POINT DE VUE. Ce protocole d’échange basé sur la distribution numérique est annoncé comme un bouleversement majeur des transactions mondiales.
En permettant à leurs usagers de se passer des tiers de confiance - les banques notamment -, les blockchains ouvrent des perspectives en matière d’autogestion, et vont même « uberiser Uber », explique Laurent Leloup, l’un de ses évangélistes, à l'initiative, avec quelques start-ups, d'un projet de pôle spécialisé à Besançon.

Banques et grands comptes commencent à se pencher sérieusement sur cette technologie de rupture, a t-il dernièrement expliqué dans une conférence à l'invitation de l’association Silicon Comté.


blockchain

 

« Disruption et révolution ». Tel était le titre de la conférence donnée fin mars à Besançon, au Scénacle, par Laurent Leloup. Fondateur du groupe de médias en ligne Finyear, expert blockchain auprès du pôle mondial « finance innovation », évangéliste de la technologie des blockchains dans les grands groupes et les PME et président de France Blocktech (association française de l’écosystème blockchain français), il était l’invité de l’association Silicon Comté, qui regroupe une centaine d’adhérents – professionnels du numérique ou étudiants – et essaie de ne rien manquer des sujets émergents.

 

Basé à Besançon, Laurent Leloup se présentait à la fois comme start-uper et expert, revendiquait ce titre choc et estimait donner la première conférence sur ce sujet hors de Paris. Dans la salle, une quarantaine d’étudiants, dirigeants de jeunes entreprises, représentants de chambres consulaires, avocats, cadres d’entreprises ou de collectivités et simples curieux.

 

La technologie des blockchains, littéralement « chaîne de blocs », « c’est une façon de repenser la société », avançait le conférencier pour introduire le propos.

 

« Elle est apparue en 2009 et a permis l’émergence de la crypto-monnaie bitcoin. Il s’agit d’une base de données transactionnelle distribuée, et on pourrait comparer cette technologie à un grand livre où chaque nouvelle transaction serait inscrite à la suite des autres. »


Ecole des vins

 

Un protocole informatique pour engager des transactions sans tiers de confiance

 

La blockchain est un protocole informatique décentralisé et distribué, qui s’appuie sur le protocole Web pour engager des transactions entre les participants de la chaîne, de pair à pair, l’ensemble des blocs formant la chaîne. « Il y un aspect transparence important, l’aspect décentralisation est également essentiel, on se dédouane ainsi des autorités et des tiers de confiance. »

 

A en croire ses promoteurs, la blockchain pourrait très vite bouleverser la planète économique et financière. En janvier 2016, explique Laurent Leloup, quelque 160.000 transactions bockchains auraient été enregistrées chaque jour pour un volume quotidien de 290 millions de $, « pas très loin derrière Paypal qui peut se faire du souci ».

 

Des start-upers s’y positionnent depuis septembre 2015 avec des projets dans les banques, l’assurance ou la logistique. L’hebdomadaire britannique « The Economist » lui consacrait sa Une le 31 octobre en titrant « The trust machine » (la machine à confiance), et selon le conférencier, un consortium de 42 banques, baptisé R3CEV, s’est constitué à New York pour anticiper le bouleversement annoncé.

 

« Si 42 banques se réunissent, c’est qu’il y a le feu. Elles ont très peur. Pour ma part, je pense qu’il va y avoir de la casse, ça monte et ça devient une vraie réalité économique. La technologie blockchain peut s’appliquer à toute forme de contrat financier sans aucune intermédiation. Les contrats restent privés, encapsulés, mais la transaction se fait par la blockchain. Dans un an ou deux, il y aura des outils et des plateformes pour utiliser la technologie au quotidien. (…) C’est la technologie la plus disruptive depuis l’avénement du Web. »

 

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Laurent Leloup, président de France Blocktech, association française de l’écosystème blockchain français.

Décentraliser le marché des émissions d’obligations d’un faible montant

 

Le 28 avril dernier, « Les Echos Week-end » consacraient eux aussi à cette technologie un article assez enthousiaste intitulé « Blockchains, la deuxième révolution numérique », où l’on apprenait que fin février, l’ONU aurait publié « un document de travail faisant le point sur les opportunités offertes par les blockchains en matière de finance sociale et solidaire ».

 

Mais également « qu’une récente ordonnance de Bercy ouvre même la voie à l’expérimentation d’un registre blockchain en France. Objectif : fluidifier le financement des PME en décentralisant le marché des émissions d’obligations de faible montant ».

 

Dans son intervention, Laurent Leloup a esquissé l’essentiel du sujet en expliquant la génèse du protocole, l’invention de son mystérieux fondateur, Satoshi Nakamoto, disparu depuis (mais que l’on aurait récemment identifié en Australie, selon lemonde.fr du 2 mai), le fonctionnement de la technologie (de l’adresse des usagers au format ASCII de 58 caractères alphanumériques à la validation par consensus et au minage, en passant par les nœuds et les atouts des blockchains publique et privées), les usages possibles et les développements futurs.

 

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Des organisations autonomes fonctionnant en autogestion.

 

Parmi ces derniers, l’uberisation d’Uber, par exemple. « Uber exploite un réseau de chauffeurs et prend 20% de commission. Ça, les blockchains vont le casser : avec les mêmes applications, on va simplement partager les gains entre chauffeurs. C’est une application parmi d’autres, on peut imaginer des organisations décentralisées autonomes qui fonctionneront en autogestion. A l’image de Lazooz, le Blablacar du blockchain en Israël, dont le réseau s’autoalimente et qui devrait bientôt débarquer en Europe. »

 

Les quelque quarante personnes ayant assisté à cette conférence sont ressorties perplexes voire sceptiques pour certaines, enthousiastes pour d’autres. « La technologie est mature, et les esprits sont matures aussi pour l’adopter aujourd’hui », explique Christophe Boutet, le président de Silicon Comté, qui s’intéresse au phénomène depuis plusieurs années et s’inscrit plutôt dans la catégorie des enthousiastes.

 

« Les grands acteurs économiques sont en train de passer des appels d’offre pour des applicatifs blockchain, et certains développeurs franc-comtois peuvent être intéressés par la Blockchain Valley que Laurent Leloup veut voir émerger. »

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