AGROALIMENTAIRE/GRAND EST. L’INAO (Institut national de l’origine et de la qualité) examine actuellement la demande de modification du cahier des charges de l’AOP Munster.

Concentrée autour du massif vosgien, la filière planche sur ce document depuis dix ans sous l’égide du Syndicat interprofessionnel du fromage munster (SIFM).

A côté de gros transformateurs et affineurs, 88 producteurs fermiers défendent, à l’instar de la GAEC des Trois Chênes à Winstersbourg (Moselle), une production en circuits courts.

 

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Aux côtés de gros faiseurs, des petites exploitations comme, ici, la GAEC des Trois Chênes, en Moselle. © Philippe Bohlinger.

 

Vingt-et-un jours ; c’est le temps d’affinage minimum requis pour obtenir ce célèbre fromage à pâte molle si emblématique du massif vosgien. En revanche, plus de dix années seront vraisemblablement nécessaires à la filière pour réécrire le cahier des charges de cette appellation d'origine protégée au niveau européen (AOP).

 

Races des vaches, alimentation ou encore techniques de transformation, les intérêts ne convergent pas toujours entre les 1.280 producteurs de lait, les 80 producteurs fermiers, les 8 affineurs exclusifs et les 6 gros transformateurs (données INAO 2014).

 

L’appellation Munster couvre 1.300 km2 et sept départements autour du massif vosgien : Bas-Rhin, Haut-Rhin, Vosges, Moselle, Meurthe-et-Moselle, Haute-Saône et Territoire de Belfort.

 

Les départements lorrains concentrent l’essentiel de la transformation avec notamment Fromages Ermitage, la Fromagerie de Blamont (Sodiaal) et la Compagnie des fromages et RicheMonts (Sodiaal également). Ils confient généralement leurs produits à des affineurs.

 

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A l’inverse des producteurs fermiers fabriquent les fromages de A à Z. Ces derniers, surtout présents en Alsace, réalisent 13% de la production annuelle qui se chiffre à 6.800 tonnes. Une proportion assez importante pour une AOP.


« L’intérêt d’une filière c’est d’avancer sur la qualité sans déstabiliser pour autant la profession », tempère Florent Haxaire, président du Syndicat interprofessionnel du fromage Munster (SIFM) qui fédère la filière.

 

Après validation du nouveau cahier des charges début 2017 par l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), une procédure nationale d’opposition de deux mois devrait permettre de recueillir d’éventuelles doléances. Après homologation définitive par l’INAO, puis instruction au niveau européen, la nouvelle AOP pourrait être opérationnelle en 2019.

 

L’AOP Munster est réputée assez peu restrictive

 

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La race des vaches est un des enjeux de la révision du cahier des charges de l’AOP Munster. © Philippe Bohlinger.

 

L’enjeu est de taille, car l’AOP Munster est réputée assez peu restrictive. Par exemple, une partie importante de la production laitière est réalisée par la race très productive Prim’Holstein. A l’inverse l’AOP, Reblochon n’autorise que trois races : l’Abondance, la Montbéliarde et la Tarine. La nourriture est également moins strictement encadrée que d’autres AOP.

 

A 30 minutes du site industriel des Fromageries de Blamont, l’un des gros producteurs de munster, la GAEC des Trois Chênes produit depuis six ans à Wintersbourg (Moselle) un munster fermier bio.

 

Ce produit représente un peu plus de 15% du chiffre d’affaires annuel (1 million d’€) de l’exploitation qui emploie 14 personnes. Amoureux de son métier, son gérant, Franck Nickles, n’est pourtant pas loin de perdre la foi. Il évoque les contraintes liées à une production fermière très manuelle avec notamment deux traites par jour.

 

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Le fromager cite aussi les surcoûts imposés par l’alimentation des vaches pour respecter le cahier des charges du bio. Il raconte ses inquiétudes lors des inspections annuelles de la commission AOP Munster : « Le munster doit être lavé et frotté à l’eau salée tous les deux jours pour obtenir sa croûte de couleur jaune à orangé-rouge. Les miens sont parfois un peu clairs… »

 

La révision du cahier des charges de l’AOP sera-t-elle l’occasion de booster le rayonnement de ce fromage au marché stable voire baissier ?

 

C’est possible d’autant que l’appellation « Munster » ou « Munster Géromé » en référence à la ville de Gérardmer (Vosges), ancien centre de commercialisation de cette spécialité monastique, séduit au-delà des frontières : 5 à 10% de la production est exportée dans les pays germaniques et d’Europe du nord.

 

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© Philippe Bohlinger.

Qui est Franck Nicklès ?


Formé au lycée agricole d’Obernai, Franck Nickles, 39 ans, a créé la GAEC des Trois Chênes en 1998, à partir de la petite exploitation laitière (80 hectares) de ses parents.

Séduit par les opportunités offertes par la vente directe, il s’est rapidement tourné vers la fabrication et la distribution de produits fermiers 100% bio.
Avec 55 vaches, une centaine de chèvres et 300 cochons, l’exploitant commercialise ses charcuteries, viandes et fromages sur les marchés de Strasbourg, Metz, Saverne, etc.

« On gagne assez peu d’argent, mais on arrive à maintenir la barque », philosophe l’exploitant.

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