AVIS D’EXPERT. Le meilleur métier, c’est celui qu’on aime, explique Jean-Michel Cadet aux élèves de CM2 et de 3ème.
Créateur d’une entreprise individuelle, Eosis, il va de classe en classe pour expliquer que le monde de l’entreprise n’est pas un milieu hostile et que l’on peut même s’y épanouir.

Qu’il est fait en majorité de TPE et de PME, que chaque métier est important et que les patrons ne sont pas tous des Carlos Ghosn en puissance comme en devenir.

Rencontre.

 

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• Quand avez-vous créé Eosis ?

 

C’était en 2004, après avoir passé 18 ans dans l’enseignement en collèges et lycée, comme professeur d’histoire-géographie et comme professeur principal. En 2000, j’ai décidé de tourner la page et de faire autre chose. J’ai été VRP pendant un an, puis je me suis occupé de gestion de formation pendant deux ans et demi chez Unifaf, un Opca (organisme financer de la formation professionnelle, ndlr). Mais j’avais déjà dans l’idée de lancer un concept de sensibilisation des élèves de CM2 au monde de l’entreprise.

 

• Pourquoi les CM2 ?


C’est un âge charnière entre l’enfance et l’adolescence. A cet âge-là, on est à la fois très réceptif et curieux, avec une maturité qui s’est d’ailleurs beaucoup développée depuis – les CM2 d’aujourd’hui ont la maturité des élèves de 4ème il y a quinze ans.
En mars 2004, je me suis lancé comme travailleur indépendant. Cela n’a pas été facile, on me regardait avec des gros yeux, mais j’ai mis en place, progressivement, un réseau d’écoles.

L’entreprise, pour certains, c’est le grand méchant loup, il y eut parfois des réactions hostiles. J’ai pris mon bâton de pèlerin et je suis allé à la base, rencontrer les enseignants, et j’ai monté une animation d’une demi-journée pour les classes de CM2.

 

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• Quel est le fil conducteur de votre intervention ?


Il y en a trois. Le premier, c’est de montrer que les valeurs de l’école sont aussi celles du monde du travail : la rigueur, la confiance, la perséverance, l’honnêteté, la tolérance… Je montre des vidéos et mon intervention est interactive et ludique, cela permet de mieux faire passer le message.
Le deuxième fil conducteur, c’est celui de la complémentarité des métiers dans notre société. Ce sont les petits engrenages d’une grande machine sociale. Cela permet parfois de réhabiliter le métier des parents, et je m’adapte à chaque école, dont l’histoire est toujours différente.
Quant au troisième fil conducteur, il consiste à montrer que le monde de l’entreprise est fait en majorité de PME et de TPE, sans lesquelles la société ne pourrait tourner. Je réhabilite l’entreprise au sens social du terme, j’explique que, parfois, le patron a un salaire moins élevé que les salariés, que tous ne sont pas des Carlos Ghosn, loin de là.

 

• Revenons un peu en arrière. Quel avait été votre constat de départ ?


Mon père était directeur général d’une entreprise industrielle, et c’était quelqu’un qui allait saluer tous les salariés tous les matins. Le chef d’entreprise, ce n’est pas forcément le grand méchant loup.
De mon côté, j’avais travaillé en entreprise pendant mes études, puis j’avais été professeur principal et à ce titre, suivi les projets de stages de troisième. J’avais entendu les réflexions des enseignants.
Je cite souvent cette phrase de Churchill : « Beaucoup voient dans le chef d’entreprise le loup qu’il faut abattre et pas le cheval qui tire le char ». On a besoin des entreprises, comme du service public. Je voulais réhabiliter l’entreprise dès cet âge-là.

 

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Plus de 13.000 élèves de CM2 ont été sensibilisés au monde des entreprises depuis 2011.

 

• Concrètement, comment avez-vous procédé ?


Au départ, je suis allé voir les entreprises. Les CM2, à quoi ça sert ? me demandaient-elles. Peu m’ont suivi. J’ai vu les communes aussi. En 2005, j’ai rencontré un chef d’entreprise de Belfort, membre de la CGPME, qui m’a conseillé de m’adresser à la CCI de Haute-Saône. J’ai présenté mon projet au bureau des élus, et c’est ainsi que je suis entré dans le réseau des CCI, en Franche-Comté, puis à Dijon, en Haute-Marne, en Loire-Atlantique, dans le Calvados…

Cela représente plus de 13.000 élèves depuis 2011, et plus de 25.000 depuis 2004, sur huit départements.

 

 

• Fin 2014, vous avez lancé votre concept à destination des classes de 3e, cette fois. La démarche est la même ?


Le message est le même, mais adapté : à cet âge-là, il s’agit de démolir les idées reçues sur l’apprentissage. Pour un certain nombre d’élèves, l’apprentissage, c’est pour les nuls. J’avais lancé ce concept en septembre 2014, avec l’espoir de trouver de nouveaux financeurs.

 

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• Justement, comment arrivez-vous à financer vos interventions ?


La période est difficile depuis un an pour les CCI. Pour poursuivre ma mission, je cherche de nouveaux partenaires, peut-être davantage dans l’industrie qui a une mauvaise image, alors qu’elle intègre de plus en plus de haute-technologie, de travaux de propreté.
J’ai lancé une opération de parrainage, par une entreprise, d’une classe de CM2 à côté de chez elle. Les entreprises s’engagent pour 300 € dans une convention de partenariat.
J’ai démarré à la rentrée de septembre 2015 et j’en compte déjà une petite vingtaine, dont DCM Précision, en Haute-Saône, qui me soutient depuis huit ans. Ce sont des pionniers ! Il en faudrait une centaine pour que l’action d'Eosis (pour Eveil, Ouverture, Sensibilisation, Information, Savoir, ndlr) soit viable. Progressivement, j’essaie de tisser ma toile…

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