants. Ce fut d’abord à Montbéliard, puis depuis le printemps dernier, à Grand Charmont, toujours dans le Pays de Montbéliard, Saint-Vit près de Besançon, et à Genlis, dans la plaine dijonnaise.

 



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L’expérience a conduit la société à devenir promoteur à la demande. Comme pour les futurs locaux que la société d’ingénierie industrielle Segula Technologies qui travaille principalement pour l'industrie automobile louera fin 2018, début 2019 dans la zone de Technoland II à Brognard, dans le Pays de Montbéliard. L’immeuble de 2.850 m2 qui hébergera environ 200 salariés a été conçu afin d'être facilement divisible pour être éventuellement remis sur le marché au prochain cycle creux de l’industrie automobile.

La particularité de Batifranc étant de gérer du risque, une partie de son bilan est entaché de résiliations de bail suite à la liquidation judiciaire de leurs occupants ou des créances douteuses. Des biens qui sont parfois difficiles à louer ou à vendre selon leur localisation ou leur état.

L’un des dossiers les plus compliqués de ces dernières années a enfin trouvé un aboutissement heureux : la reprise en mai dernier de la Société Industrielle Bruno Richard à Luxeuil (Haute-Saône) par la société belfortaine RKF Luxury Linen.

L’ancien gérant, Jean-Luc Piton, président du Medef Franche-Comté jusqu’en 2016, a laissé une ardoise de loyers impayés de près de 400.000 € à Bâtifranc. L’affaire est dorénavant aux mains de la justice.

 

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Parmi les livraisons 2018 : Dixi Cylindre à Dole. © Apside Architecte.

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